L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’environnement annonce avoir engagé une procédure pour retirer ce pesticide du marché, dans un rapport publié ce mercredi. La région alsacienne, grande consommatrice, s'inquiète pour la qualité de ses eaux.
Le S-métolachlore est surtout utilisé pour la culture du maïs © CC BY / aqua.mech
Avec 1.946 tonnes par an, le S-métolachlore est un mastodonte, l’un des pesticides les plus courants sur le sol français. Ce désherbant agricole, principalement utilisé pour la culture du maïs, est pourtant plus que jamais dans le viseur de l’Agence nationale de la sécurité sanitaire de l’environnement (Anses).
Si, depuis 2021, l’agence a introduit des restrictions dans les autorisations de mise sur le marché des produits le contenant, de récents contrôles dans les eaux souterraines ont montré que la concentration de S-métolachlore et de ses métabolites, les molécules de dégradation du pesticide, présente « un risque de contamination ».
Des décisions qui évoluent
Cette décision de l’Anses peut surprendre au premier abord. En effet, en septembre 2022, cette dernière déclarait les métabolites du métolachlore comme « non-pertinents ». En d’autres termes, elle les considérait comme n’engendrant pas de risque pour la santé humaine. Leur concentration autorisée avait alors augmenté, passant de 0,1 mg/l à 0,9 mg/l. Aujourd’hui pourtant, ce seuil de 0,9 mg/l est dépassé dans trop d’endroits, ce qui conduit l’Anses à vouloir interdire le métolachlore.
Ce n’est pas un changement d’avis, cela « reflète simplement de l’évolution de connaissance l’Anses », explique Katia Schmitzberger, qui dirige l’équipe chargée de la surveillance des eaux souterraines et de surface à l’agence de l’eau Rhin-Meuse.
Situation alsacienne
Avec une production de maïs qui représente 36 % de la filière céréalière, les agriculteurs alsaciens risquent d’être fortement touchés par cette restriction. Les précédentes interdictions de pesticides auraient déjà entre autres participé à l’augmentation des ventes de S-métolachlore dans la région. Ainsi, entre 2008 et 2019, elles seraient passées de 50 à 100 tonnes, selon la Chambre d’agriculture d’Alsace.
Difficile pourtant pour Katia Schmitzberger d’estimer si la situation des eaux alsaciennes se dégrade ou non. « À chaque fois qu’on interdit une molécule, une autre est utilisée et pose problème », explique-t-elle. Ce qui est sûr, c’est que « dans les cours d’eau, on note une amélioration globale sur les macros-polluants [NDLR : comme excréments humains et animaux]. En ce qui concerne les substances chimiques, on en retrouve de plus en plus. Mais il faut prendre en compte le fait qu’ il y a des progrès scientifiques et une prise de conscience du problème. »
En Alsace, on retrouverait encore selon cette spécialiste des traces d’atrazine ou encore d’alachlore, deux pesticides anciennement utilisés pour la culture du maïs, pourtant interdits respectivement depuis 2003 et 2008.
Camille Gagne Chabrol
Édité par Quentin Celet