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06/03/13
18:09

« Chávez a marqué l'époque contemporaine »

Le Venezuela est orphelin après le décès du Comandante. Après quatorze ans de chavisme, Christian Girault, directeur de recherche émérite à l'Institut des Hautes Etudes de l'Amérique Latine, dresse le bilan.

 

Après le décès d'Hugo Chávez, que retenir de son action?

C'est un bilan contrasté. Il a fait pas mal de choses et il aura marqué l'époque contemporaine du Venezuela. On peut mettre à son actif tous les aspects sociaux, notamment la réduction de la pauvreté, surtout de l'extrême pauvreté. Le pays est extrêmement riche sur le plan des ressources naturelles en particulier avec le pétrole et le gaz. Chávez a redistribué les bénéfices de cette rente pétroilère aux classes défavorisées. Il y eu aussi d'importants programmes sociaux : les « missions ». Elles permettent aux populations des quartiers pauvres d'avoir accès à la nourriture, aux médicaments et à des soins médicaux pratiquement gratuits.

L'éducation était aussi une de ses priorités...

Il a renforcé les écoles et les lycées et a même fait construire des universités « bolivariennes », à côté des universités traditionnelles. Ce sont des universités idéologiques qui enseignent la révolution. Elles sont très critiquées. Il a aussi contribué à réduire l'analphabétisme. Des tuteurs sont envoyés dans les quartiers auprès des enfants et même des adultes.

L'économie est fondée sur la rente pétrolière...Au détriment de l'agriculture et de l'industrie ?

Oui de ce côté-là, c'est très mal organisé. Tout ce qui concerne l'agriculture et l'élevage a été négligé. C'est incroyable : le pays est extrêmement riche avec des terres agricoles très prospères.Il y a aussi de grandes capacités industrielles avec les mines de bauxite, de fer et d'or. Mais les produits industriels et de première nécessité sont souvent importés au Venezuela. Ils sont parfois difficiles à obtenir et il y a des carences. Dans les supermarchés de Caracas, il y a des produits qui manquent parce qu'ils n'arrivent jamais au port. Le pays n'est pas du tout autosuffisant sur ce plan-là.

Le modèle de développement est-il durable ?

Non pas du tout, malgré de bonnes intentions. Car sur le papier, il y a une volonté de trouver un système de développement durable et équitable, qui respecte la nature. L'autre échec du gouvernement, c'est de ne pas être parvenu à réduire la criminalité. Caracas et les routes de province ne sont pas sûres. Il y a des attaques et même des séquestrations pour des vols de portables ou portefeuilles.

Sur le plan politique, peut-on parler d'un système transparent ?

Disons que Chávez a voulu marquer le système : il a fait une nouvelle constitution en 1999, la « constitution bolivarienne », pour rompre avec le système traditionnel qui était le système de partis. A chaque fois, il a été réélu avec une majorité. D'autant qu'au Venezuela, le vote est électronique. Il y a donc très peu de possibilités de fraude électorale. Malgré tout, c'était une démocratie polarisée : l'opposition était méprisée et rejetée. Il ne lui donnait pas le rôle d'une opposition dans un système démocratique. Il les traitait de « laquais des Etats-Unis ».

Cette constitution donne pourtant un fort pouvoir au président...

C'était un système extrêmement centralisé. Hugo Chávez décidait quasiment de tout. Il avait un gouvernement bien sûr, mais ses ministres lui étaient favorables et il imposait ses vues. Les gens valsaient. S'ils tombaient en disgrâce, ils perdaient leur poste.Il se moquait des systèmes de gestion traditionnels. Par exemple, pour les ambassadeurs, il pouvait promouvoir un homme jeune, à 35 ans, alors qu'il y avait des ambassadeurs chevronnés qui attendaient des postes.

Comment exerçait-il le pouvoir?

Tout était concentré autour de lui, sur la personnalité du chef. On l'a bien vu quand il était malade, le cabinet ne travaillait pas et attendait ses instructions.

Et maintenant, quid de l'après Chávez ? Ses successeurs vont-ils suivre la même voie ?

On doit organiser des nouvelles élections en catastrophe. C'est intéressant de voir ce qu'il va se passer. Le vice-président a été choisi par Chávez. Il est issu des syndicats. Il faut voir s'il va réussir à s'imposer par rapport aux autres. Car il y a aussi les tendances ultragauches qui prônent l'étatisme intégral comme le système cubain. Il y aussi la question de la place de l'armée. Est-ce qu'elle va suivre les indications du prochain gouvernement ou est-ce qu'il y aura un risque de coup d'Etat ? Elle est importante au Venezuela car Chávez la favorisait. Dans tous les cas, il y aura un avant Chávez et un après Chávez, car même si le futur président est dans la même ligne politique, il n'aura évidemment pas la même personnalité.

Propos recueillis par Mathilde Dondeyne et Lucie MarnaS

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