12 mars 2021
Dans un rapport adopté mercredi 10 mars, le Parlement européen plaide pour que les entreprises écoulant leurs produits en Europe respectent davantage l’environnement et les droits humains. Les eurodéputés demandent à la Commission de légiférer rapidement sur le sujet.
« Faire des affaires au XXIème siècle oblige à agir de façon responsable », estime Lara Wolters. L' eurodéputée néerlandaise (S&D - sociaux-démocrates) est à l’origine du rapport sur le devoir de vigilance et la responsabilités des entreprises adopté mercredi 10 mars par le Parlement européen. « Travail forcé des Ouïghours en Chine, dégâts causés aux récifs du Curaçao, ouvriers morts sur le chantier de la Coupe du monde au Qatar. À chaque fois, des entreprises européennes sont impliquées et ont causé des dommages à travers leur activité », déplore-t-elle.
Les eurodéputés souhaitent que l’Union européenne se dote d’outils plus efficaces pour contraindre les entreprises commercialisant leurs marchandises sur le continent à cesser leurs atteintes à l’environnement et aux droits humains. Ils veulent les obliger à contrôler scrupuleusement ce qui se passe sur l’ensemble de leur chaîne de production, y compris dans des pays tiers.
Pour Sabine Gagnier, chargée de plaidoyer à Amnesty International France, « les entreprises devraient être capables de cartographier précisément les risques sur leur chaîne d’approvisionnement pour se prévaloir d’atteintes aux droits humains ». En cas de manquements à leurs obligations, des sanctions devraient pouvoir s’appliquer. Jusqu’à présent, aucun texte n’existe à l’échelle européenne sur le devoir de vigilance. Seule la France s’est dotée d’une législation en la matière en 2017.
Trois types d’entreprises sont ciblés par le Parlement : les multinationales, les PME cotées en bourse et celles évoluant sur un secteur considéré à haut risques comme le secteur minier.
« Un texte ambitieux »
Pour l'eurodéputée française Manon Aubry, (GUE/NGL – gauche radicale) la prise de position du Parlement constitue « une petite révolution car avant les entreprises se dédouanaient de toute responsabilité ». Elle poursuit: « ce rapport visera à mettre un terme à l’impunité des multinationales avec l’objectif de les sanctionner en cas de mauvaises pratiques. Malgré la mobilisation des lobbys, ce texte reste ambitieux ».
Si un large consensus a pu être trouvé, certains députés ont insisté sur la nécessité de ne pas faire porter de trop lourdes contraintes sur les entreprises. « Pour éviter une bureaucratie inutile, les entreprises, en particulier les PME ne peuvent et ne doivent pas avoir à retracer chacun de leurs éventuels milliers de fournisseurs », avance l'eurodéputé allemand Axel Voss (PPE – centre droit).
Didier Reynders, le commissaire européen à la Justice a assuré avoir entendu l’appel du Parlement : « la Commission fera son devoir. Notre objectif est d’engendrer une économie européenne juste et équitable. Il est important que nous respections nos valeurs dans et en dehors de l’Union européenne », a-t-il annoncé. La proposition de la Commission européenne pour responsabiliser les entreprises devra être publiée d’ici l’été 2021.
Alexis Cécilia-Joseph