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La taxe d’habitation et la taxe foncière sur le bâti ont connu beaucoup d’évolutions, et surtout des augmentations, depuis 2008. En cause: la crise économique de 2008, une réforme de la fiscalité, et des collectivités fortement endettées.

 

Source : Insee 2015. Infographie: Fanny Guiné

Deux phénomènes apparaissent à la lecture du graphique. D’abord, l’augmentation assez nette des deux taxes dans le Grand Est à partir de 2010. Ensuite, l’écart entre taxe d’habitation et taxe foncière continue de se creuser, parfois de façon très importante. 20 points séparent parfois le taux de la taxe d’habitation et celui de la taxe foncière. Entre les deux, la taxe foncière est toujours la plus élevée. Deux événements expliquent ces évolutions: la crise de 2008 et la réforme de la taxe professionnelle de 2010.

L’effet domino de la crise sur la fiscalité des communes

La crise de 2008 a fortement touché la fiscalité de communes qui s’étaient endettées: certaines avaient souscrit à des prêts indexés sur les taux de change et les indicateurs boursiers, qui ont beaucoup fluctué après cette date. Pour Thierry Schmitt, avocat fiscaliste et maître de conférences à l’université de Strasbourg, “on est passé à deux doigts d’un effondrement complet de notre système financier”.  De nombreuses communes ont augmenté les taxes locales pour pouvoir rembourser rapidement des prêts dont la valeur avait doublé, voire triplé.

Après 2008, le contexte économique a eu un autre effet sur la fiscalité. Les ménages susceptibles d’accéder à la propriété ont cessé d’acheter des biens immobiliers. Les droits de mutation, taxe perçue pour les communes à chaque acte d’achat ou de vente, ont alors chuté brusquement.

Infographie: Sarah Bos et Léa Picard

Cet effrondrement du marché de l’immobilier a engendré indirectement une hausse des taux de la taxe foncière. La valeur locative (qui est le loyer potentiel d’un logement s’il était loué), sur laquelle sont calculées la taxe foncière et la taxe d’habitation, a été réévaluée pour compenser un marché immobilier en pleine crise. Selon une étude de l’Union nationale de la propriété immobilière (UNPI) publiée en 2015, la valeur locative a ainsi connu une hausse moyenne de 9.65% entre 2008 et 2013En Moselle, la ville de Metz a augmenté en 2009 la taxe d’habitation de 4% et la taxe foncière sur le bâti de 7%, afin d’assainir ses finances. Ses impôts locaux n’avaient pas augmenté depuis 2001.

La réforme de 2010, un fort impact sur la taxe foncière

Infographie: Sarah Bos et Léa Picard

Ces courbes représentent la médiane du Grand-Est et de quatre départements dont l'augmentation de la taxe foncière en 2010 est particulièrement visible en comparaison au reste de la grande région. Entre 2010 et 2011, la taxe foncière augmente dans tous les départements, et jusqu'à deux points dans la Meuse, la Meurthe-et-Moselle, les Ardennes et la Haute-Marne. Les années précédentes, elle augmentait de moins d'un point.

Avec la crise, la réforme de 2010 de la taxe professionnelle est l’autre événement à l’origine de cette hausse. Créée par la loi du 29 juillet 1975, la taxe professionnelle, levée auprès des entreprises, était le seul impôt local qui ne concernait pas les ménages. Elle était perçue au profit des communes, des départements et des régions. Elle représentait la moitié des ressources fiscales des collectivités territoriales, avant d’être supprimée en 2010 sous l’impulsion du président Nicolas Sarkozy.

Mais, selon l’avocat fiscaliste Thierry Schmitt, “comme les dotations de l’Etat n’ont pas augmenté, voire baissé, il fallait bien que les collectivités trouvent des ressources ailleurs. En conséquence, elles ont augmenté les taxes sur les ménages, et notamment la taxe foncière. L'alternative aurait été de diminuer les dépenses publiques, mais ce n'était pas à l'ordre du jour en 2010.”

Des taux de taxes élevés ne signifient cependant pas des recettes élevées. C’est le cas dans les départements ruraux, comme les Ardennes, la Haute-Marne ou l’Aube. D'autant plus que les exploitations agricoles sont exonérées à hauteur de 20 % de la taxe foncière, ce qui, selon un rapport de 2009 du Conseil des prélèvements obligatoires, affaiblit encore plus les finances d'un département rural.

Simone Ahrweiler, Sarah Bos, Guilhem Dubernet, Fanny Guiné, Léa Picard, Nina Zeindlmeier.

Crédit photo : Images Money/Flickr

 

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