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24h dans la vie du Wagon Souk, espace solidaire

02 octobre 2019

Depuis mai 2019, un lieu excentrique donne une nouvelle vie à l’ancienne cave de la brasserie Gruber. Ouvert à tous, le « Wagon Souk » fonctionne au quotidien, de la cantine aux ateliers linguistiques, grâce à la Drêche, collectif d’artistes strasbourgeois.

Le Wagon Souk, lieu solidaire et culturel, ouvre ses portes du matin jusqu'au soir./ Photo Sarah Chopin

En contrebas du très médiatique « Hôtel de la rue », il y a un drôle d’espace associatif, plus discret. Installé dans une cave de l’ancienne brasserie Gruber, le « Wagon Souk » attire sans-abris, bénévoles ou simples curieux du quartier de Koenigshoffen. Un ameublement dépareillé, des murs couleur ciel et des troncs d’arbres en guise de tabourets donnent au lieu une allure bohême. Ce sont Hélène Humbert et Zaï Mo, les créateurs de l’atelier d’artistes la Drêche, qui l’ont ouvert en mai 2019, quelques mois avant l’Hôtel de la rue. Cantine, salon de coiffure, rencontres associatives et même sessions DJ… le Wagon Souk propose toutes sortes d’activités tout au long de la journée, dans cette vaste cave en forme de tunnel.

Un menu sénégalais à la carte

« Mama Souk », la cuisinière sénégalaise, est toujours la première à arriver. Il est 8 ou 9h lorsqu’elle entame la longue préparation de ses repas. Depuis mai, elle tient sa cantine solidaire dans une petite cabane entièrement aménagée, avec placards et plaques mobiles de cuisson. Les associations de la Drêche et La Roue tourne (qui gère l’Hôtel de la rue) lui fournissent ses ingrédients, typiquement sénégalais. À la carte, on trouve du poulet mafé, une sauce à l’arachide, du tiep bou dien, un riz aux légumes et au poisson et des beignets. « Le bissap, c’est du jus de la fleur d’hibiscus, explique Mama Souk en sortant des boissons colorées du réfrigérateur. Je le fais avec du gingembre, il faut le râper, c’est long et difficile. »

Mama Souk prépare ses repas dans une cabane en bois aménagée en cuisine./ Photo Caroline Celle

Adama, de son vrai nom, n’a pas toujours été cuisinière. Au Sénégal, elle était professeure d’anglais. Arrivée en France il y a sept ans, elle attend toujours d’être régularisée. À la table de sa cantine renommée, les clients se succèdent, de 11h à 20h. Parmi eux, des migrants du Tchad, de Géorgie, ou des Français qui travaillent au Parc Gruber. « Certains n’ont pas d’argent pour payer le repas, alors ils ne laissent rien, explique Mama Souk. Les autres mettent le prix qu’ils veulent. »

Des coupes à prix libre

Parmi ses multiples vies, la cave du Wagon Souk a servi de glacière pour fermenter la bière, d’espace de stockage pour une entreprise de transporteurs de colis…

Aujourd’hui, en plus de la cantine solidaire, elle abrite l’atelier de Saad, le barbier des lieux. Saad arrive sur les coups de 14h et profite d’un début d’après-midi plutôt calme pour s’occuper de son premier client : lui-même. « J’ai commencé cette activité quand j’avais 9 ou 10 ans. Comme vous le voyez, parfois je me rase la barbe moi-même. » Cet Irakien d’origine, arrivé en France il y a tout juste un mois, propose des coupes à partir de 3€, dans son atelier qui se compose d’une petite chaise, d’un meuble-coiffeuse et d’un miroir, entreposés dans un petit coin de la cave, pas loin de la cantine de Mama Souk. « Je suis là pour aider les gens, explique Saad avec fierté. La plupart de ceux qui viennent ici n’ont pas 20€ en poche. Certains n’ont même pas de quoi manger. Alors ils me donnent ce qu’ils veulent, je ne leur impose pas de prix. C’est important de s’entraider, c’est pour cela que je fais ça. »

Apprendre l'arabe en papotant

Quand la nuit commence à tomber, le Wagon Souk n’arrête pas ses activités pour autant. L’association organise parfois des soirées, « en fonction des envies et des gens », comme le dit Hélène Humbert, de la Drêche. Le jeudi soir, c’est « café polyglotte ». Le principe : apprendre les langues des uns et des autres de façon improvisée. L’événement est ouvert à tous, mais la plupart des gens viennent de l’Hôtel de la rue. « À l’Hôtel, il doit bien y avoir une trentaine de langues parlées, affirme Hélène. Des cours de français sont organisés pour les résidents mais certains parlent déjà très bien français et voudraient apprendre d’autres langues. »

Ce soir-là, on apprend le géorgien et l’arabe : des mots nouveaux viennent au hasard de la conversation. L’un des participants se lève, prend une craie et écrit sur un tableau d’école le mot « marin » en alphabet arabe. Studieux, son public recopie, en picorant dans les plats de Mama Souk. 

Lycéenne de 16 ans, Ana* est une immigrée géorgienne, résidente à l'Hôtel de la rue. Polyglotte, elle sert d'interprète au café linguistique. 

Caroline Celle et Sarah Chopin

 

* Le prénom a été modifié

Adresse : 91, route des Romains, à Koenigshoffen 

Programmation :

  • Vendredi 4 octobre - déjeuner inter-associatif de 12h à 14h
  • Samedi 5 octobre - soirée électro/afro Chicago-Lagos-Durban de 23h à 6h
  • Vendredi 11 octobre - soirée Meknes-Majorque-Bejaïa de 23h à 6h

Prix libre pour tout événement à partir de 3 euros

 

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