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Le coronavirus étant toujours présent, les rencontres physiques demeurent potentiellement dangereuses. Les rapports à la séduction, aux rendez-vous galants et à la sexualité se réinventent. 

Comment se déroule un rencard post-confinement ? Pour Alice*, 34 ans, le premier rendez-vous avec un homme rencontré via l’application Fruitz était masqué : “C'était étrange, mais je me suis sentie à l'aise. Le masque agissait comme un filtre : on était encore un peu planqué.” Porter un masque, des gants, respecter un mètre de distance… Des mesures qui ne sont naturelles pour personne. Théo*, qui a rencontré des femmes pendant et après le confinement, ressent lui de la frustration. “La situation sanitaire modifie les rapports de séduction. Avec un masque, on ne peut pas voir le sourire de la personne”, détaille le jeune homme de 26 ans.

La principale difficulté réside peut-être dans l'opposition entre envie de contact physique et distanciation sociale. “Une relation sans se tenir, sans se rouler des pelles, ce n’est pas une relation”, affirme Sylvain*, 41 ans. Arthur, 33 ans, qui était dans un couple ouvert au début du confinement, a dû trancher le dilemme : “On était tous les deux assez flippés par le Covid, mais c'était un risque à prendre. À un moment, lui faire un câlin était plus important que la peur du virus.”

© Juliette Mylle

Avoir confiance avant de se voir

Pour d’autres, comme Valentin*, la peur de contaminer des personnes fragiles a pris le pas sur le contact physique. “À 39 ans, je rencontre principalement des femmes qui ont des enfants. Avoir des contacts, c'est mettre en danger toute une famille”, explique-t-il. L’unique rendez-vous qu'il a eu post-confinement s'est déroulé sans masque, mais avec un mètre de distance. “On s'est fait la bise, naturellement, puis on s'est dit ‘merde, on a oublié il fallait pas !’”, avoue le Strasbourgeois.

Les bienfaits du contact physique

Bien que certains aient continué de se rencontrer, Nadia Mariott, sexologue dans le Bas-Rhin, considère que le contexte sanitaire a un effet profondément négatif sur les rapports de séduction : “Il y a quelque chose de délétère, d'angoissant lié à la défiance de l'autre et au danger de mort. Les personnes célibataires qui essayent de rencontrer quelqu'un sont désespérées.” Avoir confiance en l’autre devient donc crucial avant le premier rendez-vous. Clara*, 22 ans, a rencontré deux personnes depuis le déconfinement, et a eu des relations sexuelles avec l’une d’entre elles : “On n’avait pas de gants, pas de masque mais on en avait parlé avant. Ça me semblait un peu normal puisque déconfinement ne veut pas dire disparition du virus.”

Des distances malgré l'attirance ?

Théo n’a eu de relations sexuelles qu’au sein de son cercle de connaissances. “J’ai eu le coronavirus. Mais les filles que j’ai vues, c’était des gens que je connaissais déjà, avec qui j’ai un rapport de confiance. Je les avais donc prévenus et ils ont tout de même souhaité qu’on se retrouve.” Avoir une relation sexuelle avec une personne inconnue lui poserait problème. Une solution qu’il se dit cependant prêt à envisager, à condition de discuter d’abord sur internet pour être sûr de son partenaire. Comme pour une maladie sexuellement transmissible. “C’est un peu comme une MST, on peut l’avoir, on peut la filer à d’autres”, estime Valentin.

Arthur* est totalement en désaccord avec cette vision : “Un virus comme ça, c’est silencieux. Que ce soit avec la nana avec qui j’étais avant le confinement ou que ce soit avec quelqu’un d’autre, le potentiel de risque est le même.” Un virus volatile est plus facile à attraper qu’une MST. 

Les discussions préliminaires aussi sont différentes maintenant que le coronavirus bouleverse notre intimité. “Est-ce que tu as des symptômes, es-tu en bonne santé, est-ce que tu veux que je porte un masque ?” Les échanges avant le premier rendez-vous d’Alice ont été étranges : “C’était marrant parce que dans nos discussions, on se disait ‘est-ce qu’on doit faire une sérologie avant d’enlever le masque ?’” Ce qui était en jeu avec le préservatif hier vaut aujourd’hui pour un baiser.

Léo Bensimon
Juliette Mylle

*Les prénoms ont été modifiés

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