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Autobus: feu vert des eurodéputés pour l’ouverture du marché


14 février 2019

Jeudi 14 février, un règlement sur l'ouverture à la concurrence du transport en autocars a été adopté par le Parlement européen. Si le texte est validé par les Etats, le marché s’en trouvera profondément transformé.

Effectuer un vol Paris-Marseille via la compagnie irlandaise Ryanair ? Cela est possible. Monter dans un train de la Deutsche Bahn qui relie Londres et Manchester ? Pas de problème. Envisager un trajet Madrid-Barcelone à bord d’un Ouibus ? Pas question. Cette contrainte pourrait être levée après l’adoption d’un règlement sur le transport interurbain, jeudi 14 février, par le Parlement européen. 

Les transporteurs d’autobus européens pourront à l’avenir, comme cela est déjà le cas dans le ferroviaire et l’aérien, proposer leur service en dehors de leur pays d’origine, dans l'ensemble de l’Union européenne. Une proposition dans l’air du temps, selon son rapporteur letton Roberts Zīle (ECR, conservateur). « Nous devons ouvrir le marché à d’autres entreprises et ainsi être dans l’esprit de ce qu’est l’Union européenne », a-t-il plaidé durant les débats.

Jusqu’à présent, la plupart des transporteurs ne peuvent offrir leur service de transport interurbain que dans leur pays d’origine. Si le règlement est adopté par les Etats au Conseil, l’ouverture du marché entraînera plus de choix pour les consommateurs. Ces derniers pourront « profiter d’un service de meilleure qualité et à un prix considérablement plus bas », selon Roberts Zīle. 

Des garanties apportées par le Parlement

Si le projet de réforme a été salué durant les débats parlementaires, des points de crispation perdurent, notamment au sujet de la réglementation du nouveau marché. La crainte étant que les compagnies publiques, déjà en place, ne soient pas en mesure de résister à la concurrence des entreprises commerciales. Le service public deviendrait ainsi cantonné aux lignes non rentables, laissant aux initiatives privées les lignes les plus avantageuses. « Il faut protéger le service public en s’assurant que le système soit bien encadré », explique l’eurodéputée française Christine Revault d’Allonnes-Bonnefoy (S&D, sociaux-démocrates). 

Pour veiller au respect du nouveau règlement, le rapport prévoit la création, dans chaque pays, d’un organisme de contrôle indépendant. « Si le régulateur indépendant estime que le service commercial proposé porte atteinte au service public, celui-ci peut se voir refuser l’autorisation d’opérer la ligne en question », explique Annabelle Huet, chargée de mission aux Affaires européennes pour l’Union des transports publics et ferroviaires (UTP). Les  autorités compétentes seront ensuite chargées de remettre des autorisations d’accès aux transporteurs pour les trajets de moins de 100km, afin de protéger les lignes locales. Le Parlement a exigé que ce dispositif soit étendu pour les itinéraires de plus de 100 kilomètres afin de s’assurer que les transporteurs ne portent pas atteinte aux sociétés publiques existantes. Une mesure qui permet non seulement de sauvegarder le service public mais aussi de protéger les lignes non rentables.

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Le Parlement européen ouvre le marché des autocars. © HUGO BOSSARD

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Roberts Zīle, rapporteur du règlement sur l'ouverture du marché des autocars. © LOANA BERBEDJ

Une réforme qui ne fait pas que des heureux 

Malgré l’adoption de la réforme, son avenir reste incertain. Plusieurs Etats européens, au premier rang desquels l’Espagne, s’y opposent fermement. Dans ce pays, le transport en autocar occupe une place non négligeable avec plus de 3600 compagnies privées au total. « Ce marché est très important en sources de revenus et d’emplois. Or, les Espagnols sont pour une totale privatisation du secteur qui permet de casser les prix sans trop regarder les conditions de travail », détaille Christine Revault d’Allones-Bonnefoy qui regrette la position, au sein même de son parti, des eurodéputés espagnols.

La question des droits sociaux pourraient aussi poser problème dans ce projet. Pour l’eurodéputé allemand, Michael Cramer (Verts), cette ouverture comporte des risques non négligeables. « Les conducteurs de trains dorment parfois dans leur locomotive. Ce n’est pas acceptable, et il ne faut pas que cela devienne la norme pour les autobus» a-t-il mis en garde lors des débats.

Fabien Albert et Aya Alkhiyari

 

 

 

 

Sommaire de la session parlementaire de février 2019

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