Au Zénith de Strasbourg le 19 février, Paul Kalkbrenner revêt le costume de star de la musique techno. Un statut en inadéquation avec la philiosophie de ce courant musical.
"C'est la tournée du patron !", annonce fièrement la présentation du concert de Paul Kalkbrenner au Zénith de Strasbourg, le vendredi 19 février. La présence du Dj berlinois en Alsace risque de déplacer les foules, tant sa notoriété s'est étendue ces dernières années.
Dans une interview accordée au magazine GQ en juillet, l'artiste espérait "honnêtement (...) avoir contribué" à l'"engouement planétaire" suscité par la musique techno. Certes, "Paul K" a le mérite d'avoir réussi à détruire les murs des clubs de Berlin, haut-lieu de création et d'émancipation de la musique électronique pendant les années 90. Mais s'il se félicite d'avoir ouvert ce genre musical au plus grand nombre, son statut de superstar de la techno ne fait pas du tout l'unanimité chez les puristes. Pour David Lima, président de l'association strasbourgeoise Ephémère, Paul Kalkbrenner "ne fait qu'utiliser des codes déjà connus et propose un produit qui a une logique commerciale".
Revitaliser la techno à Strasbourg
E-tronik- nom de Dj de David Lima-, défend plutôt le côté undrground et alternatif de la techno, en programmant dans les soirées Ephémère "des artistes qui essaient de faire avancer le mouvement". Trois ans après sa création fin 2012, l'association organisatrice de soirées n'a d'éphémère que le nom : "Au début, peu de personnes nous suivaient, confie le Dj strasbourgeois. Aujourd'hui, il y a un vrai public demandeur, et même au-delà de ça, il y a des artistes qui percent, des labels qui naissent, des magasins de disquaires qui se sont ouverts... Tout un écosystème se met en place." Le but, à terme, rendre à Strasbourg sa place dans le monde de la musique électronique française.
Manque d'artistes émergents
Artefact, principale collaboratrice de la Ville pour les musiques actuelles, et programmatrice du concert de vendredi, apparaît aux yeux de David Lima comme "un tourneur, c'est-à-dire une réseau vendant des artistes". "Il n'y a pas de promotion de nouveaux talents et de cultures alternatives nouvelles. Ils prennent ce qui marche, des gros classiques et des blockbusters", estime David Lima. En ce sens, la venue de Paul Kalkbrenner au Zénith, organisée par Artefact, est le reflet d'une programmation où les gros noms tiennent le pavé.
Une recette sûre de son succès, malgré un prix élevé : 40 euros la place. À titre de comparaison, les prix des événements par Ephémère oscillent entre 3 et 15 euros, selon les artistes programmés, pour des soirées fidèles à ce qu'est le format des soirées électroniques, soit cinq ou six heures minimum. L'objectif est de proposer des prestations de qualité, quitte à être déficitaire certaines fois. Malgré cela, David Lima ne désespère pas de voir des projets intéressants voir le jour dans le cadre d'une coopération avec la municipalité : "Un projet va peut-etre se faire en mai avec la Ville", confie-t-il.
Benjamin Hourticq