Le tribunal administratif a annoncé lundi 3 février l'évacuation du campement de la Montagne-Verte. En plein hiver, la décision laisse associations et personnes exilées dans le flou quant aux possibilités de relogement dans des hébergements d’urgence déjà saturés.
Près de 150 personnes vivent dans le campement de la Montagne-Verte. Photo Gabrielle Meton
Sur le campement du parc Eugène Imbs, la décision d’évacuation rendue par le tribunal administratif n’a pas provoqué de mouvement de départ. Les tentes vertes et grises sont toujours alignées sur la pelouse boueuse, coincées entre l’autoroute et la route de Schirmeck. La préfecture a donné cinq jours aux près 150 personnes, dont une trentaine d’enfants, vivant sous les tentes pour quitter les lieux.
"Partir ? Pour aller où ?", demande Ibraihmi Florenja, installée depuis quatre mois. À l’idée d’une possibilité de relogement prévu par la préfecture, Ibrahimi esquisse une moue dubitative. "Je ne sais pas si j’y crois vraiment" dit la mère de famille albanaise. "Les numéros de téléphone, la police… on connait tout ça", renchérit Azimi, un autre habitant du camp.
Des centres d'hébergements saturés
Venue apporter de la literie et des couvertures aux personnes exilées, Madeleine Girodot a vu croître le nombre de tentes de manière exponentielle ces dernières semaines. "Cette évacuation est d’une hypocrisie sans nom", tempête l’habitante du quartier. "Ce n’est pas normal, quand on voit le nombre de maisons vides ici…", ajoute la retraitée en pointant du doigt les bâtiments aux carreaux de fenêtres cassées et aux façades décrépies de la route de Schirmeck, à deux pas du campement.
"Les autorités doivent démanteler en proposant des solutions", martèle Sabine Carriou, présidente de l’association Les Petites roues. Présente aux côtés des personnes sans-abris de la ville, Sabine Carriou doute de voir l’ensemble des personnes exilées se voir proposer des hébergements suite à l’évacuation du camp. À la mi-janvier, le déclenchement du plan grand froid avait permis l’ouverture de 13 places d’hébergement d’urgence. "Sur les 150 nécessaires pour le campement de la Montagne Verte, c’est symbolique…", commente Sabine Carriou, qui souligne la saturation des centres d’hébergements et le nombre particulièrement important de personnes à la rue cet hiver. "Il faudra sans doute envisager des logements dans d’autres régions, où il reste encore des solutions", estime-t-elle. Un éloignement difficile et angoissant pour les personnes scolarisées, nécessitant un suivi médical régulier ou travaillant à Strasbourg.
Un recensement sur place
Outre les hébergements d’urgence, les familles réfugiées ou en procédure de recours de demandes d’asile peuvent également se voir proposer des places en centre provisoire d’hébergement, hôtel ou centre d’aides au retour. Une décision au "bon vouloir de la préfecture, plus ou moins regardante sur les situations", juge Sabine Carriou. Contactée, la préfecture a indiqué ne pas encore être en mesure d’indiquer les solutions qui seront proposées aux personnes expulsées du camp. "Le recensement des personnes à loger se fait sur place, le jour même de l’évacuation, et dépend des situations administratives de chacun", explique la préfecture du Bas-Rhin. Une procédure fastidieuse qui doit débuter lundi 10 février. Selon l’association des Petites roues, qui prévoit d’être présente aux côtés d’avocats dès le début du recensement, le campement ne devrait pas être entièrement démantelé avant trois à quatre semaines.
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Gabrielle Meton
Édité par Lucie Campoy