20 octobre 2011
La poignée d'habitants du lotissement Gutenberg vit une situation pour le moins ubuesque. Ils habitent à Lingolsheim et pourtant leur quartier n'est pas rattaché à cette ville mais fait partie intégrante du quartier strasbourgeois de la Montagne Verte. Une anomalie qui présente des avantages mais aussi des inconvénients.
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Les 32 maisons de la rue de Custines et de l'impasse Bernard Palissy constituent une étrange enclave lingolsheimoise dans Strasbourg. Ce quartier résidentiel est coupé physiquement de Lingolsheim par une ligne de chemin de fer infranchissable. Qui plus est, l'unique rue qui permet de sortir et entrer du quartier vient de Strasbourg. D'ailleurs, pas un panneau n'indique le changement de ville et rien ne donne l'impression qu'on passe d'une commune à l'autre. A quelques mètres à vol d'oiseau se situe Lingolsheim, distante par la route de trois kilomètres environ.
Ces panneaux sont le seul marqueur qui indique la limite entre Strasbourg et Lingolsheim (Photo : Cuej - S.C.)
Pourtant, la mairie de Lingolsheim avait anticipé le problème en faisant une demande de rattachement à Strasbourg en 1999, juste avant la construction du lotissement. Un décision similaire avait été prise par le conseil municipal de Strasbourg en 2002. Mais, entre temps, le lotissement est sorti de terre. Si un accord entre deux conseils municipaux suffit à changer le ban communal pour un terrain dépourvu d'habitants, les choses se compliquent lorsqu'il est habité. Une loi votée par le Parlement, ratifiée par le président de la République puis des décrets d'application deviennent alors nécessaires. La procédure est donc en cours depuis plus de 10 ans et les occupants de la rue de Custines et de l'impasse Palissy ne sont pas prêts de devenir Strasbourgeois.
D'ailleurs le veulent-ils vraiment ? Les riverains rencontrés sont plutôt réticents : ils y perdraient en matière fiscale. En effet, en tant que Lingolsheimois, la valeur locative des logements est taxée à hauteur de 25,59%. S'ils avaient été Strasbourgeois, le taux s'élèverait à 32,62% (source : services fiscaux). Si cela coûte moins cher de vivre à Lingolsheim, cette situation peut être problématique dans la vie quotidienne.
Face à cette drôle de configuration, les municipalités de Strasbourg et de Lingolsheim ont été conciliantes, notamment en matière de carte scolaire. « Il n'y a pas d'école de secteur pour eux », explique Esther Lentz, responsable de l'urbanisme et des permis de construire à la mairie de Lingolsheim. Les parents peuvent donc inscrire leurs enfants dans les écoles maternelles et primaires de la Montagne Verte et au collège d'Ostwald, plus proche que ceux de Lingolsheim.
L'éloignement de Lingolsheim pose également problème lors des élections. Alors que leurs voisins de la rue René Laennec votent à l'école Gutenberg de la Montagne Verte située à deux rues de là, les habitants de la rue de Custine et de l'impasse Palissy doivent faire quatre kilomètres pour aller voter à l'école des Mésanges de Lingolsheim.
Les tracasseries de la vie quotidienne ne révoltent cependant pas les riverains. A la société foncière de la Montagne Verte qui a construit et vendu les lots du lotissement, on affirme que « les gens ont acheté en connaissance de cause », ce que personne dans le quartier ne conteste.
Simon Castel