Vous êtes ici

Premiers pas dans une école française

20 octobre 2011

Entre l'arrêt de tramway Saint-Christophe et le terrain d'accueil des gens du voyage, l'école Guynemer accueille des enfants nouvellement arrivés sur le territoire et ne parlant pas français. Ils sont intégrés dans les classes avec les enfants du quartier en fonction de leur âge, et bénéficient, en plus, de cours d'apprentissage du français.

Un groupe d'enfants primo-arrivants en cours de français à l'école Guynemer. (Photo CUEJ - Catherine Deunf)

Sept écoliers, âgés de six à huit ans, assis autour d'une petite table ronde. Ils jouent au mémory, tirent une carte, nomment l'objet représenté puis cherchent la carte identique sur la table. Ils arrivent de Roumanie, de Bosnie, de Russie, du Kirghizstan ou d'Espagne. Ce sont des primo-arrivants, c'est à dire des personnes arrivées récemment en France et amenées à y séjourner durablement. L'école Guynemer en accueille 18 sur un effectif total de 190 élèves.

Comme tout enfant présent sur le territoire français, Alessia, Diana, Sulyman, Yourik, Nurmukkamed, Islam et Aya ont droit à l'éducation. En s'amusant, ils acquièrent du vocabulaire, assistés par Anne Henner, professeur des écoles. Les enfants viennent une heure par jour en petits groupes dans sa classe. En complexifiant la phrase à chaque séance, elle leur permet d'assimiler des structures de plus en plus élaborées : «Qu'est-ce que tu connais? Je connais les chaussettes. Prends les autres chaussettes». Avec beaucoup de douceur, elle reprend les fautes. Anne est en poste depuis deux ans. Aucune formation pour encadrer les primo-arrivants n'existe à l'Education nationale, elle a donc imaginé, seule, toutes sortes d'astuces pour enseigner de manière ludique.

Aujourd'hui, la séance est basée sur le vocabulaire de l'habillement. Dans un prochain cours, les enfants aborderont un autre lexique. « Ils se passeront un ballon. Celui qui lance le ballon posera des questions simples sur les origines, l'âge et le prénom des parents de son camarade. Celui qui rattrape la balle répondra. Ça leur permettra en plus de mieux se connaître », explique Anne. Par la répétition, la langue française deviendra un automatisme au bout de quelques mois. «Chaque leçon dure une heure et se termine par une phase écrite. L'enfant apprend ainsi à devenir un élève et le cahier fait le lien avec la maison».

La durée d'apprentissage varie selon leurs origines. Si leur langue maternelle est d'origine latine (comme le roumain, l'espagnol ou l'italien) les enfants maîtriseront le français plus rapidement.« La vitesse d'assimilation dépend également de l'implication familiale», explique le directeur de l'école, Guy Husser. «Si l'école n'est qu'une parenthèse et que dans la cellule familiale, les autres membres ne parlent pas français, on se heurte à un mur ».

Pour tous ses élèves, et pas uniquement les non-francophones, l'école Guynemer fonctionne sur un principe de modules : les écoliers sont regroupés par niveaux pour l'apprentissage des mathématiques et du français. A leur arrivée, Anne Henner teste donc le niveau des petits étrangers. Si le français leur est la plupart du temps inconnu, le niveau de mathématiques dépend beaucoup de leur parcours scolaire dans leur pays d'origine.

Pour les autres leçons, les enfants sont regroupés dans des classes selon leur âge. Les non-francophones regagnent alors leur classe avec les copains du quartier. « Cette mixité les oblige à pratiquer le français. Elle leur permet de s'intégrer et de comprendre comment ça fonctionne en France », analyse le directeur.

A Strasbourg, dix écoles offrent ainsi des classes d'intégration (CLIN). Petit à petit, les enfants s'acclimatent à leur nouvelle vie et ont de moins en moins besoin de cette aide. Petit à petit, ils deviennent des écoliers ordinaires.

Catherine Deunf

Imprimer la page