15 mars 2018
Le Parlement européen a adopté mercredi 14 mars, une résolution pour définir les futures relations entre l’UE et le Royaume-Uni. Les eurodéputés se sont prononcés en faveur d’un accord de libre échange, et ont appelé le pays sortant à proposer des solutions concrètes.
Richard Corbett, (S&D, sociaux-démocrates) leader du parti travailliste au Parlement soutient la résolution et invite le gouvernement britannique à rester dans l'union douanière. © Mado Oblin
Dans un an, le Royaume-Uni ne fera plus partie de l’Union européenne. Pourtant, l’avenir des relations entre les deux parties n’est toujours pas défini. Le destin des échanges commerciaux restant incertain, le Parlement européen veut accélérer sur cette question. Pour faire avancer les négociations, il a adopté un accord bilatéral, mercredi 14 mars, sous la forme d’un « accord d’association ».
« On a proposé cet accord d’association pour éviter de multiplier les traités sans consistance ni gouvernance. » explique Guy Verhofstadt (ADLE, libéraux), négociateur en chef du Parlement pour le Brexit.
Ce texte englobe différents domaines de coopération, à savoir les relations économiques, la sécurité intérieure, les affaires étrangères et la défense. Le volet commercial est le point le plus débattu du dossier. Il définit un accord de libre échange qui se traduit par une réduction des tarifs douaniers sur les marchandises.
Les lignes rouges du Royaume-Uni
La résolution du Parlement prend en considération les « lignes rouges » du gouvernement britannique qui exige de sortir de l’union douanière et du marché intérieur européen. Bien qu’elle n’ait pas donné de propositions concrètes sur les futures relations avec l’Union, Theresa May, la première ministre britannique, souhaite « un partenariat le plus vaste et le plus profond possible ».
Autrement dit, elle voudrait que certains secteurs qui exportent en Europe ne soient pas soumis à une tarification douanière et à des contrôles supplémentaires. Cela prendrait la forme d’un accès libre au marché intérieur. Seraient concernées les entreprises transnationales, qui possèdent des usines partout en Europe et au Royaume-Uni, comme dans l’aéronautique et l’automobile. Les banques, elles aussi préfèreraient ne pas être écartées afin de préserver la possibilité d’honorer leurs clients en Europe.
Pas de choix à la carte
Au cours du débat de ce mardi 13 mars, le président de la Commission européenne, Jean-Claude Junker a rappelé qu’aucune concession concernant ces secteurs ne serait faite, car il veut préserver l’intégrité du marché unique européen. « Le choix à la carte ne sera pas possible, » a-t-il déclaré. Son discours a été largement applaudi par les eurodéputés.
« On ne peut être en et hors de l’Union, » a également insisté Michel Barnier, en charge des négociations pour le Brexit, lors du débat. « Les pays tiers ne peuvent pas bénéficier des mêmes droits que les pays membres de l’Union européenne. »
Une position partagée par certains élus britanniques. « Les conservateurs veulent le beurre et l’argent du beurre, » explique Richard Corbett (S&D, sociaux-démocrates) leader du parti travailliste au Parlement. « Ils veulent sortir de l’Union douanière et du marché intérieur, mais ils veulent quand-mêmes pouvoir exporter leurs produits sans entrave et sans barrière. »
Un autre député britannique, l’Ecossais Alyn Smith (Verts/ALE, écologistes), approuve l’accord de libre échange mais regrette que les propositions concrètes viennent seulement de l’Union européenne. « Rien du côté britannique. Cela prouve que Londres ne prend pas le Brexit au sérieux. »
Le problème de la frontière entre l'Irlande et l'Irlande du Nord
Pour Philippe Lamberts (Verts/ALE, écologistes), aucun accord commercial ne peut être conclu tant que le problème de la frontière entre l’Irlande et l’Irlande du Nord n’est pas résolu. Si le Royaume-Uni sort de l’union douanière, la République de Belfast en sortira aussi automatiquement. Ainsi, un contrôle douanier serait installé entre le Nord et le Sud. Ni Bruxelles, ni Londres ne souhaitent un tel scénario. Par ailleurs, depuis 1998, l’accord du Vendredi-saint interdit la création de cette barrière pour ne pas diviser l’île.
Face à ce dilemme, Philippe Lamberts n’envisage qu’une seule solution raisonnable : « Il faut que les Britanniques restent à l'intérieur de l’union douanière et du marché intérieur. »
Ce point bloque les négociations car à ce jour il n’y a pas de propositions concrètes de la part de Downing Street. « S’ils veulent une frontière douanière sans contrôle, qu’ils nous expliquent comment le faire », interroge Richard Corbett (S&D, gauche).
« Le temps est court pour la négociation », selon Michel Barnier. Un compromis devra toutefois être trouvé avant le 19 mars 2019, la date effective du Brexit, sinon les relations commerciales seront réduites au minimum. L’Europe réclame donc « plus de clarté » au gouvernement d’Outre-manche qui, pour le moment, refuse toutes les propositions sans rien offrir en retour.
Mado Oblin et Konstantin Manenkov