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Sandrine Le Gouic le reconnaît : "Nous sommes bien conscients qu’il y a des choses à améliorer et la mairie n’attend pas qu’un accident gravissime ait lieu." Une commission sécurité aux abords des écoles sera mise en place d’ici décembre. Elle réunira les représentants des parents d’élèves et la mairie. Pour l’adjointe, “le dialogue avec les parents est indispensable".

Raphaël Kleinklaus salue l’instauration de cette commission, mais doute de son utilité : "C’est bien qu’on puisse travailler ensemble, mais maintenant ça serait bien qu’on arrive à de réelles actions plutôt qu’à de l’ultra communication", précise-t-il. Ce père de deux enfants scolarisés à Exen confie : "Moi, je milite pour que les axes principaux et les trottoirs soient sécurisés, pour qu’on ne puisse pas se garer dessus et que les enfants n’aient pas à marcher sur la route lors de leurs trajets." Des mesures qui, selon lui, pourraient être mises en place rapidement.

Loïc Gorgibus et Chloé Lagadou

 

À Schiltigheim, une esplanade piétonne doit être aménagée entre la médiathèque Nord et l'église Sainte-Famille. Les voitures ne passeront plus entre ces édifices, libérant une zone tranquillisée pour piétons et vélos.

À l’angle de la route de Bischwiller et de la rue de Wissembourg, une construction en équerre redessine l’espace entre ce carrefour stratégique de Schiltigheim et l'église Sainte-Famille : la médiathèque Nord. L’édifice dotera enfin la ville de l’équipement public qu’elle attend depuis dix-sept ans. Mais il pourrait aussi annoncer un changement majeur de la circulation s’il s’accompagne de l’aménagement d’un parvis piéton et du détournement de la rue de Wissembourg. 

Cette esplanade piétonne qui reliera les deux édifices, la maire écologiste de Schiltigheim Danielle Dambach souhaite en faire "un vrai trait d’union entre l’église et la médiathèque, entre le cultuel et le culturel". La municipalité projette d’aménager une place végétalisée, avec du mobilier urbain en bois qui en fera un espace de convivialité ombragé. Les intentions municipales ont été présentées aux habitants en juin 2019 lors d’ateliers de concertation. Leur compte rendu mentionne la création d’une voie cyclable aux abords de la place, et l’installation d’arceaux "pour encourager les cyclistes à déposer leur vélo avant d’entrer sur la place". Cet aménagement devrait être intégré au projet de piste cyclable qui pourrait relier à l’avenir le cinéma MK2 en construction sur le site de l’ancienne brasserie Fischer à la médiathèque Nord. 

Éviter de créer une impasse

Ce réaménagement de l’espace urbain impose de dévier la rue de Wissembourg. L’objectif est de préserver la fluidité de la circulation et d’éviter la création d’une impasse. Une des solutions envisagées avant les élections municipales pour amortir les effets d’une telle coupure était de mettre la rue des Pompiers à double sens, ce qui aurait facilité l’accès au parking Exen. Mais "l’idée étant de réduire la place donnée à la voiture de la route de Bischwiller au Vieux Schilick, ce n’est pas envisageable, estime Danielle Dambach. Nous pourrons en revanche réfléchir à en faire une voie réservée aux piétons pour faciliter l’accès à la médiathèque à pied".

Une fois achevée, la médiathèque bénéficiera de son propre arrêt de bus desservi par les lignes 3 et 50, ce qui encouragera les habitants de Bischheim et de Hoenheim à s’y rendre en transport en commun. Mais la proximité immédiate de la médiathèque avec le parking du cimetière, ou celui d’Exen un peu plus loin, pourrait inciter les habitants à tout de même privilégier la voiture. Danielle Dambach confirme que le parking du cimetière "sera réaménagé pour y créer plus de places de stationnement". Tout en précisant : "Nous souhaitons à terme horodater cette zone pour décourager l’utilisation de la voiture."

Avec près de 15 000 véhicules chaque jour, selon Yves Laugel, directeur du Sirac, difficile de nier la place prépondérante des voitures et des camions sur cette artère majeure du nord de l’Eurométropole. “Cette voie est un axe historique de transit qui, en plus de desservir près de 70 000 habitants, permet l’accès à de nombreuses industries”, explique l’adjoint Patrick Maciejewski. Donner plus de place aux vélos sur cette route très empruntée suppose donc d’abord de réduire le trafic. “La réflexion porte sur l’A35 qui va prochainement devenir un boulevard urbain, ce qui permettra de renvoyer la circulation sur cette voie et donc de pacifier la route de Bischwiller, projette Gilles Malherbe, en charge de l’urbanisme à Schiltigheim. Mais ce ne sera pas avant cinq à dix ans…” Julien Hofstetter n’y croit pas. “Il ne faut pas se voiler la face, la route de Bischwiller est et restera une voie importante de transit.”

Ménager les commerçants

Quant à concevoir une piste cyclable sans empiéter sur les places de parking qui bordent la route, c’est impossible. Une contrainte supplémentaire mise en exergue par Gilles Malherbe : “Cette route est très commerçante, nous ne pouvons pas juste supprimer les places de parking.” Le coprésident de la Schilyclette rejette cet argument : “Enlever ces places ne nuirait pas aux commerçants. Parce que les voitures qui l’empruntent ne s’arrêtent pas forcément, mais aussi parce que bon nombre de clients sont eux-mêmes des cyclistes ou des piétons. Le vrai enjeu, c’est la construction d’un parking silo pour accueillir l’ensemble de ces voitures.” Une idée partagée par la municipalité qui envisage la construction d’un parking aux abords du gymnase des Malteries.

À ces contraintes s’ajoute le fait que c’est l’Eurométropole qui dispose du pouvoir de décision sur les projets de voirie et autres parkings. “Pour développer des pistes cyclables, il est nécessaire de convenir d'un plan global de mobilité comprenant tous les moyens de transport. Malheureusement, ça ne se fait pas en un claquement de doigts…”, rappelle Louisa Krause, la présidente de l’association Col’Schick. Il faudra donc encore s’armer de patience avant de pédaler sereinement sur la route de Bischwiller.

Iris Bronner

“Ce n’est qu’en modifiant structurellement la circulation, en privilégiant le vélo et les transports en commun que nous arriverons à diminuer significativement la pollution de l’air”, indique l’élu. L’arrivée d’un nouveau tramway à Schiltigheim pourrait aussi améliorer la situation. Cette ligne qui desservirait le sud de la ville par la route de Bischwiller et rejoindrait la route du Général-de-Gaulle au niveau de l’ancienne usine Fischer, pourrait réduire la place de l’automobile au profit de modes de transport doux.

Éléonore Disdero et Sarah Dupont

*Estimation du Service d’information et de régulation automatique de la circulation de l’Eurométropole (Sirac).

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© Thomas Wronski

Pas de contrôles de vitesse

Si la volonté de faire de la place aux vélos semble unanimement partagée, les façons d’y parvenir diffèrent. Au nom de l’apaisement, la vitesse maximum de circulation est passée de 50 à 30 km/h au mois de juin dernier sur l’ensemble de la route de Bischwiller, “afin de rassurer les cyclistes”, précise Gilles Malherbe, chef de l’urbanisme de la mairie. Mais pas besoin d’avoir un radar dans la poche pour se rendre compte qu’aucun véhicule ne respecte cette nouvelle limitation. “ll n’y a ni contrôle, ni dos d’âne, rien qui oblige les voitures et camions à ralentir”, s’irrite Benoît Ecosse. Une mesure à court terme insatisfaisante, qui s’ajoute aux refus, ces derniers mois, de plusieurs propositions favorables aux vélos. “Après les municipales, nous avons proposé la mise en place d’une circulation à sens unique sur les routes de Bischwiller et De-Gaulle pour laisser de la place à une bande cyclable, mais ça n’a pas abouti”, regrette la présidente de Cadr67.

Le projet de création d’une vélorue, qui rendrait les cyclistes prioritaires sur la chaussée, a connu le même sort. “Bien que plusieurs élus aient soutenu cette proposition, la vélorue a été retoquée. Malgré leurs intentions en faveur des cyclistes, les élus restent dans une logique pro-voiture”, déplore Julien Hofstetter, co-président de l’association la Schilyclette. Au sein même du mouvement Vélorution, l’une des associations à l’initiative de cette idée, la proposition divise : “Il me paraît utopique de vouloir instaurer une vélorue sur cette route, notamment du fait des bus qui ne pourraient pas dépasser les vélos et des bouchons que cela pourrait créer”, admet Benoît Ecosse.

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Le baromètre des villes cyclables publié en 2019 place Schiltigheim dans les communes ayant un "climat plutôt défavorable" pour le vélo, avec une note de 2,89 sur 6. © Laure Solé

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Youssef Al Makhloufy est livreur pour Uber Eats depuis un an.
© Alexis Cécilia-Joseph

Depuis des lustres, la municipalité de Bischheim rêve de réaménager le croisement de la route de Bischwiller avec la rue du Général-Leclerc. Mais le projet est encore loin de se concrétiser.

D’abord, une camionnette UPS se gare sur le trottoir pour une livraison, obligeant les automobilistes à la contourner et bloquant le peu d’espace qui subsiste pour les cyclistes. Ensuite, un bus de la ligne 3 s'arrête juste devant cette camionnette, qui devra passer en plein milieu de la voie pour continuer sa route, alors que le trafic de voitures et des cyclistes est constant dans les deux sens. Une scène somme toute courante au croisement de la route de Bischwiller et de la rue du Général-Leclerc où passent chaque jour des milliers de voitures. 

Selon Fabien Weiss, ancien adjoint au maire de 2008 à 2020, un projet de réaménagement du carrefour est à l’étude depuis plus de quinze ans. La mairie propose d’aligner la rue du Général-Leclerc avec l’avenue de Périgueux afin de faciliter la traversée de la route de Bischwiller. Pour cela, la rue du Général-Leclerc doit être retracée sur une portion de 167 m pour déboucher face à l’avenue de Périgueux et elle doublerait de largeur. Un projet qui s’accompagne d’une limitation de vitesse à 30 km/h, de nouvelles places de stationnement et d’une piste cyclable bidirectionnelle construite sur le trottoir. Le tout afin de désengorger le carrefour et de fluidifier la circulation.

D’après Jean-Louis Hoerlé, maire LR de Bischheim, la pharmacie Premium Santé sera détruite au premier trimestre 2021 afin de libérer l’espace nécessaire au déplacement de la voie de circulation côté rue du Général-Leclerc. Mais la suite du scénario n’est pas encore écrite : deux bâtiments qui doivent aussi être démolis n'ont pas encore été acquis par la mairie.

Pourquoi les restaurateurs choisissent la route de Bischwiller ?

Les kebabs investissent la route de Bischwiller car de nombreux locaux y sont disponibles à des prix abordables. Pour la maire de Schiltigheim, Danielle Dambach : “Les commerçants de ce type se sont installés là parce que la route de Bischwiller a perdu de son attractivité, à cause du trop grand flux de transit.”  

À Bischheim, le manque de dynamisme commercial s'explique notamment par la situation économique de la ville d’après Michèle Frey, chargée de mission municipale au développement économique. “La restauration n’a jamais vraiment décollé. Bischheim est une ville de banlieue aspirée par Strasbourg [...] Si ces kebabs existent, c’est qu’il y a des clients. C’est la loi de l’offre et de la demande”, estime la chargée de mission.

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