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La gravière du Blauelsand attire toute l'année des Strasbourgeois qui veulent pratiquer la nature à bras le corps: en été, les naturistes y profitent du soleil, en hiver, les adeptes des bains glacés y bravent le froid.

Pour parvenir à la gravière du Blauelsand, depuis le château de Pourtalès, il faut longer la piste cyclable pendant quinze bonnes minutes et s’enfoncer dans la forêt en évitant les flaques de boue. Un chemin en terre comprenant trois ponts débouche sur un décor de carte postale, où vivent cygnes, gardons, tanches et grenouilles rousses. 

Un étang de 200 mètres de large à l’eau transparente est entouré de frênes et d’aulnes. Avec sa plage de sable fin, le site attire aussi bien les naturistes l’été que les adeptes de bains glacés l’hiver. 

“Une seule consigne: plus de vêtements’’

“Le naturisme, ce n’est pas juste être nu, souligne Hervé Bégeot, président de l’Association naturiste de sauvegarde et d’animation du Blauelsand (Ansab) depuis 1999. Je me sens encore plus partie intégrante de la nature, je fais partie du système naturel.” Pour lui, plus qu’une pratique, c’est une façon de voir le monde, une approche philosophique de l’existence.

En “se mettant en tenue” pour reprendre son expression, plus de place au jugement. Le rapport à l’autre est modifié, entre vulnérabilité et égalité, explique-t-il en substance. “J’aime voir les gens dans leur entièreté”, confie le président de l’association.

L’Ansab a pour mission de protéger le caractère naturiste du site, de proposer des animations et de veiller à la bonne tenue des lieux. Cette année, 470 adhérents font vivre l’association, mais Hervé Bégeot se rappelle des grandes années: “On a eu jusqu’à 780 adhérents!” Les jours de pointe en été, 800 personnes viennent se dorer la pilule sur la plage. C’est un moment intergénérationnel, où toutes les classes sociales, toutes les couleurs de peaux, tous les sexes se côtoient, s’enthousiasme-t-il. Malgré cela, la moyenne d’âge des adhérents augmente d’année en année, la pratique n’attire plus autant les jeunes que dans les années 1980. 

Avant 1989, les naturistes de Strasbourg se baignaient dans tous les étangs qui longent le Rhin. La mairie a voulu cadrer la pratique et a imposé cette zone pour leurs activités: pétanque, bronzage et barbecue.

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©Émilie Autin

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La gravière du Blauelsand: un lieu de détente pour les naturistes. ©Ansab

L’Ansab a pour mission de protéger le caractère naturiste du site, de proposer des animations et de veiller à la bonne tenue des lieux. Cette année, 470 adhérents font vivre l’association, mais Hervé Bégeot se rappelle des grandes années: “On a eu jusqu’à 780 adhérents!” Les jours de pointe en été, 800 personnes viennent se dorer la pilule sur la plage. C’est un moment intergénérationnel, où toutes les classes sociales, toutes les couleurs de peaux, tous les sexes se côtoient, s’enthousiasme-t-il. Malgré cela, la moyenne d’âge des adhérents augmente d’année en année, la pratique n’attire plus autant les jeunes que dans les années 1980.

©Émilie Autin et Léna Sévaux

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Les trois piliers de la méthode Wim Hof: respiration, concentration et exposition au froid. ©Émilie Autin  

Avant 1989, les naturistes de Strasbourg se baignaient dans tous les étangs qui longent le Rhin. La mairie a voulu cadrer la pratique et a imposé cette zone pour leurs activités: pétanque, bronzage et barbecue.

Trouver du positif dans l’inconfort

Pour autant, pas question de se baigner. Un panneau d’interdiction en détaille les raisons: “Eau très froide et profonde”. Le lieu n’est pas surveillé et les profondeurs atteignent plus de 7 mètres.

La nappe phréatique remonte dans cet étang, la maintenant froide toute l’année. C’est justement ce que recherchent, chaque dimanche d’hiver, les adeptes strasbourgeois de la méthode Wim Hof. 

L’idée: s’immerger dans l’eau glacée pendant plusieurs minutes pour renforcer son système immunitaire. Damien Eissen, fondateur de l’entreprise Primal Bloom, propose des initiations depuis un an au Blauelsand. Une vingtaine de personnes s’y retrouvent chaque semaine pour découvrir la méthode du Hollandais Wim Eric Hof. Cette technique s’articule autour de trois piliers: la respiration, la concentration et l’exposition au froid. 

“Le choc de température force notre corps à réagir”, témoigne Thomas Humbert, un adepte qui suit la formation pour devenir coach en baignade glacée. Au-delà de la gravière, ses terrains de jeu sont nombreux: cascade ardéchoise, grottes iséroises et gorges du Vercors. Des expéditions qu’il partage en vidéo aux plus de 6 000 membres du groupe Facebook “Wim Hof Method - France”.

Émilie Autin

Léna Sévaux

Testé: comme un glaçon dans l'eau

Se baigner un matin de novembre dans une eau à 12 degrés? Nous l'avons fait!

“On va rentrer dans l’eau tous ensemble, jusqu’à la taille, puis on s’agenouillera. À ce moment-là, veillez bien à contrôler votre respiration.” Malgré les instructions et le ton bienveillant de Damien, nous ne sommes pas rassurées. Rien que de regarder l’étang dans la brume de ce matin de novembre, seulement vêtues de nos maillots de bain, on a déjà froid. Notre petite équipe, composée d’une vingtaine de personnes de tous les âges, débutants et confirmés, s’avance à grandes enjambées.

La force du groupe nous fait presque oublier ce qui nous semblait encore insensé cinq minutes plus tôt: s’immerger dans une eau à 12 degrés. Malgré le froid saisissant, étonnement, personne ne fait demi-tour, pas même nous. La pente raide du fond de l’étang nous mouille jusqu’au torse rapidement. “À trois on met les épaules!”, lance Damien. Je prends mon courage à deux mains, bonnet en laine vissé sur ma tête, et je me mouille jusqu’au cou. À côté de moi, je vois Léna qui se tétanise. Impossible pour elle de s’agenouiller. Plus aucun bruit, hormis celui de nos respirations haletantes.

Les conseils de Thomas, pratiquant assidu, nous reviennent en tête: “Une fois dans l’eau, ne bougez plus pour conserver la pellicule de chaleur qui se crée autour de vous.” Difficile à appliquer: je n’arrive pas à retenir mes tremblements, dignes d’une crise de panique. En sortant de l’eau, Léna me confie qu’elle sentait ses muscles prendre feu.

Se rhabiller, un enfer

Mais le plus dur est encore à venir: le rhabillage. Les habitués enfilent leurs vêtements en seulement une trentaine de secondes. Pour nous, dix minutes sont nécessaires pour remettre nos culottes: nos mains gantées sont totalement engourdies. C’est vraiment à ce moment-là que le froid est le plus mordant. Bien qu’emmitouflées, nous voilà rêvant d’un épais plaid en moumoute. Nos compagnons de galère, le sourire en coin, nous tendent une tasse de thé avant de nous dire “à la semaine prochaine!” Pas si vite, j’ai toujours froid et Léna a encore l’impression d’avoir des blocs de glace à la place des pieds.

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Petit selfie après notre bain glacé. ©Léna Sévaux

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