Depuis une quinzaine de jours, l'ouest de la France a été balayé six fois par les vents. La plus récente, Ulla, confirme une série de phénomènes exceptionnels qui inquiètent les climatologues et remettent en question l'aménagement du littoral breton.
Intervention des pompiers à Quimperlé (Finistère) le 7 février, après la montée des eaux suite au passage de Qumaira. Source : Frank Perry/AFP.
Petra, Qumaira, Ruth, Stéphanie, Tini puis enfin Ulla : les noms se mutltiplient au rythme des tempêtes qui s'abattent sur la Bretagne. Six depuis le début du mois de février, soit une tous les deux jours. Mais la série avait commencé dès le mois de décembre avec la tempête Dirk.
La dernière en date, Ulla, qui a frappé l'ouest de la France dans la nuit du 14 au 15 février, a fait un mort et de nombreux dégâts matériels. Si Météo France a levé lundi après-midi sa vigilance orange "inondations" pour l'Ille-et-Vilaine, le Morbihan et le Finistère, 5000 personnes sont encore privées d'électricité dans la région et le trafic routier et ferroviaire reste perturbé ce lundi.
Le littoral en danger
Outre les dégâts provoqués sur les commerces et les habitations, ce sont aussi les côtes bretonnes qui ont souffert. Certaines dunes ont été endommagées et les communes se demandent comment les protéger. Mais protéger le littoral, c'est aussi revoir l'aménagement du territoire côtier. En 20 ans, la surface des sols naturels transformés en zones d'habitations et d'activités a doublé, selon le site d'information de l'association Bretagne durable et solidaire. Or, construire des routes et des maisons a un coût : les revêtements urbains favorisent le ruissellement de l'eau... et donc les inondations.
L'Etat du littoral après le passage d'Ulla. Source : France Télévisions.
Cette série de tempêtes à répétition inquiète aussi les experts du climat. Cet hiver pluvieux "est vraiment exceptionnel dans la durée, reconnaît Jean-Jouzel, climatologue et co-lauréat du prix Nobel de la paix avec le Groupe inter-gouvernemental sur le climat (Giec), mais peut-être pas dans l'intensité des tempêtes. Nous n'avons pas de tempête de type de celle de 1999. Mais dans la durée, dans les quantités de précipitations, c'est vraiment exceptionnel".
La faute au changement climatique ?
Autre élément d'inquiétude avancé par les scientifiques : le lien entre la douceur de l'hiver et ses précipitations à répétition. Un phénomène qui risque de se répéter à l'avenir : "Même s'il n'y a pas plus de tempêtes, il risque d'y avoir plus de précipitations l'hiver. L'élévation du niveau de la mer n'aide pas non plus l'écoulement des eaux. Donc tout cela fait que ces inondations à répétition sont effectivement plutôt à craindre dans le futur."
Mais si l'hiver est plutôt doux et pluvieux en Europe, les Américains, eux, grelottent sur la côte est des États-Unis. Tandis que la Californie et l'Australie connaissent sécheresse et canicule.
Un contraste qui, selon Jean-Jouzel, empêche de mettre en cause le réchauffement de la planète. "On ne peux pas relier cette douceur exceptionnelle au réchauffement climatique. Mais ça nous montre quand même la fragilité de nos systèmes par rapport à ces événements climatiques, prévient le spécialiste, et cette crainte que dans un climat effectivement plus chaud, des extrêmes de ce type se multiplient."
Gaëlle Henry