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Les changements de population favorisent l'arrivée de quelques nouveaux commerces tandis que les enseignes implantées de longue date tentent de se moderniser. 

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Route de Mittelhausbergen, rue commerçante du sud de Cronenbourg. © Myriam Mannhart

Le 9 octobre 2019, l'Eurométropole de Strasbourg, l'État et l'Agence nationale pour la rénovation urbaine ont signé une convention pour la mise en œuvre du Nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU). Cronenbourg est l'un des sept quartiers qui bénéficie du nouveau dispositif. Il vise à améliorer l'égalité sociale et urbaine des quartiers en difficulté en promouvant le développement économique et l'emploi, la cohésion sociale et l'amélioration du cadre de vie. Une concertation citoyenne a déterminé des pistes de travail, parmi lesquelles la volonté de maintenir les commerces de proximité existants et inciter de nouveaux commerces à s’implanter. Ce NPNRU vise "à améliorer les surfaces commerçantes déjà existantes, qui correspondent aux besoins de la population", résume Lucie Rigourd, chargée de mission commerce et développement local auprès de l'Eurométropole de Strasbourg.

L’écoquartier, achevé en 2018 et construit sur le terrain de l’ancienne brasserie Kronenbourg, peut favoriser ces plans. Ces nouveaux logements ont attiré une population plus jeune, aux besoins différents de ceux des vieux Cronenbourgeois. "Avant, Cronenbourg était un quartier dortoir, très ouvrier, raconte Fanny, 37 ans, habitante de l'éco-quartier. Maintenant, il y a des jeunes partout et les classes moyennes se sont installées. J'espère que ce sera le nouveau Neudorf", quartier de Strasbourg très prisé des classes moyennes. "Nous sommes dans une dynamique de rajeunissement et de modernisation. Il y a besoin d'un quartier qui vit, avec des écoles, des commerces pour satisfaire cette nouvelle clientèle jeune et familiale", explique Cécile Cansell, gérante de Magpresse Tabac du Centre, situé route de Mittelhausbergen. "C’est un quartier urbain qui se développe de manière positive, partage Julien Heuber, gérant du magasin de fleurs Heuber et compagnie, route de Mittelhausbergen. Depuis plusieurs années, on observe de beaux changements. Il y a de nouveaux commerces, une nouvelle population."

Le bio se fait une place 

Le quartier compte 134 commerces, dont les deux-tiers situés au sud, dans le Vieux-Cronenbourg. Deux nouveaux commerces ont ouvert ces deux dernières années, attirés par la nouvelle population de l'écoquartier. C'est le cas de l'épicerie Bee Vrac, une boutique qui propose des produits en vrac, ouverte en avril 2018. "Il y avait une vraie demande dans le quartier Saint-Florent avec l'implantation de l'éco-quartier et la mise en place du compost à Rotonde", explique la gérante de la boutique Marion Haenggi. Chaque mois, les locaux de Bee Vrac accueillent des ateliers animés par l'association Zéro déchet. Un supermarché bio Côté nature s'est également installé dans la zone du Marché-Gare. Dans le Vieux-Cronenbourg, une micro-crèche d'inspiration Montessori et le café familial Au Bonnet d'âne ont ouvert récemment. “Il y a une forte volonté de revenir aux commerces de proximité et d'avoir moins de grandes chaînes", estime Marion Haenggi. 

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La gérante du Magpress Tabac du Centre, Cécile Cansell, espère que la modernisation du quartier attirera un public plus jeune. © Eva Moysan

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Tania Dos Santos, gérante du salon de coiffure Vagues et Coiffures, constate qu'il y a une diminution du nombre de commerces dans le quartier. © Eva Moysan 

Malgré ces quelques implantations récentes, l'offre de commerces évolue lentement. La majorité des boutiques du Vieux-Cronenbourg y sont installées depuis plus d'une quinzaine d'années. Elles font face aux évolutions du quartier et au changement progressif de la clientèle. "Ce n'est pas facile de trouver de nouveaux clients ; ma clientèle vieillit. Mon chiffre d'affaires a baissé. Depuis vingt ans, il y a un véritable déclin. Avant on avait des magasins de vêtements, des bouchers, un poissonnier", décrit Tania Dos Santos, qui gère depuis vingt-sept ans le salon de coiffure Vagues et couleurs, route de Mittelhausbergen. La construction du nouvel écoquartier n’a pas apporté à Tania la clientèle qu’elle espérait : "Ce sont surtout des jeunes qui s'installent. Ils ne vont pas dans ce genre de salon de coiffure. Soit ils ont les moyens et fréquentent des endroits plus haut de gamme, soit ils se coupent les cheveux eux-mêmes."

"On se bouge, on se remet en question"

Pour séduire cette nouvelle clientèle, Tania considère qu'il faudrait changer la manière de travailler et utiliser des produits végétaux. a attirerait peut-être plus de monde. Mais au niveau du travail, ça ne donne pas les résultats des produits chimiques et c’est beaucoup plus cher." La coiffeuse regrette également que le déclin de son chiffre d’affaires ne lui permette pas de rebondir et d’améliorer ses prestations. "Dans les petits salons comme le mien, il n’y a plus beaucoup d'argent, donc pas moyen d'investir dans le marketing ou la publicité." Malgré sa bonne humeur, Tania Dos Santos semble dépassée par la situation : "J'ai 53 ans, c'est sûr que je ne suis plus motivée comme quand j'en avais 25. Si je savais quoi faire, je changerai de métier."

Ce n'est pas le cas d'autres commerçants qui cherchent à attirer davantage de clients. "On se bouge, on se remet en question. La concurrence nous stimule", déclare de son côté Michèle Olland, la gérante de la boulangerie éponyme, dont “la carte change tous les jours”. Au sein du Magpresse Tabac du Centre, des travaux sont en cours pour installer un bar, ce qui permettra de diversifier son activité et d'attirer un nouveau public. "On a de moins en moins de retraités - qui lisaient beaucoup - donc le secteur de la presse est touché, confie la propriétaire Cécile Cansell. La hausse du prix des cigarettes a entraîné une fuite de la clientèle vers l'Allemagne. Même les jeux à gratter et les paris sportifs sont en baisse face à la concurrence d'Internet."

Les grandes surfaces aussi doivent s'adapter, comme Carrefour City, installé depuis cinq ans route de Mittelhausbergen. Depuis l'arrivée de l'épicerie Bee Vrac à proximité, la supérette propose également des produits en vrac. Des nouveaux services sont disponibles, comme le Relais colis ou la livraison à domicile. En cinq ans, le nombre d'employés de la supérette est passé de cinq à treize personnes.

 

Cyrielle Thevenin et Alix Woesteland

 

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