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Isolés chez eux pendant deux mois, les sportifs bas-rhinois ont dû adapter leurs activités physiques. Le sport à domicile a pu être un complément d’entraînement intéressant pour beaucoup. Mais loin d’être suffisant.

Quentin tend son arc et vise sa cible, placée à dix mètres de distance. Aucune brise de vent pour le perturber. Il se trouve dans le couloir de son appartement, à Strasbourg, où il reprend son hobby universitaire : le tir à l’arc. Mises au placard pendant plus de deux ans, les flèches de Quentin ont retrouvé une seconde vie à la faveur du confinement : “Je continue à faire quotidiennement une centaine de flèches. Ça travaille un peu le corps et ça permet de se vider la tête.” Comme lui, de nombreux sportifs ont dû s’adapter pendant les 55 jours de confinement et bouleverser leurs habitudes.

Redoubler d'ingéniosité

Privé de la salle de sport qu’il fréquente trois fois par semaine, Gislain Guidoni, stagiaire à la SNCF à Strasbourg, a innové pour continuer de pratiquer la musculation. Confiné au domicile familial à Wissembourg, il a utilisé des sacs de livres et des caisses de vin en guise de poids de 15 kilos pour les épaules et les dorsaux, sous le regard étonné de son père. “Même pas besoin de gants, j’avais assez de prise comme la caisse était en plastique !”

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Mike Beller réalise ses exercices routiniers sur sa poutre d'escalade faite maison. © Morgane Resse

Tous les stratagèmes sont bons pour faire entrer le sport chez soi. Mike Beller et Morgane Resse ont décidé d’installer une poutre d’escalade dans leur appartement strasbourgeois, sur la porte de leur salon. Ils ont dû se montrer bricoleurs : à défaut de mur au-dessus de leur porte, ils ont fixé une planche en bois avec de grosses chevilles pour faire tenir la poutre. Depuis, les séances s’enchaînent : tractions et exercices de blocage. Suspendus à la poutre les bras fléchis, Mike et Morgane tentent d'améliorer leurs prises.  

Les clubs pris de court

Contraints de repenser leur espace de vie, confirmés et amateurs ont réalisé que la dépense physique à la maison pouvait être complémentaire de leur activité habituelle. Les clubs, piliers de la pratique sportive en France, ont aussi été pris de court. Importer le sport à la maison n’est pas simple pour une structure privée : tous les licenciés ne sont pas logés à la même enseigne en termes d’espaces et d’équipements. Yann Marpeaux, coach au sein de Strasbourg Escrime, 220 licenciés, s’en est vite aperçu. Pour maintenir un lien de proximité avec les pratiquants pendant le confinement, ses collègues et lui ont diffusé, via un groupe Whatsapp, des vidéos d’exercices à reproduire à domicile et proposé des cours en live. “On a surtout pu travailler les fondamentaux de l’escrime, la gestuelle qui se pratique individuellement. C’est la base pour progresser et ça permet de préciser ses gestes”, détaille-t-il. 

 

Mais pour lui, la pratique à domicile n’est qu’un palliatif peu compatible avec la performance. Le contact par visio reste insuffisant. “Ce qui manquait avec l’escrime, c’était surtout l’opposition. Un sport de duel comme le nôtre, ça ne peut pas se retrouver en vidéo”, estime l’entraîneur. 

"On perd l'aspect ludique"

“J’ai toujours voulu avoir ce genre d’installation pour m’entraîner lorsque je n’ai pas le temps d’aller à la salle d’escalade”, souligne Mike. La poutre d’escalade dans le salon a encore de beaux jours devant elle. Tout comme le home-trainer de Jonathan Ficht, futur papa installé à Strasbourg. Habitué à des sorties de plusieurs dizaines de kilomètres en VTT sur les routes et sentiers bas-rhinois, il a pris son mal en patience en investissant dans un vélo d’appartement. Par défaut, mais pas sans intérêt. “Tu ne travailles pas de la même manière, ça reste intéressant pour le sportif que je suis.” À raison d’une à deux heures par jour, Jonathan travaille plus son cardio qu’à l’accoutumée. Lui aussi envisage de garder cette pratique en complément.

Aller plus loin

Après plus de 50 jours à suer chez eux, nombreux sont aussi les sportifs qui veulent tout simplement s’aérer. Pour son premier week-end déconfiné, alors qu'il était “parti pour faire du très soft”, Jonathan Ficht s'est octroyé une sortie VTT de 26,5 km. Le plaisir retrouvé, il a réitéré le dimanche d'après en triplant la distance.

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Quentin vise sa cible placée au bout de son couloir. © Quentin von Matterhornn

Mike le grimpeur, lui, va devoir attendre encore un peu avant de pouvoir fréquenter de nouveaux parcours d'escalade : "Dans une salle, tout le monde pose ses mains sur les mêmes prises, ça parait irréaliste de les nettoyer entre deux passages." Grimpeur sur résine depuis toujours, il s'est donc décidé : la première sortie en falaise aura lieu cet été.

Cyrielle Thevenin
Clément Aubry

 

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