William Bourdon a connu beaucoup de longs procès. Depuis bientôt une dizaine d’années, il porte l’étiquette d’“avocat des lanceurs d’alerte”. Il a notamment défendu Olivier Thérondel et Philippe Pichon, commandant de police qui avait souligné l'aspect illégal du Systéme de traitement des infractions constatées (Stic). Il a aussi publié, en février dernier, “Petit manuel de désobéissance citoyenne”. Il défend, comme Transparency International, l’idée qu’il faudrait mettre en place une autorité administrative indépendante. “Elle aurait vocation à accueillir les alertes, à les filtrer, les traiter et, le cas échéant, à saisir le procureur de la République, détaille-t-il. Pour le moment, on demande aux lanceurs d’alerte de se tourner vers leur hiérarchie en premier lieu, ça revient à se jeter dans la gueule du loup.” L’intérêt d’une telle autorité serait aussi de détecter les lanceurs d’alerte de mauvaise foi et, si nécessaire, saisir la justice pour les voir sanctionnés.
1,2 milliard d’euros rapatriés
Hervé Falciani a lui aussi été défendu par Me Bourdon quand, en 2008, il a été poursuivi par la Suisse pour violation du secret bancaire. Alors employé par la filiale helvétique de la banque HSBC, l’informaticien s’est procuré un énorme listing d’évadés fiscaux, qu’il a fourni par la suite à l’administration fiscale française. S’il est sous le coup d’un mandat d’arrêt international pour violation du secret bancaire, Hervé Falciani considère qu’il a eu de la chance, parce qu’il a pris le temps de s’organiser. “La décision de passer à l'acte chez moi s'est faite sur des années, le temps de réfléchir à la façon dont j’allais m’y prendre, explique-t-il. Il a fallu qu'on en discute avec mon épouse et qu'on se prépare mutuellement à ce que, un jour, la police vienne et qu'on soit dans l’obligation de fuir la Suisse précipitamment.”
“Je me demandais si j’étais inadaptée, si je devais continuer à vivre…” Nicole Marie Meyer évoque difficilement l’époque où, en 2004, elle a découvert de graves dysfonctionnements alors qu’elle occupait un poste de diplomate. Agent contractuel, elle a toujours eu une “très haute idée de la France”, alors quand elle se tourne vers sa hiérarchie pour dénoncer ces abus de biens sociaux, faux et usage de faux, elle ne pense pas un instant que ce geste mettra fin à 15 ans de carrière dans la fonction publique.
Nul besoin d’aller chercher outre-Atlantique, du côté de Bradley Manning ou d’Edward Snowden, pour trouver des lanceurs d’alerte dont la vie a été bouleversée. Ils sont plusieurs dizaines en France à avoir vécu le stress et les pressions parce que, un jour, ils ont voulu dénoncer un conflit d’intérêts, un crime ou un délit dont ils avaient eu connaissance dans leur emploi.
Violation du secret professionnel
S’il n’avait pas créé un blog Mediapart et publié un article dans la foulée, le 22 avril 2013, Olivier Thérondel serait peut-être aujourd’hui encore un agent de Tracfin, la cellule anti-blanchiment de Bercy. Trois jours après que Jérôme Cahuzac a avoué avoir détenu un compte à l'étranger, Tracfin reçoit la preuve que l’ancien ministre cherche à faire rapatrier 685.000 euros de Singapour en plusieurs virements. Le lendemain, Olivier Thérondel s'aperçoit que le dossier a été anonymisé pour éviter les fuites. "Depuis 2009, ce régime spécial pour les personnes célèbres permet d’effacer les informations personnelles en les remplaçant par un numéro", explique-t-il. Pour lui, rendre illisible un tel dossier, à la une des journaux depuis plusieurs mois, n'a aucun sens. Pire, il cache quelque chose de louche. Il décide alors de révéler l’histoire sur son blog.
En fait, ses révélations n’ont rien d’incroyable. Le juge Van Ruymbeke, en charge de l’affaire, avait d’ailleurs accès à toutes ces informations. La direction de Tracfin dépose tout de même plainte pour violation du secret professionnel. Le 5 septembre 2013, Olivier Thérondel est mis à pied, et renvoyé à son service d’origine, les douanes. Aujourd’hui, il attend le délibéré de l’audience qui s’est déroulé le 21 mars dernier. Le procureur a requis trois mois de prison avec sursis et 1.000 euros d’amende. Une condamnation lui ferait perdre son emploi actuel, les douanes exigeant de leurs employés qu’ils aient un casier judiciaire vierge.
“David contre Goliath”
S’il n’a pas beaucoup d’espoir, Olivier Thérondel voudrait bénéficier de la récente loi du 6 décembre 2013 qui protège les lanceurs d’alerte de toutes formes de représailles (licenciement, reclassement, sanctions, harcèlement, etc.). Il faut dire que la loi demande aux juges d’évaluer la bonne foi du lanceur d’alerte et la véracité des faits dénoncés. Olivier Thérondel, sur ce dernier point, a du mal à apporter des preuves.
En 2004, quand Nicole Marie Meyer a dénoncé les dysfonctionnements au quai d’Orsay, aucune loi ne protégeait les lanceurs d’alerte. Pourtant, en 2007, elle remporte son procès au tribunal administratif de Paris. Les nombreux documents qu’elle fournit à la justice lui permettent de prouver qu’il s’agissait bien d’un abus de pouvoir.
Les conséquences peuvent être désastreuses pour les employés ne s’attendant pas à de telles pressions. “C’est David contre Goliath, raconte Olivier Thérondel. En plus du procès, Tracfin a engagé des poursuites disciplinaires auprès de la douane. Le but, c’est de me couler, que je ne me relève pas.” Depuis plusieurs mois, il est sous anxiolytiques. Avant cette affaire, lui et sa compagne, une architecte, projetaient de devenir parents. Aujourd’hui, ils sont en pleine séparation.
“On est seule à mourir dans ces moments-là”
Nicole Marie Meyer évoque elle-même une traversée du désert, de plusieurs années. “D’un coup, je ne reconnaissais plus rien, se souvient-elle. C’était catastrophique au plan personnel, le monde devenait incompréhensible.” Elle essuie les critiques de ses collègues, ne comprend pas pourquoi, au sein même de son service, il existe un tel manque de soutien. “On est seule à mourir dans ces moments-là, confie l'ancienne fonctionnaire. Parce qu’on pense que, peut-être, on a eu tort, on se pose des questions. C’était un dossier de corruption ordinaire, cette réaction me paraissait invraisemblable. En sortant de là, je me suis dit que, au coeur de l’Etat, on encourageait la lâcheté.”
De cet isolement, Nicole Marie Meyer en est sortie en intégrant Transparency International, une ONG anti-corruption. “Quand vous pensez que ce qui vous est arrivé a pu arriver à d’autres, vous savez qu’il faut faire quelque chose. Pour le moment, les législations protectrices donnent juste le droit de réintégrer son emploi, en cas de licenciement par exemple. C’est bien, mais pendant 5 à 10 ans, le lanceur d’alerte sera passé par plusieurs phases, dont l’isolement ou la dépression. Et la longueur des procès ajoute un poids supplémentaire.”
En rendant publiques des activités mettant en cause leurs hiérarchies, les lanceurs d'alerte doivent parfois faire face à de nombreuses pressions. Certains sacrifient leurs vies personnelle et professionnelle pour dénoncer des faits qu'ils considèrent contraires à l'intérêt commun. La législation française cherche à mieux les protéger.
Les amateurs du genre traditionnel - « et donc masculins », précise David Courbet - le savent bien : ce qui compte pour faire un bon porno, c'est le respect d'une mise en scène : « Baisers, fellation, cunnilingus, pénétrations (2 ou 3 positions), sodomie et, pour conclure, éjaculation, souvent faciale ». Tout au long de la scène, la femme est alors relayée au rang d'objet « que l'homme prend dans tous les sens. Son plaisir à elle n'entre absolument pas dans l'équation », analyse l'auteur. Et si certaines se satisfont des productions déjà existantes, d’autres, mais également certains hommes n’y trouvant pas leur compte, souhaitent découvrir quelque chose de différent, de nouveau. « Tout comme il existe une multiplicité des fantasmes, des productions alternatives essayent de répondre à cette demande en mettant davantage en exergue le désir féminin. La femme ne devient plus passive mais au contraire, est à l’origine de la scène de sexe », explique David Courbet.
Le problème avec les mouvement alternatifs, c'est qu'ils « finissent par être dévorés par la grande industrie », selon le journaliste. Pour preuve, un sondage en 2012 mené par l'Ifop, sur commande du géant de l'industrie du porno qu'est le site dorcel.com. Les chiffres sont éloquents : « Les Françaises souhaitent voir évoluer un genre cinématographique qui souffre encore, à leurs yeux, d’un manque de professionnalisme (79%) et d’une vision de la sexualité reflétant des fantasmes trop masculins (71%) et des pratiques très éloignées de la réalité (79%). » Il n'en faudra pas plus pour que Marc Dorcel lance dans la foulée sa déclinaison féminine, dorcelle.com.
Du côté de la boîte de production, on se félicite d'avoir su « saisir l'opportunité en plein vol », d'après les propres termes du directeur général, Gregory Dorcel. « Il y a encore une dizaine d'années, les femmes ne constituaient que 30% de notre public, aujourd'hui, on dépasse les 50% », assure-t-il. Pour ce qui est des chiffres engrangés par cette activité, silence radio. Et David Courbet de conclure : « C'est le jeu. Même si ce site ne correspond pas aux revendications du porno féminin, ça montre que les choses sont quand même en train d'évoluer et tendent vers une amélioration de l'image de la femme. »
Olivier Mougeot
Politique et récupération commerciale
Initié depuis les années 80 aux États-Unis et apparu il y a une vingtaine d'années en France, ce mouvement de « libération de la femme » est communément appelé "porno féminin". Contrairement à un autre courant féminin totalement abolitionniste à l'égard de la pornographie, il est porté par des figures du X : d'anciennes actrices reconverties aujourd'hui en réalisatrices. La plus connue d'entre-elles est sans nul doute Ovidie dont le dernier film, sobrement intitulé Pulsions, a été diffusé sur Canal + le 5 avril.
La logique de ce genre, c'est encore elle qui l'explique le mieux sur son blog : « Le porno féministe ne se contente pas de vouloir plaire à un public féminin. Il est aussi chargé de revendications, et souhaitent déconstruire les stéréotypes. » Et de qualifier son travail de « politique ». « Après tout, les femmes aussi ont droit à leur porno, à voir leurs fantasmes incarnés à l'écran ! »
Autre idée reçue contre laquelle s'insurgent les spécialistes du genre : non, le porno féminin n'est pas forcément doux. « Il va du film romantique au film franchement hard, voire SM. Ce n'est pas le contenu qui change mais la façon de mettre en scène. Les jeux de lumière, la qualité des dialogues, la fin des gros plans sur les pénétrations, l'abandon de l'éjaculation triomphante, la caméra qui continue de filmer après que l'acte sexuel en lui-même soit fini, etc. sont autant d'éléments qui caractérisent le genre », poursuit David Courbet.
Source : sondage Ifop "Porno : ce que veulent
les femmes" / Crédit : O.M.