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Daniel Cohn-Bendit, le retour


28 décembre 2008

2009, année décisive

Dix ans après sa dernière campagne dans l’Hexagone, il revient sur la scène politique française. Après avoir été élu sur une liste verte allemande aux européennes de 2004, l’eurodéputé prend la tête d’Europe Ecologie, un mouvement rassemblant les écologistes français pour les élections européennes. Fédérateur ou dynamiteur, quel est réellement son rôle ?

Il a l’habitude des bons mots. Dès le lancement d’Europe Ecologie, le 20 octobre dernier à Paris, Daniel Cohn-Bendit promet «des larmes et des pleurs» aux verts français. Il prône alors un «nouvel espace politique ouvert et indépendant». Traduction: les places seront chères car il n’y aura pas de liste des Verts français lors de la prochaine campagne européenne. En tout cas pas à proprement parler. En effet, les Verts français ne sont qu’une des composantes du mouvement initié après l’élection présidentielle de 2007 par des proches de Nicolas Hulot et certains cadres du parti vert. Le rassemblement est hétéroclite, ouvert aux associatifs, de Hulot à Bové, en passant par des partis comme le MEI d’Antoine Waechter et les Verts.
Daniel Cohn-Bendit est une icône européenne et son expérience lui donne une légitimité. Pour autant, il n’a pas la main-mise sur les nominations. Il fait partie d’un trio exécutif chargé de présenter des candidats au comité de campagne en compagnie de Cécile Duflot, la secrétaire générale des Verts et Pascal Durand, bras droit de Nicolas Hulot. «Dany voulait nommer Eva Joly dans l’Ouest, nous avons simplement refusé, il n’impose pas ses choix», confirme l’eurodéputé vert français Alain Lipietz.

Oublier la déroute de Voynet en 2007

Selon lui, Daniel Cohn-Bendit est un «catalyseur». Il rassemble une liste de politiques et d’associatifs. C’est un chef qui ne dérange pas. «Paradoxalement, il ne fait d’ombre à personne, explique l’eurodéputé vert français qui prendra sa retraite cette année. Il n’est présent sur la scène politique française qu’au moment des campagnes européennes où il est tête de liste ... C’est-à-dire six mois tous les dix ans.» Un allié utile pour éviter les conflits de personnalité, et ménager les jalousies. «Supposez qu’il y ait eu une bataille pour la tête de liste en Ile-de-France, comme par exemple un duel Voynet/Cochet, ça se serait passé moins bien qu’avec Dany.» Pas de bataille en effet avec Daniel Cohn-Bendit, que personne ne soupçonne d’utiliser les élections européennes pour briguer un mandat national.
Mieux, les Verts comptent bien se servir de l’image de l’ex-soixante-huitard pour se relancer en France. Ces élections sont l’occasion de se remettre en selle après la déroute de Dominique Voynet à la présidentielle de 2007 (1,57% des suffrages exprimés, soit le plus mauvais score depuis la création du parti, en 1984). «Lors de l’assemblée générale de Lille, début décembre, la majorité à la tête du parti a été très claire : Europe Ecologie doit servir à faire un bon score pour lancer une dynamique pour 2012», explique Marie Anne Isler Béguin.
«Je ne sais pas si c’est bassement électoral mais ce qui est sûr c’est que les Verts français doivent rebondir s’ils veulent peser, même dans la perspective des régionales avant les élections présidentielles, déclare Daniel Cohn-Bendit. Ils doivent retrouver des couleurs avec les européennes, c’est vital pour l’écologie politique.»

Quelles perspectives après les européennes ?

Le rassemblement se poursuivra t-il après les élections européennes? La question était déjà au cœur des débats lors de l’assemblée générale des Verts à Lille début décembre. Certains craignaient qu’une trop grande ouverture ne débouche par exemple sur un rapprochement avec le Modem. La peur de revenir au «ni droite, ni gauche», à l’origine de la division des Verts en 1993 était dans tous les esprits. Cécile Duflot, après sa réélection à la tête du parti, a mis les choses au point : le mouvement doit permettre aux Verts de participer à une véritable alternative pour 2012, tout en réaffirmant leur ancrage à gauche.
En fait, la pérénnité du mouvement dépendra du score obtenu début juin. «Si c’est un fort résultat, ça secouera tout le monde, prévoit Daniel Cohn-Bendit. Si le résultat n’est pas au rendez-vous, je crois qu’on reviendra à la case départ...»

Florent Godard et Gautier Demouveaux, à Bruxelles

 

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