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À Cronenbourg, les abstentionnistes sont nombreux. A quelques jours du premier tour des municipales, les colistiers de la liste Egalité active tentent de convaincre les jeunes de voter, jusque dans les halls des cités HLM.

« On n'a pas d'autre lieu pour se réunir », explique un jeune du quartier de Cronenbourg qui passe ses soirées dans les cages d'escalier. Photo Maxime Arnoult 

Tous les jours, après leur travail, Sahide Kadri, Ilizett Desousa - dite « Lili » - et Ali Martin Lamri, partent à la rencontre des jeunes abstentionnistes dans les cages d’escalier. « Il faut aller les chercher là où ils sont », développe Ali Martin Lamri. Après trois semaines de campagne dans les Quartiers Prioritaires de la Ville (QPV), cet éducateur pour les enfants en situation de handicap a gagné le surnom de « Ali voter ». 

Lui est colistier d'Égalité active, une liste citoyenne menée par le candidat Patrick Arbogast (SE). Ce dernier, chef d’entreprise, a lancé sa campagne il y a six mois, pour porter la voix des « quartiers ». « Au départ c’était pour interpeller les autres candidats sur l’abstention et puis je me suis dit, pourquoi pas nous ? », explique-t-il. 

Depuis, Patrick Arbogast a déposé sa liste et élaboré un programme plus global, en mettant l’accent sur la lutte contre la précarité et la participation des citoyens. « On a plus de crédibilité que les autres candidats, les colistiers sont implantés dans les quartiers et ne se sont jamais engagés en politique », avance-t-il.  Des propositions proches de celles de Chantal Cutajar et sa liste citoyenne. 

Tracter dans les cages d’escalier

Ce mardi soir, vêtus de leur veste violette - un rappel aux couleurs de la liste - les trois colistiers tentent de convaincre les habitants des cités HLM de Cronenbourg de voter - de préférence pour leur liste. Dans la cage d’escalier délabrée, Younès adhère. Agé de 28 ans, il est sans emploi : «  Il nous faut de la formation, des jobs d’été. Une fois qu’on a un pied dans le travail, on peut y rester ». Lui voit les politiques comme « des voleurs ».

Sahide Kadri, habitant du quartier du Neuhof, ne veut pas faire de promesses à ce futur électeur. « Si on est élu, on ne changera pas le monde mais on pourra t’aiguiller, t’aider » , glisse-t-il. Younès n’a « jamais pensé » à participer à un scrutin mais, ce dimanche 15 mars, il se rendra dans son bureau de vote, affirme le jeune homme. « Ils nous ressemblent, ils savent ce qu’on vit, alors je vais voter pour eux »

« Je vais voter pour la première fois »

Sahide, « Lili » et Ali se sont engagés pour la première fois en politique pour ces élections municipales. « J’ai rejoint Egalité active parce qu’il n’y avait aucun homme politique sur cette liste », témoigne Sahide Kadri. Ali Martin Lamri, lui, a voulu créer sa propre liste contre « l’exclusion démocratique », mais, faute de soutien, il a rejoint Patrick Arbogast. Déçus par les précédents élus, ces novices sont déterminés et tractent jusque tard dans la soirée. 

Mais leurs discours ne font pas l’unanimité. « Il a vécu comme vous Patrick, il est de Hautepierre et il n’y a que des gens du quartier sur notre liste », lance Sahide Kadri à quatre amis adossés au mur d’un hall.

Pas convaincu, l’un d’entre eux lui répond :  « Non, il n’a pas vécu comme nous, il n’est jamais venu nous voir. Je n’irai pas voter pour Patrick Arbogast. »

Si l'abstention a augmenté de manière générale à Strasbourg entre 2008 et 2014, c'est dans les quartiers dits prioritaires (QPV) qu'elle est la plus visible. Le quartier de Hautepierre est celui où l'absention a été la plus forte en 2014 avec 58,5% de personnes qui ne se sont pas déplacées dans les bureaux de vote, lors du second tour. En 2008, elle s'élevait déjà à 50,5%, ce qui représente tout de même une nette augmentation. 

« Lili », elle, est coiffeuse. Elle a vu grandir ces jeunes. Certains sont pris dans un trafic de drogue mais elle entend les valoriser. « Rien que le fait de venir les voir et s’intéresser à eux, leur montrer qu’ils ont un pouvoir, c’est important », explique-t-elle. Dans la pénombre de la cage d’escalier, elle prend le temps d’indiquer le bureau de vote à Rémy*, tout juste majeur. « Moi je vais voter pour la première fois, pour eux, parce qu’ils vont faire quelque chose pour nous », livre-t-il. 

Peu importe le résultat, les colistiers considèrent qu’ils ont « déjà gagné ». Le mouvement citoyen créé par Patrick Arbogast compte bien poursuivre ses actions et se présenter aux élections départementales l’année prochaine. 

* Le prénom a été modifié
 

Maxime Arnoult

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