Quand il parle d'investissements étrangers, Raphaël Glucksmann n'hésite pas à hausser le ton : "L’Europe est seule face à des dangers. On agit contre eux pour vous protéger, protéger vos familles. Et pour ça, on a besoin de la souveraineté européenne!" L’élu rattaché à Place Publique est rapporteur d’une réforme qui vise à renforcer le filtrage des investissements en provenance de l’étranger au sein de l’Union européenne (UE). Selon l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), ils représentaient 115 milliards d'euros en 2021. L’objectif de la réforme : les restreindre davantage pour éviter des prises de contrôle d’entreprises européennes, voire de secteurs entiers, par des intérêts étrangers.
Le Parlement européen a voté jeudi 8 mai 2025 en faveur d’une révision de la loi du filtrage des investissements en provenance de l’étranger. Le but : limiter ces financements dans des secteurs stratégiques de l’Europe. Porté par le socialiste Raphaël Glucksmann, ce projet montre déjà des failles.
La montée de l’extrême droite pro-russe brouille le message de l’Union européenne sur l’Ukraine. C’est notamment le cas avec les députés bulgares du parti national Revival (affilié au groupe ESN), qui ont signé un accord de coopération avec le parti de Vladimir Poutine, Russie unie. Un accord dénoncé par la présidente du groupe Renew Valérie Hayer : "Il s’agit d’attaques flagrantes à nos valeurs communes ! Mais aussi à l’intégrité et à la réputation du Parlement". Elle a demandé l’ouverture d’une enquête visant à déterminer si le parti Russie unie a versé de l’argent aux députés bulgares afin d’influencer leur travail parlementaire. Elle a également insisté pour s’assurer que les eurodéputés présents au défilé du 9 mai à Moscou ne fassent pas le déplacement aux frais du Parlement.
Emprunter ensemble pour faire face en cas de crise
Le Parlement européen et la Commission européenne ont soutenu la possibilité d'empruntrer en commun en cas de crise, comme ce qui a été fait pour les 800 milliards d’euros du plan de défense ReArm Europe, proposé en mars 2025 par la Commission européenne. Pour autant, de nombreux partis rappellent qu’emprunter doit rester une exception : “Ce n’est pas la règle et ça ne deviendra pas la règle”, a conclu Siegfried Mureșan, co-rapporteur du budget pour le Parti populaire européen (PPE, droite).
Une difficulté à faire front uni
La majorité des députés s’accordent sur la position de l’UE et du président Zelensky à l’exception de l’extrême droite. Dans l’hémicycle, les groupes Patriotes pour l’Europe (PfE, extrême-droite) et Europe des nations souveraines (ESN, extrême-droite) ont manifesté leur soutien aux positions américaines : "La résistance acharnée de l’Ukraine relève du miracle. Il serait désastreux que le miracle, quand bien même entaché d’une amputation territoriale insupportable se termine en désastre", a appuyé le député PfE Pierre-Romain Thionnet. En 2014 déjà, des membres d’extrême droite, certains non inscrits et d’autres du groupe Europe de la liberté et de la démocratie directe, n’avaient d’ailleurs pas soutenu la résolution du Parlement européen condamnant l’annexion de la Crimée par la Russie.
Depuis le début du conflit, l’Union européenne a toujours affiché son soutien total à l’Ukraine et à la préservation de l’intégrité de son territoire. Pour la cheffe du bureau italien du Centre de politique européenne, Dr Eleonora Poli, le Parlement a un rôle à jouer, même si ce n’est pas dans la prise de décision : "Ce sont toujours les gouvernements nationaux qui vont diriger l’Europe en termes de relations internationales. Les institutions européennes ont néanmoins le rôle de lancer la discussion ."
Des divisions sur la question de l’intégrité territoriale de l’Ukraine
Alors que les États-Unis négocient actuellement un accord de paix avec l’Ukraine et la Russie, les eurodéputés cherchaient ce mercredi 7 mai à peser sur cet accord dont l’UE est exclue. "Nous devons prendre toute notre place car Donald Trump ne connaît rien à l’Ukraine et ne connaît rien à l’Europe", assurait l'eurodéputée du groupe des libéraux Renew Nathalie Loiseau. Déterminé à résoudre le conflit le plus rapidement possible, le président des Etats-Unis a en effet pris le parti de la Russie dans les pourparlers. Il se dit prêt à accepter la paix à n’importe quelle condition, quitte à ce que la ligne rouge fixée par le président Zelensky et l’UE soit franchie : abandonner les terres ukrainiennes occupées aux Russes. En plus de la Crimée annexée en 2014, les troupes russes occupent aujourd’hui cinq régions du Sud et de l’Est de l’Ukraine, ce qui représente en tout 20 % de son territoire.