À trois jours de la fête des amoureux, le love store Les (Dé)boutonné•e•s, rue du Marché, voit ses ventes augmenter et la demande se diversifier.
Salomé se prépare pour sa plus grosse journée en un an et demi de magasin, samedi 12 février, à deux jours de la Saint-Valentin. © Grégoire Cherubini
C’est comme un bouquet de fleurs : quelques roses, des violettes et lilas… De toutes les couleurs et de toutes les tailles. À quelques jours de la Saint-Valentin, les étagères du love store strasbourgeois (Dé)boutonné-e-s sont pleines de sextoys.
Sûrement sensibles à la météo humide, ils poussent tels des champignons aux quatre coins de la boutique. « On est débordées ! Je ne pensais pas qu’autant de monde fêtait la Saint-Valentin », s’étonne Salomé, vendeuse de la boutique depuis l’ouverture en septembre 2020. Elle ouvre des dizaines de cartons remplis de jouets et de livres. Et en prépare des dizaines avec des commandes à distance.
À lire aussi : « Slow dating » : ces célibataires séduits par les agences matrimoniales
Pour sa deuxième Saint-Valentin, la boutique s'attend à une journée record samedi : « En temps normal, on vend pour 1 100 euros lors d’une bonne journée. Samedi dernier, à J-10, c’était environ 3 000 euros ! » La vendeuse de 24 ans voit défiler « beaucoup de jeunes, parfois des couples, certains disent être queer. Mais aussi des personnes plus âgées. » Certains demandent conseil pour offrir et casser la routine. Elle pense que la plupart « ne se posent pas la question de la dimension strictement commerciale de cette fête ».
Cet intérêt croissant pour les sextoys s’inscrit dans une dynamique plus générale de démocratisation du plaisir et de la sexualité. Selon l’Ifop, 49% des Français, hommes comme femmes, ont déjà essayé des sextoys en 2017. Ce nombre plafonnait à 16% en 2009. Le marché mondial, qui pesait déjà 25 milliards de dollars en 2018, ne cesse de croître selon l’institut Kantar.
En plus des jouets et accessoires érotiques, le love store propose des livres, traitant principalement de féminisme et sexualité. © Grégoire Cherubini
La clientèle s'élargit plus qu’espéré chez (Dé)boutonné-e-s, au point que la gérante, Adèle, envisage d’ouvrir une seconde boutique à Nancy. Mais Salomé regrette leurs difficultés à attirer tous les publics : « Très peu d’hommes hétéros viennent pour leur propre plaisir. L’offre de jouets est moins importante que pour les personnes à vulve et clitoris. Mais il y a surtout un tabou encore plus grand que chez les femmes autour de la sexualité et des jouets. »
Salomé ne la célèbre pas personnellement, mais observe des demandes plus diversifiées qu’auparavant, « même si les dildos restent une valeur sûre ». Elle détaille une impressionnante collection de couleurs et tailles sur les étagères. « Ceux en bois ont du succès, et parmi ceux en silicone liquide, le fluo est sold-out. De plus en plus de personnes se tournent aussi vers le verre. » Elle s’étonne de certains succès : « On vend beaucoup de strings et slips en bonbons. J’imagine que c’est pour rire… ».
Près des deux tiers des acheteurs français (61 %) achètent leurs sextoys sur internet. Comme Marine, 21 ans, qui habite pourtant à cinq mètres de la boutique. Elle avoue « ne pas oser y entrer ». Laetitia, quadragénaire mariée depuis « un petit bout de temps », vend des ustensiles de coiffure en face du love store. Elle pense recevoir un bouquet, mais envisage de traverser la rue pour « pimenter sa relation ». Laetitia trouvera peut-être au fond de la boutique un petit godemichet en forme de rose. Fleur ou sextoy, pourquoi choisir ?
Grégoire Cherubini
Édité par Camille Lowagie et Camille Bluteau