Le chef pâtissier de la Scène, le restaurant de l’hôtel Prince de Galles à Paris, était mercredi 6 février à la librairie Kléber, pour un goûter-dédicace. Avec son «Carnet de recettes qui déchirent», le jeune prodige de 33 ans propose des desserts simples, réussis à tous les coups.
Dans les rayons de la librairie Kléber, mercredi 6 février, une douce odeur de crêpe flotte dans l’air. Nicolas Paciello, chef pâtissier de la Scène, le restaurant de l’hôtel Prince de Galles, propose un «goûter-dédicace». «Je trouve ça cool, ça capte les gens, s’enthousiasme le trentenaire. Une dédicace sans rien, c’est chiant.»
Un parcours sans faute
Tombé dans les gâteaux comme d’autres dans la potion magique, il découvre le métier dans la pâtisserie Christophe, à Forbach, dont il est originaire. «J’y passais toutes mes vacances. J’y allais de moi-même, parce que ça me plaisait.»
Après un CAP, une mention chocolatier et un brevet technique des métiers (BTM), il quitte la Lorraine pour la capitale sur un quasi coup de tête. «Une de mes profs avait un contact chez Fauchon. Elle m’a proposé de nous mettre en relation. Ils cherchaient du monde, j’ai accepté. Deux jours après je montais pour la première fois à Paris. Trois semaines plus tard je décrochais un CDI.»
Et les contrats prestigieux s’enchaînent. Après six ans chez Fauchon, Nicolas Paciello devient sous-chef à l’hôtel Crillon, puis rejoint Cyril Lignac lors du lancement de sa boutique. «J’y suis resté un an, c’était très intense. Dès le jour de l’ouverture, on a été assaillis de commandes, de monde. On était constamment sur les chapeaux de roues.»
Aujourd’hui, à presque 33 ans, il est chef pâtissier du Prince de Galles à Paris, dont le restaurant, La Scène, a obtenu cette année sa deuxième étoile au Michelin. Cheveux et barbe roux taillés au poil, tatouage de smiley discret au poignet, Nicolas Paciello parle avec aisance et passion de son métier.
«Je m’éclate vraiment, assure t’il le sourire aux lèvres. Je suis davantage dans la création que dans la conception. Du coup je me fixe mes propres objectifs. Quand on est créateur ça n’arrête jamais, on cherche des choses qui n’existent pas.»
Le chef s’inspire de tout ce qui l’entoure. «Bien sûr je pars souvent d’une saveur, mais ça peut être aussi une affiche marrante que je vais garder en tête. Tout m’inspire.»
Une pâtisserie proche des gens
Résultat, la carte du Prince de Galles est éclectique: tarte chocolat sarrasin ou «vanille d’origine» pour le dessert, pancakes ou cake marbré pour le petit-déjeuner.
«C’est une recette de famille, confie Céline Buch-Fortin. Celle de sa mère.» Commis pendant un mois en juillet dernier, la Strasbourgeoise de 20 ans n’a pas pu résister à venir saluer son ancien mentor.
«C’est un nounours, il est adorable, dit-elle. C’est quelqu’un de très à l’écoute, il aime transmettre.» La jeune femme, passée chez le célèbre pâtissier-chocolatier Pierre Hermé, va bientôt se lancer aux Etats-Unis. Une confiance en elle qu’elle a acquise aux côtés de Nicolas Paciello. «J’ai gagné en autonomie grâce à ce poste. Et puis, j’ai appris le contact avec les gens, que ce soit les équipes ou les clients. Je pense qu’il va devenir un très grand chef.»
Le chef pâtissier Nicolas Paciello, à gauche, avec une de ses fidèle lectrices. /Marie Dédéban.
Ce sens de l’humain est une des principales qualités du chef pâtissier, à en croire son tout nouveau sous-chef, Pierre Guidini. Le toulousain a rejoint l’équipe du Prince de Galles il y a six mois. «C’est un chef qui se base beaucoup sur le feeling. Il est très attaché à la cohésion de l’équipe, à ce qu’on s’entende tous bien.» Une attention qui donne envie au sous-chef et ses collègues de se dépasser. «Quand un dessert est commandé au dernier moment, on ne se pose pas de question, on donne tout, on se démène. Il nous inspire, il nous motive.»
Cette sensibilité aux rapports humain se ressent aussi dans sa pâtisserie. «Il cherche ce qui va plaire aux gens, détaille Pierre Gudini. Que ce soit dans son livre ou au restaurant, dans un registre plus gastronomique. Il se met en quatre pour faire plaisir.»
Un carnet de recettes simples mais efficaces
«Bonjour, je pourrais vous poser quelques questions?» Une lectrice a profité de la présence du chef pour venir le rencontrer. Le livre entre les mains, elle fait défiler les pages, couvertes de post-it roses. Dans son tablier d’un blanc immaculé, floqué de son nom, le chef cuisinier prend le temps de l’écouter, de lui expliquer ses techniques et choix d’ingrédients. Il échange avec plaisir, et est ouvert à toutes sortes d’idées: «Si ça marche avec du lait végétal, dites le moi, ça m’intéresse!»
Comme avec son équipe, Nicolas Paciello est connecté à ses clients: son compte Instagram, qui regorge de photos plus alléchantes les unes que les autres, comptabilise 60 000 abonnés.
Pour son «Carnet des recettes qui déchirent», il a même créé une application pour smartphone. «Les gens peuvent prendre les recettes qu’ils testent en photo, et me les envoyer. Comme ça je peux les conseiller.»
Son ouvrage, Nicolas Paciello l’a voulu familial et convivial. Les photos d’illustration ont été d’ailleurs réalisées à Strasbourg, par Line Brusegan, une amie d’enfance.
«Je voulais que les gens puissent avoir des recettes faciles à refaire, le dimanche, en famille, avec des produits qu’on trouve facilement dans le commerce.» Écoulé à 9 000 exemplaires en deux mois, l’ouvrage comprend des astuces pratiques (comment congeler sa pâte à tarte), et 60 recettes: tiramisu, brownies, financier aux framboises... sans oublier les crêpes.
Le prochain défi de ce chef à la créativité débordante? «J’aimerais me concentrer davantage sur le commerce de proximité, les déchets, le bio… Peut être dans un prochain livre.» À moins qu’il ne retente le concours des Meilleurs ouvriers de France, dont il a été finaliste en 2018. «Mais à voir si je n’ai pas d’autres projets à ce moment là, note-t-il. C’est un concours qui exige d’être totalement libre pour s’y consacrer pleinement.» Pour le savoir, rendez-vous donc en 2022. D’ici là, Nicolas Paciello reste une étoile de la pâtisserie française, à suivre de très près.
Marie Dédéban