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Lupovino, vingt ans après même combat

17 septembre 2015

Depuis 1995, l'association Lupovino a pour objectif principal de venir en aide aux populations nomades sédentarisées. S'adressant, au moment de sa création, aux gens du voyage, son public s'est étendu à d'autres communautés, notamment rom, et à l'ensemble des habitants du quartier. Ce qui lui permet aujourd'hui d'être un acteur central de la vie du Neuhof.

Il y a vingt ans un groupe de femmes tziganes se réunissait en une association, lutte pour une vie normale ou Lupovino, dans le but d'améliorer les conditions de vie des populations nomades sédentarisées de Strasbourg. Parmi leurs réclamations, la mise à disposition, par la ville, de parcelles de terrains alimentées en électricité et en eau ou encore l'installation d'éclairage public. Ces "choses basiques" maintenant acquises, comme le rappelle la directrice Marie Amalfitano, l'association s'est trouvée de nouvelles missions.

"C'est une démarche citoyenne"

Parmi les nouveaux dispositifs, la tenue régulière de cafés-rencontre. Depuis 2010, Lupovino donne, chaque année, rendez-vous, une dizaine de fois, aux femmes du Polygone, le plus souvent des mères de famille, afin qu'elles échangent sur leur quotidien. "C'est une démarche citoyenne, il est important que ces femmes puissent partager leurs expériences", explique Touania, éducatrice spécialisée au sein de l'organisation prévention insertion de Strasbourg. Des temps de parole appréciés et recherchés qui attirent aujourd'hui des femmes de tout le quartier du Neuhof. "Tout le monde est le bienvenu ici, qu'il soit ami de près ou de loin avec les gens du voyage", précise Marie, une des salariés de l'association.

Ce mercredi, le sujet "A l'école, rythmes scolaires et apprentissage" a ainsi permis à Angélique 37 ans, Nora, la trentaine et Céline, la quarantaine, de discuter de leur méthodes d'éducation ou encore de l'image des jeunes du Neuhof à l'école. "J'ai deux garçons de sept et neuf ans et ça devient compliqué pour mon compagnon et moi en ce qui concerne leur éducation. On leur a toujours dit d'aller voir les maîtres d'école lorsque quelqu'un les embête. Je ne cache pas que mes garçons sont turbulents, donc forcément quand ils vont voir le maître, bien souvent, il ne prend pas leur défense parce qu'il a l'habitude de les voir faire des bêtises. La fois d'après au lieu d'aller le voir, ils répondent par les coups", raconte Angélique. Entre deux prises de parole, l'éducatrice livre quelques conseils. Vient ensuite le tour de Céline, qui témoignera de sa peur des adolescents en scooter lorsque ses enfants jouent dans la rue.

43 Roms ont décroché un emploi

Longtemps sous le radar des associations spécialisées, la communauté rom fait désormais partie du public visé par l'association. "Avec le temps nous avons grandi. Nous comptons aujourd'hui neuf salariés et une quinzaine de bénévoles, et notre champ d'action s'est élargi, aux domaines de l'emploi et du socio-culturel", explique la directrice. Pour faciliter l'insertion des populations roms, Lupovino propose ainsi des cours de français. L'atelier, mis en place en 2013, devait dans un premier temps, répondre à une situation d'urgence: roms Roumains et Bulgares faisaient face à une double difficulté en matière d'emploi, la barrière de la langue et les tracas administratifs. Aujourd'hui cette situation d'urgence n'est plus, mais la recherche d'emploi tout aussi nécessaire. Lorsqu'un membre d'une famille décroche un emploi, c'est l'espoir pour le reste du foyer d'obtenir un logement.

Ainsi, ils sont treize à reprendre le chemin de l'école tous les matins sur une période de quatre mois. "Chaque année nous enregistrons environ une quarantaine d'inscriptions, mais nous ne pouvons accueillir que treize personnes car pour le moment je suis seule à encadrer cette formation. Pour le choix des candidats nous nous basons essentiellement sur leur motivation. Les participants ont accès à des immersions en entreprises et nous les accompagnons dans leurs démarches administratives auprès de pôle emploi ou dans la rédaction de leur CV", indique Eva Tockert, en charge notamment des cours de français.

Depuis le lancement de cette opération, sur quatre vingt personnes accompagnées plus de la moitié, soit quarante-trois, ont trouvé un travail. "Notre prochain objectif est de mettre en place des groupes plus petits et de niveau qui nous permettraient un meilleur suivi", confie Eva Tockert.

A partir du 7 octobre, l'association lance La Semaine tsigane, qui ambitionne de faire découvrir cette culture au plus grand nombre.

Audrey Altimare

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