Carottes, navets, tomates, poireaux. Sur une tombe, un étrange bouquet automnal se mêle aux chrysanthèmes du cimetière Saint-Gall. À la tête d’une équipe de trois personnes, Vianney Rohfritsch, responsable du lieu depuis 2019, est chargé de son entretien. Depuis la végétalisation et l’abandon des pesticides au début des années 2010, il reconnaît que le cimetière est devenu plus agréable même si "c’est beaucoup d’entretien et c’est plus compliqué qu’avant." Les allées de gravier ont laissé place à l’herbe et des bancs permettent aux visiteurs de se recueillir à l’ombre des sapins surplombant les tombes. Un tournant vertueux qui se poursuit avec le projet d’extension au sud porté par la Ville de Strasbourg. D’ici deux ans, le cimetière de la Montagne-Verte devrait expérimenter la création d’une forêt cinéraire et l’utilisation d’urnes éco-responsables, donnant la possibilité aux défunts de se faire inhumer aux pieds des arbres.
Le long de la route de Schirmeck, une maman presse le pas avec sa poussette, longeant prudemment le trottoir pour éviter de mordre sur la piste cyclable. Plus loin, un homme sort de l’une des trois voitures stationnées avec les feux de détresse sur le trottoir. Il est 16h15, le parvis de l’école Erckmann-Chatrian s’anime à la sortie des classes. Des trois écoles de la Montagne-Verte, elle est la seule dont l’accès donne directement sur l’axe routier le plus fréquenté du quartier.
La plupart des parents rentrent à pied avec leurs enfants. "Moi, j'habite de ce côté, donc ça va", explique Katia, maman d’un garçon de maternelle, désignant d’un geste la rue de Crastatt non loin. Comme de nombreuses familles, elle fait le trajet via des rues peu passantes. D’autres n’ont d’autres choix que de longer ou de traverser la route de Schirmeck avec leurs enfants. "On est obligé de passer par là, mais c’est hyper dangereux", soupire Yasmine, qui habite en face d’Auchan.
De part et d’autre des salles s’échappent de légers gémissements et des bruits de pas. Il est 15h30, fin de la sieste et coup d’envoi du goûter à la crèche multi-accueil, au nord-est du quartier de la Montagne-Verte, à Strasbourg. Les enfants, bavoir autour du cou, se précipitent vers les petites tables en bois éparpillées dans les quelques salles.
À pied, pas facile d’arpenter ou de traverser la route de Schirmeck, l’un des axes les plus fréquentés de Strasbourg, a fortiori quand on est enfant. À l’école Erckmann-Chatrian, en bordure de l’artère, les parents réclament plus de sécurité pour leurs trajets domicile-école.
Dès 2026, le cimetière Saint-Gall qui borde le quartier de la Montagne-Verte devrait s'étendre vers le sud. Une nouvelle page dans l'histoire de ce lieu datant du XVIe siècle qui se visite comme un musée.
La crèche multi-accueil et la crèche familiale de la Montagne-Verte ont traversé une période de crise à la rentrée de septembre. Confrontées à des départs imprévus dus à l'attractivité des écoles maternelles et des micro-crèches, les directrices ont dû redoubler d'efforts pour combler les places vacantes. Ce n'est que mi-novembre qu'elles ont atteint leur capacité d'accueil.
Les Frères musulmans, vestige de la lutte contre l’URSS
Aux premières élections libres du pays, en 1956, la gauche fait une percée ; le pouvoir royal et les Etats-Unis craignent l’influence soviétique. Le parlement est dissous, la loi martiale est déclarée et les partis interdits. « Nous voulons que ce pays soit inaccessible à la propagande communiste et aux théories bolchéviques », déclare le roi dans un discours.
La Société des Frères musulmans apparaît alors comme un débouché acceptable à l’expression politique, pour contrer les organisations soutenues par l’URSS. Fondé en Égypte en 1928 et présent dans tous les pays arabes, le mouvement islamiste continue de gérer ses écoles et ses hôpitaux. Ils fournissent aussi de nombreux ministres de l’éducation.
Vient 1989, l’URSS n’est plus une menace pour la “stabilité régionale” et le pays connaît une forte contestation sur fond de mesures d’austérité. Le pouvoir décide de tenir des élections. Après trois décennies d’interdiction, les organisations de gauche n’ont plus que la peau sur les os. Ne restent que les islamistes.
Ils deviennent donc la principale force d’opposition. Les menaces de “déstabilisation” ne viennent plus de la gauche mais des religieux. Le pouvoir riposte avec une nouvelle loi électorale. Basée sur le système “un homme, une voix”, elle favorise les élus “indépendants”, acquis au pouvoir, élus le plus souvent par solidarité tribale.