Adaptée de la série israélienne à succès “BeTipul”, “En Thérapie”, la nouvelle collaboration d’Eric Toledano et Olivier Nakache, diffusée actuellement sur Arte, connaît une réussite inattendue. Les cinq premiers épisodes, suivis par 1,8 million de téléspectateurs, ont été plébiscités. Un succès largement mérité.
Ils sont désormais tous disponibles sur le site d’Arte: les 35 épisodes de la série d’Olivier Nakache et Eric Toledano En thérapie, diffusés cinq par cinq sur la chaîne tous les jeudis soirs depuis deux semaines. Et la série demeure tout aussi captivante, au fur et à mesure que les personnages révèlent leurs failles sur le divan du Dr Dayan (Frédéric Pierrot). Au fil des épisodes, les protagonistes se révèlent petit à petit. Loin d’être prévisible, l’intrigue se complexifie (attention spoiler). Le cabinet du psychanalyste se transforme en une petite société, dans laquelle certains, comme Ariane (Mélanie Thierry) et Adel (Reda Kateb) se croisent et d’autres comme Léonora (Clémence Poésy) et Damien (Pio Marmaï), se séparent. Certaines personnes centrales dans la vie des protagonistes apparaissent brièvement: la rencontre avec le père d’Adel et les parents de Camille (Céleste Brunnquell), permettent subtilement de mieux comprendre les traumatismes des principaux intéressés. Comme Philippe Dayan, le spectateur, installé confortablement dans son fauteuil se prend au jeu et essaie à son tour de reconstituer le puzzle psychique des personnages avec les pièces glanées petit à petit, dans un mot, un regard, une attitude.
Le pari gagnant de la sobriété
Pour ceux qui n’auraient pas encore commencé la série, l’intrigue est simple: au lendemain des attentats du 13 novembre 2015, les réalisateurs filment le dialogue entre un psychanalyste et ses patients, qui se succèdent chaque jour de la semaine dans son cabinet pour évoquer leur quotidien, leurs tracas, leurs souvenirs d’enfance, leurs relations familiales, dans des épisodes d’une demi-heure.
Le dispositif n’est pas plus complexe. C’est, la plupart du temps, une série de champs-contrechamps qui permet une libération progressive de la parole. Cette apparente simplicité permet aux réalisateurs de nous livrer un très bel objet artistique, qui mêle poésie et mise en scène d’une certaine trivialité de l’existence.
Des histoires singulières mais concernantes
L’interprétation sans fausses notes de Mélanie Thierry, Reda Kateb, Céleste Brunnquell (remarquée notamment dans Les Éblouis de Sarah Suco en 2019), Clémence Poésy, Pio Marmaï et Carole Bouquet, incite presque le spectateur à entreprendre son analyse psychologique personnelle. Loin d’être démoralisante, la thématique des attentats, évoquée de manière plus ou moins répétée par les personnages, permet à chacun de se reconnaître dans les propos accouchés par le psychanalyste. Et si au premier abord, le côté “intello” du tableau peut dérouter, c’est finalement ce rôle d’homme mûr, cultivé et serein en apparence qui fait la force du personnage de Philippe Dayan, de plus en plus torturé par ses propres états d’âme au fil des entretiens.
Enfin, la temporalité de la série, dirigée par le rythme tranquille de la conversation, est une de ses grandes forces. Elle permet, d’aborder les sujets du traumatisme d’enfance, de la violence quotidienne, du viol et de la maladie, sans jamais entraîner le sujet dans le mélodrame pathétique.
Alix Woesteland