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05/02/20
12:06

Les Sims, toujours dans le « game »

Le jeu vidéo, qui vient de fêter ses vingt ans, n'a jamais vraiment disparu. Une recette qui fonctionne notamment grâce à la liberté offerte aux joueurs, qui se sont constitués en véritable communauté.

Le jeu de simulation permet de créer une famille, de construire sa maison et de gérer la vie quotidienne. Capture d'écran Electronic Arts

Cinq milliards de dollars de vente et 200 millions d’exemplaires écoulés dans le monde. En vingt ans d’existence, les Sims sont devenus le jeu vidéo sur PC le plus populaire de l’histoire. La simple simulation, dans laquelle le joueur gère les aléas de la vie quotidienne, du règlement des factures aux ruptures difficiles des personnages, a su se faire connaître du grand public. Des chansons, un roman et (presque) un film : la franchise, qui comporte quatre éditions complétées chacune d’une dizaine d’extensions, se popularise au-delà des horizons habituels des jeux vidéos. Et forme un réseau international de joueurs, dont beaucoup de joueuses. Quelques mois après la sortie du premier opus en 2000, Julimo, pseudo sous lequel il est connu au sein de la communauté des Sims, découvre la simulation « J’avais 12 ans à l’époque. J’ai 32 ans aujourd’hui et j’y joue encore, jusqu’à trois heures presque tous les jours. » Lorsque le deuxième volet sort, il fait la connaissance de la communauté de joueurs. « Et de là ça a été un véritable coup de foudre. J'ai rencontré des joueurs que je vois encore régulièrement, ce sont devenus de véritables amis.»

L'utopie simsique

Des Sims sont nés des forums, des sites, des blogs, des chaînes Youtube et des lives streams soit des émissions où l’on joue en direct. On filme la construction de sa maison, on découpe la vie d’une héroïne en dizaines d’épisodes écrits sur son blog, on relève le challenge du moment (comme celui des 100 bébés ou celui de la décennie), on organise même des concours de miss Sims.

Pour Thomas, qui y joue depuis dix ans, le coup de coeur a été les machinimas, sortes de films créés avec les images du jeu. « Je veux raconter des histoires via des vidéos, pour tout le monde. J’ai mis en scène des contes pour les plus petits, j’ai fait des reconstitutions de faits historiques pour les plus âgés. » Selon le blogueur et youtubeur de 24 ans, ces phénomènes sont liés au concept même du jeu : « Les Sims montrent une utopie, une vie idéale. Il y a très peu de violence. On peut choisir d’être riche par exemple. C’est aussi très gentil comme jeu. Il n’y a pas de racisme ou d’homophobie. »

Les internautes racontent des histoires à partir de Sims, parfois inspirées de films comme ici pour la Forme de l'Eau.

C’est le pari de l’inclusivité, pris par la franchise dès 2000. Les Sims deviennent le premier jeu vidéo à permettre des relations entre personnes de même sexe. Le mariage et l’adoption pour les personnes homosexuelles sont possibles dès le premier opus. Dans les derniers épisodes, les vêtements disponibles sont non-genrés. Des traditions qui ne sont pas occidentales peuvent être célébrées comme le jour des morts mexicains ou le diwali indien. Plusieurs hijab sont disponibles pour les personnes musulmanes. On essaie de représenter la plus large partie de la communauté des joueurs. « Les personnes transgenres, les différentes cultures, les différentes religions... C’est un jeu qui permet de voir le monde différemment, se réjouit Julimo. Grâce aux Sims j'ai réussi à accepter mon homosexualité. Le mariage gay n'existait pas à l'époque et je refusais d’admettre ma différence. En jouant avec un couple gay, cela m'a permis de savoir que je n'étais pas seul.»

Le jeu dangereux des mods

D’autres attributs ont été créés au nom de l’inclusion. Des vergetures, de la cellulite ou le viltigo (une maladie qui provoque la dépigmentation de la peau) pour les propriétés physiques ; de l’autisme ou de l’anxiété sociale pour les maladies mentales. Ce sont les joueurs eux-mêmes qui ont ajouté ces options, dans ce qu’on appelle des mods. Le jeu présente une infinie possibilité de personnaliser les contenus et donc de modifier le cours de sa partie via les mods. Créer une nouvelle coupe de cheveux, dessiner des robes de grandes maisons de mode ou concevoir des meubles aux lignes suédoises : des joueurs aguerris codent de nouveaux contenus, joueurs qu’on appelle « moddeurs ». Partagé sur des sites dédiés, les mods sont accessibles à tous les internautes.

Certains internautes vont jusqu'à recréer le style des stars, comme ici celui de la chanteuse Billie Eilish. Création par Leah Lilith / The Sims Resource

Mais jouer à Dieu peut devenir dangereux. Certaines créations s’avèrent beaucoup moins innocentes que de simples coiffures. Certains mods proposent des contenus inappropriés voire violents : alcoolisme, pornographie, prostitutions, relations incestueuses, bébés tueurs, serial killers. « On veut tous un jeu qui ressemble à la réalité, admet Julimo. Mais parfois, c’est trop réaliste, comme pour l’ajout des armes à feu par exemple. Il y a trop de violence dans les mods. Sachant que les jeunes en voient déjà assez.» Surtout quand les jeu est considéré comme une activité sécurisée par les parents des utilisateurs les plus jeunes, car non violent dans ses fonctionnalités de base. Le blockbuster de Electronic Arts est vu comme un jeu positif, opposition faite aux simulations de guerre. Manon, alias Cassielle dans la communauté des Sims, est moins tranchée : « Avoir la possibilité d’agrémenter le jeu me paraît positif. Les mods adultes me dérangent personnellement mais tant qu’on ne me l’impose pas, ça me va. La liberté qui leur est liée est importante. » Le jeu tolère les contenus personnalisés, au nom de la création, mais se dédouane de leur teneur.

L'un des mods permet aux personnages de devenir tueur en série. Capture d'écran Kilira Cooper / Youtube

Car les mods permettent aussi de faire patienter les joueurs. Les Sims 5 est attendu depuis quelques mois, voire des années. Les nouvelles se font rares et confuses. Les utilisateurs, déjà déçus du quatrième opus, attendent une nouvelle version innovante. Pour Thomas, la franchise touche à sa fin : « Il y a une lassitude de la part des joueurs car il y a très peu de nouveauté. Même chez ceux fidèles depuis vingt ans. » Pour Manon, il n’est pas vraiment question de déclin : « Beaucoup de types de personnes s’y retrouvent. Il y a ceux plutôt axés sur les challenges de la vie, ceux qui sont constructeurs dans l’âme, ou ceux qui veulent tout simplement créer des Sims uniques. Sans oublier que c’est une source d’histoires assez incroyable. Les joueurs viennent passer une heure de détente, ou sont de grands passionnés. Et puis sans concurrence, il faut bien l’avouer, c’est simple de perdurer dans son domaine. »

La concurrence, justement, serait en passe d’entrer sur le marché. Le jeu indépendant Paralives, dont la date de sortie n’a pas encore été annoncée, est considéré comme la seule alternative à l’empire simsique créé par Electronic Arts.

Judith Barbe

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