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Le camp rom de Saint-Gall fermera avant l'hiver

18 octobre 2013

Des familles vivent sur ce site depuis plus de trois ans (Judith Kormann/CUEJ)

 

Installés illégalement depuis 2009 derrière le cimetière Saint-Gall à Koenigshoffen, 130 roms seront prochainement évacués du site sur demande de la mairie de Strasbourg. La Ville assure avoir déjà trouvé des solutions de relogement pour ces habitants.

 

« Le terrain de Saint-Gall occupé illégalement par les Roms depuis plus de trois ans sera fermé avant l'hiver. Dans une ville comme Strasbourg, capitale européenne et siège de la Cour européenne des droits de l'Homme, on ne pouvait plus laisser perdurer un campement comme celui-ci, avec des conditions d'hygiène déplorables. » Eric Elkouby (PS) , adjoint au maire de Strasbourg pour le quartier de Koenigshoffen, tente depuis deux ans de fermer ce camp, installé illégalement sur un terrain de la mairie, entre le cimetière Saint-Gall et les jardins familiaux. « J'ai interpellé à plusieurs reprises les pouvoirs publics, jusqu'au ministère de l'intérieur, et en octobre 2012 il y a même eu une décision de justice qui est allée dans mon sens, en prononçant l'expulsion des roms de ce campement, mais jusqu'ici le maire n'avait pas souhaité l'appliquer. » A quelques mois des élections municipales, la situation semble se débloquer. La circulaire interministérielle du 26 août 2012 – dite circulaire Valls – conseille aux collectivités territoriales d'accompagner les populations évacuées vers un hébergement plus adapté. « Les solutions de relogement ont été cherchées par Marie-Dominique Dreyssé, adjointe à l'Action sociale, donc ce n’est plus mon problème, lâche Eric Elkouby. Ce qui me préoccupe, c’est de pouvoir permettre à ces personnes de vivre dignement et à Koenigshoffen de retrouver son calme. »

 

Pas d'intervention policière prévue

Depuis 2008, Marie-Dominique Dreyssé (EELV) a pris en main le dossier des Roms et la dizaine de campements situés à Strasbourg. Elle refuse de parler d'évacuation du site de Saint-Gall, elle lui préfère le terme de fermeture. « Ça n'est pas pareil, on n'a pas décidé d'appliquer la décision de justice, il n'y aura pas de policiers sur place pour évacuer les gens. La fermeture se fera avec l'accord des habitants sur place, on ne les lâche pas dans la nature. On aurait pu fermer le camp il y a deux ans, mais on ne trouvait pas de solution de relogement, aujourd'hui on a une solution provisoire jusqu'au printemps prochain, puis on les installera sur un site plus pérenne dans un deuxième temps. »

Marie-Dominique Dreyssé, adjointe à l'Action sociale, détaille les solutions de relogements qui seront proposées aux Roms de Saint-Gall. (Vidéo : R.G./CUEJ)

Des rats, de la boue et des morceaux de verre

Mercredi 16 octobre, des habitants du site de Saint-Gall disent avoir reçu la visite de Jean-Claude Bournez, responsable de la mission rom à la mairie de Strasbourg. Il leur aurait annoncé que la fermeture du camp se passerait au cours du mois.
Un soulagement tout de même pour Daniel, 41 ans. Il est en France depuis six mois, il a quitté la Roumanie il y a six ans puis est parti travailler en Espagne. Il cherche aujourd'hui du travail en France, se débrouille, enchaîne les petits boulots non déclarés, notamment dans le BTP. Les conditions d'hygiène sur le camp lui sont insupportables. Avec sa femme ils habitent une caravane de 10 m2. Au pied du lit, un seau recueille les goutes d'eau qui s'infiltrent par le plafond. Les jours de pluie, il est impossible de circuler dans le camp sans ses bottes, à cause de la boue. Les enfants jouent parmi les bouts de verre et les flaques d'eau. Ils sont 130 sur place à vivre dans ces conditions insalubres. « On n'est pas contre la fermeture du site, ça ne peut qu'être mieux, surtout au niveau sanitaire, remarque Daniel. On n'a pas tous l'électricité, des rats se baladent parmi les caravanes. Pour laver nos vêtements on doit aller à une laverie route des Romains qui nous coûte cinq euros par machine, c'est trop cher pour nous. Alors on essaye de garder une hygiène coûte que coûte, mais on est plus dans la survie qu'autre chose. »

LEGENDE

(Photos: Judith Kormann/CUEJ)

De la verdure à la place du bidonville

L'organisation non-gouvernementale Médecins du monde vient tous les mercredis à Saint-Gall. Les bénévoles apportent des consultations médicales et des médicaments aux habitants du camp, souvent touchés par des maladies liées à la précarité : problèmes dentaires, mal de ventre, tuberculose, etc. « Espérons que les nouveaux logements amélioreront leurs conditions de vie, personne n’a vraiment envie de rester là, les conditions sont trop précaires, confirme Germain Mignot, coordinateur à l'ONG. Le problème c'est que la Ville ne les consulte pas, ils prendront ce qu'on leur propose, mais quelques semaines avant d'être évacués ils ne savent même pas où ils vont être relogés. »

Pour Dominique Steinberger, président de l'association Latcho Rom, qui défend les droits de ces populations, la fermeture du site ne peut être qu'une bonne chose. « Ce qui sera proposé sera mieux, on en est sûr, on a confiance en la mairie, mais on se demande qui des familles aura le droit d’être relogé ? Quels seront les critères ? Qui sera à l’origine des choix ? On ne peut pas laisser des gens de côté parce qu’ils sont arrivés sur le camp depuis moins de temps, humainement ce n’est pas possible de faire une chose pareille. »

En lieu et place du bidonville sera prochainement installé l'un des projets du Parc naturel urbain (PNU), qui a pour objet de remettre un peu de verdure au cœur de la ville.

Romain Geoffroy

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