Plus de 800 personnes se sont installées à la Rotonde, un ensemble immobilier neuf prévu pour favoriser la mixité sociale.
La Rotonde constitue la nouvelle porte d’entrée Est dans le quartier de Cronenbourg. Lancé en 2012 et porté par le promoteur Demathieu Bard, le projet ambitionnait de créer un espace de mixité sociale aux abords du Vieux-Cronenbourg. La recette : construire dans un espace commun des immeubles pour des publics aux profils sociaux variés.
Achevés en 2018, quatre bâtiments s’alignent côte-à-côte sur un espace de 23 000 m². Bordé par les routes d’Oberhausbergen et Mittelhausbergen, chaque immeuble a ses spécificités. On y trouve des logements privés, sociaux, quelques commerces, un hôtel, ou encore une résidence séniors. Au total, près de 800 habitants vivent à la Rotonde depuis 2018.
Proche du centre-ville...
Les appartements ont rapidement trouvé preneurs. Un succès en partie dû à la situation géographique du quartier. La Rotonde se situe à la jonction entre le centre-ville et Cronenbourg. Elle dispose d’un arrêt de tram et de pistes cyclables permettant aux habitants de se rendre aux Halles ou à la gare en quelques minutes. Pour Serge Oehler, adjoint au maire de Strasbourg, “le projet est un trait d’union entre l’hypercentre et Cronenbourg”.
Le complexe est aussi attractif financièrement. Selon David Bour, maître d’ouvrage du deuxième bâtiment, les logements privés se sont vendus à moins de 3300 euros le m², alors qu’il faut compter plus de 5000 euros le m² dans le centre-ville. Du côté des logements sociaux, les loyers sont également alléchants. Ainsi, Arnaud Vidal qui résidait auparavant Grand’Rue explique “payer désormais seulement 20 euros de plus mais pour 20 m² de plus”.
Le complexe présente une silhouette particulière. Pour l’architecte Olivier Calvarese, “l’idée était de rompre avec l’échelle des immeubles collectifs habituels”, en donnant aux façades des premiers étages des aspects de maisons. Les habitations “ressemblent plus à des maisons aux colorations typiques de l’Alsace.”
Encerclée par des barrières métalliques, la Rotonde ressemble à un petit village fortifié à l’entrée de Cronenbourg. “C’est pour éviter que des gens viennent squatter dans des parties privées” explique David Bour. Selon Yusuf Demirel, résidant en colocation, “La Rotonde, c’est un quartier à part entière.”
Aux yeux des habitants, la Rotonde a des airs d’extension du centre-ville. Pour Anne Collet et sa famille, qui ont quitté le quartier de la gare afin d’accéder à la propriété, “on a encore l’impression d’être dans le centre-ville”. Ses enfants prennent le tram pour aller à l’école dans le centre, son fils aîné poursuit ses entraînements de football au Wacken, et son mari doit transiter par la gare centrale pour se rendre en train sur son lieu de travail à l’extérieur de Strasbourg.
... loin du Vieux-Cronenbourg
Pour faire leurs courses, la plupart des habitants prennent le tram ou pédalent dix minutes jusqu’aux Halles. Certains se rendent au Auchan ou au Lidl de Hautepierre et se détournent des commerces de proximité du Vieux-Cronenbourg. Même s’il ne faut que sept minutes à pied pour rejoindre le Carrefour City de la route de Mittelhausbergen, Fabien Lepera, le gérant du magasin d’alimentation est formel : “Il n’y a pas d’augmentation du chiffre d’affaires depuis la construction du quartier de la Rotonde.” Pour Eric Duterque, propriétaire d’un appartement depuis le printemps 2018, “l’emplacement de la Rotonde ne me pousse pas à traverser la route de Mittelhausbergen pour aller dans le Vieux-Cronenbourg.”
La Rotonde a ainsi un air de cité-dortoir, davantage tournée vers le centre-ville que vers Cronenbourg. D’autant plus que les habitants ont du mal à nouer des liens avec leurs voisins et le quartier. Arnaud Vidal, habitant d’un logement social, le regrette. Malgré la présence de quelques bars, “il n’y a pas vraiment de bistrot, ça manque de vie.” Conséquence : il ne se rend dans le Vieux-Cronenbourg que trois à quatre fois par an. Pour lui, “il n’y a pas de mixité sociale. Ça c’est sur le papier. Les cultures différentes ne se rencontrent pas.”
Les trams A et D permettent aux habitants de la Rotonde de rejoindre la gare centrale en un arrêt. © Juliette Jonas
La toiture des nouveaux immeubles s'inspire des habitations situées au nord de la station de tram. © Juliette Jonas
Mécontent de son logement social, Arnaud Vidal espère le quitter bientôt. © Juliette Jonas
© Juliette Jonas et Jeanne de Butler
Juliette Jonas et Jeanne de Butler