Débutée il y a un mois et demi, la mesure de gratuité de la contraception masculine pour les moins de 26 ans a rencontré son public. À Strasbourg, les pharmacies suivent la tendance nationale.
Les préservatifs de la maque Eden sont distribués gratuitement en France, depuis le 1er janvier 2023.
Un succès. Un mois et demi après son entrée en vigueur le 1er janvier 2023, la gratuité des préservatifs pour les moins de 26 ans a provoqué une hausse significative de leur consommation, à l’échelle nationale. Les premiers résultats annoncés la semaine dernière, sur Twitter, par le ministre de la Santé, François Braun, l’attestent : « En janvier, 2 millions de préservatifs ont été remboursés par l’Assurance maladie. »
C’est quatre fois plus que l’an dernier, à la même période. Après le pic de janvier, consécutif à un effet d’annonce, une baisse progressive sera-t-elle enregistrée les prochains mois ? S’il faut encore patienter pour obtenir des chiffres représentatifs de la mesure, à Strasbourg, les pharmacies situées sur le campus de l’université partagent pour l’instant toutes le même constat : de plus en plus de jeunes poussent les portes des officines.
Des ventes multipliées par trois
Derrière le comptoir de la Pharmacie des Alpes, rue de Lausanne, Anaïs et ses collègues ont plus que doublé leurs ventes. « Nous avons écoulé 32 boites de préservatifs depuis le début d’année. Habituellement, on tourne autour d’une quinzaine. C’est significatif. » À tel point que les conditionnements de douze pièces sont en rupture de stock chez le fournisseur Eden, l’une des deux marques, avec Sortez couverts !, qui permet un remboursement à 100% sur présentation de la carte vitale. Pour la préparatrice en pharmacie, la mesure a incité les plus réticents à s’adresser aux professionnels de santé. « Il pouvait encore exister une forme de timidité ou de honte à venir acheter des préservatifs. La gratuité rend la démarche plus populaire. L’aspect économique n’est pas négligeable, notamment pour les étudiants qui n’ont pas toujours les moyens. »
Sylvie, elle, reçoit chaque jour une dizaine de clients éligibles au dispositif, à la Pharmacie de l’Ange. Des étudiants, mais aussi des lycéens, auprès de qui l’information a très vite circulé. « Les mineurs représentent une proportion importante des demandes. Ils bénéficient de l’anonymat lié à leur âge. C’est très important pour eux. » Une cible d’autant plus importante à toucher que 15 % des nouveaux cas de séropositivité ont concerné les moins de 25 ans, en 2021, selon les données de Santé Publique France.
Un coup de projecteur bienvenu
Située dans le quartier le plus étudiant de la métropole strasbourgeoise, la Pharmacie de l’Esplanade est au coeur des problématiques de santé des plus jeunes. Leïla, une des préparatrices, se réjouit de la fréquentation des officines de la ville. « Nous avons une situation géographique stratégique pour constater une tendance, et elle est sans aucun doute à la hausse. » Pour Anaïs, sa consoeur, la gratuité des préservatifs est à mettre en parallèle avec un autre traitement pris en charge à 100% et sans critère d’âge, depuis le 1er janvier 2023 : la pilule du lendemain. « Certains adolescents ou jeunes adultes oublient que les préservatifs ne sont pas de simples contraceptifs. Ils ont l’impression d’être protégés car la contraception d’urgence existe. J’espère que cette mesure permettra de remettre un coup de projecteur sur les conséquences des infections sexuellement transmissibles. »
Dans les allées du campus, comment cette mesure est-elle accueillie par les principaux intéressés ? À deux pas de la faculté de droit, Tom et ses amis sont enthousiastes. « Franchement, tant qu’on peut en profiter gratuitement, on prend », souligne le jeune homme. Ce matin-là, sur vingt étudiants interrogés, seize avaient entendu parler de la gratuité des préservatifs. Parmi eux, la moitié s’en étaient procuré depuis le 1er janvier. Les autres, eux, se disent prêts à franchir le pas. « J’y vais tout de suite, c’est la Saint-Valentin aujourd’hui ! »
Luca Salvatore
Édité par Camille Aguilé