La campagne électorale des listes universitaires a été émaillée de mardi 4 à jeudi 6 février de plusieurs altercations sur le campus de l’université de Strasbourg, entre le syndicat d'extrême droite de l’Union nationale inter-universitaire et des organisations étudiantes d’extrême gauche. Webex retrace cette semaine plongée dans une ambiance délétère.
Lundi 3 février, la campagne des élections universitaires bat son plein sur le campus de l’université de Strasbourg. Trois organisations syndicales se disputent les places au conseil d’administration et à la commission universitaire : l’UNI (Union nationale inter-universitaire), l’AES (Alternative étudiante Strasbourg) et l’Afges (Association fédérative générale des étudiants de Strasbourg). “Le premier jour s’est bien passé, relate Samy Amokrane, président de l’UNI. Nous avons reçu un accueil plutôt favorable des étudiants, et les gens sont toujours très heureux de poser des questions sur notre programme.”
Mais rapidement, la tension monte. La présence du syndicat d’extrême droite au sein des locaux de l’université en crispe plus d’un. Dans un communiqué publié le 4 février, trois organisations de gauche et d’extrême gauche appellent au rassemblement contre l’UNI. L’AES, la Fédération syndicale étudiante (FSE) et l’association Solidaires dénoncent la proximité de ses adhérents avec “les partis politiques d’extrême droite pour lesquels ils militent ou avec lesquels ils collaborent : Action Française, Rassemblement National, Reconquête.” Les militants de l’UNI sont notamment accusés de porter des idées “racistes et islamophobes”, et d’avoir proféré des insultes “sexistes et homophobes” à l’encontre de militants d’extrême gauche. Sollicitée sur ce point, l’UNI n’a pas souhaité commenter.
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La police intervient dès mardi sur le campus
Dans la matinée du mardi, des militants de la FSE interpellent des membres de l’UNI alors qu’ils tractent dans le bâtiment du Patio sur le campus. “Vers 9 heures, des camarades sont allés les confronter au Patio pour leur dire de partir de la fac, raconte une membre de la FSE. L’UNI a appelé la police, qui a pris les identités de trois étudiants du FSE. Elle est restée toute la matinée sur le campus.”
La direction de l’université et le syndicat d’extrême droite n'ont pas souhaité nous en dire plus. La présence des forces de l’ordre au sein du campus ne pouvant être autorisée qu’avec l’aval de la direction, les militants des organisations d’extrême gauche reprochent au président de l’université, Michel Deneken, de “protéger les étudiants de l’UNI”.
Une opération pour expulser les étudiants de l’UNI
Mercredi, la tension monte encore d’un cran. La FSE, l’AES, Solidaires, mais aussi le Nouveau parti anticapitaliste (NPA), la Jeune garde antifasciste et Révolution permanente organisent un rassemblement avec une centaine de personnes devant le Patio “contre l’UNI et le fichage des étudiants”.
“Suite à ce blocage justifié par une soi-disant connivence de l’université avec l’extrême droite, nous avons subi une véritable chasse à l’homme au sein du campus”, dénonce Samy Amokrane. Une partie des militants d’extrême gauche se déplace en effet à l’Institut Le Bel pour “courser” les membres de l’UNI et “les dégager du campus”, explique une membre de la FSE.
“Ils ont pris d’assaut notre bureau où certains de nos militants étaient présents, et ont essayé de rentrer de force à l’intérieur, poursuit Samy Amokrane. Lorsque d’autres militants de l’UNI sont venus faire diversion, un couteau a été brandi et des menaces ont été proférées. L’un de nos membres a été blessé à la tête après avoir été fracassé contre le mur.” Une version que le président de l’UNI soutient le jeudi soir lors d’une interview sur CNews. Après s’être réfugiés dans les cantines du Crous, les militants d’extrême droite ont pu quitter l’établissement par des portes dérobées.
Un agent de sécurité et une étudiante blessés
Si elle ne dément pas les pressions exercées sur l’UNI, la FSE réfute l’usage d’une arme blanche et les faits de violence physique : “L’un de nos camarades a commencé à pousser des gens de l’UNI mais on lui a dit de ne pas faire ça. L’agent de sécurité incendie protégeait clairement les étudiants de l’UNI. Il a plaqué un de nos camarades par terre.”
D’après l’UNI, l’agent de sécurité a été blessé lors de son intervention et a fini à l’hôpital. Le syndicat d’extrême droite affirme avoir porté plainte pour coups, blessures, menaces de mort et dégradation de matériel. Contacté, le parquet de Strasbourg n’a pas souhaité confirmer l’information.
Parmi les militants d’extrême gauche présents sur les lieux, une jeune femme aurait été blessée à l’épaule alors qu’elle quittait l’Institut Le Bel : “Au moment de sortir, la sécurité qui tenait la porte la referme deux fois sur moi, raconte l’étudiante qui souhaite rester anonyme. J’ai réussi à passer mais j’en ressors avec une contusion à l’épaule et deux jours d’ITT.”
Webex a pu consulter le certificat attestant de ses blessures. “J’ai porté mon témoignage à la présidence, poursuit-elle. On m’a demandé le contexte sans prendre en considération mon certificat médical et en oubliant qu'un membre du personnel venait d'exercer des violences sur une étudiante.”
Des étudiants de l’UNI barricadés dans les locaux de la présidence
Jeudi 6 février, dernier jour des élections. Une cinquantaine de militants d’extrême gauche se rassemble à midi pour une manifestation sur le campus, en traversant successivement le Patio, la fac de droit et l’Institut Le Bel. La sécurité intervient à nouveau pour empêcher le cortège de pénétrer dans les locaux de l’UNI. La manifestation s’achève vers 13 heures devant la présidence de l’université fermée à clé par la direction, car des militants de l’UNI y sont présents. Sollicitée, la présidence de l’Université de Strasbourg n’a pas encore souhaité s’exprimer publiquement sur le sujet.
Anna Chabaud
Édité par Gustave Pinard