Le chef du parti démocrate a été désigné pour former un nouveau gouvernement ce matin. Personnalité controversée, il devra ménager son camp et ses alliés pour parvenir à diriger le pays.
Matteo Renzi le 21 janvier 2014 sur un plateau de la télévision italienne. Flickr/Carlo Nidasio
A 39 ans, Matteo Renzi devrait logiquement devenir le plus jeune Premier ministre d'Europe. Appelé lundi à former un gouvernement par le président de la République Giorgio Napolitano, il a promis de consacrer toute son « énergie et son enthousiasme » à réformer l'Italie.
Jeudi dernier, la direction du parti démocrate votait une motion contre Enrico Letta, alors Premier ministre. Ce dernier avait dû démissionner, entrainant la nomination de Matteo Renzi, le chef du parti, pour former un nouveau gouvernement.
Après sa démission de la mairie de Florence, qu'il dirige depuis 2009, intervenue en fin d'après-midi, l'homme politique devrait entamer des consultations avec les différents partis politiques italiens, pour vérifier qu'il a bien une majorité au parlement. Il retournera ensuite à la présidence pour présenter son gouvernement puis soumettra son programme au Parlement pour un vote de confiance.
Et son programme est ambitieux. D'ici à la fin février, il se consacrera aux réformes institutionnelles (mode de scrutin électoral, abolition du Sénat..), en mars à la question du travail alors que le taux de chômage atteint quasiment 13%, en avril à la bureaucratie et à la réforme de l'administration publique, et enfin en mai, il s'attaquera à la fiscalité, alors que le patronat réclame d'urgence un allègement des charges sociales.
L'Economie, un ministère crucial
Elu le 8 décembre à la tête du premier parti de la majorité gouvernementale et principal parti de gauche italien, Matteo Renzi dit vouloir refonder le Parti Démocrate. A la manière du « New Labor » de Tony Blair, il souhaite en faire « un parti plus agile et innovateur ». Critiqué pour un programme politique trop libéral (moins de charges sur les entreprises, moins de dépenses publiques, moins de bureaucratie), distant de la base du parti plutôt basé sur les syndicats, Renzi se distingue surtout par ses talents de tribun.
Grand utilisateur des réseaux sociaux, cet élu local qui n'a jamais siégé ni au parlement ni dans un ministère, jouit d'une forte popularité et a bénéficié d'une ascension éclair. Elu en 2004 pour le centre gauche lors des élections provinciales, il se fait remarquer en février 2009 dans la course à la mairie de Florence en étant choisi aux primaires de son parti à la place du candidat officiel du parti. Un prélude à sa victoire aux municipales, quelques mois plus tard.
Qualifié d'« homme pressé » par les médias italiens, Matteo Renzi, s'est déjà confronté aux difficultés de la politique italienne. Exemple le plus marquant : il a dû renoncer à son premier choix pour le poste de ministre de l'Economie, jugé trop peu « politique » pour faire le poids face à la Commission européenne et à la BCE. Or ce ministère est crucial pour la troisième économie de la zone euro, qui peine à sortir de la crise et enregistre une croissance quasi nulle au dernier trimestre 2013 (+0,1%). « Le pays est impatient et a besoin de réponses immédiates, surtout sur l'économie », a prévenu le ministre sortant Fabrizio Saccomanni.
Le patron des démocrates s'est vu aussi opposer des refus de la part des de deux personnalités italiennes à qui il avait proposé les ministères du Développement économique et de la Culture.
Autre difficulté et de taille pour le futur chef du gouvernement : les exigences de son allié dans la majorité gouvernementale, le Nouveau centre droit, d'Angelino Alfano. « Nous sommes tout simplement indispensables pour la naissance de ce gouvernement. Si nous disons “non“ au gouvernement, celui-ci ne peut pas voir le jour », a souligné dimanche l'ex-dauphin de Silvio Berlusconi. Angelino Alfano exige notamment que le gouvernement ne soit pas déséquilibré vers la gauche et qu'un contrat soit signé, une sorte de « pacte à l'allemande », sur le programme du futur exécutif.
Matteo Renzi, pour qui « la rapidité est un aspect constitutif de la personnalité », se rend compte que « la formation d'une équipe n'est pas un travail facile », s'est amusé le journal La Stampa.
Florence Tricoire (avec AFP)