Une femme de 25 ans comparaissait, lundi 9 septembre, devant le tribunal correctionnel de Strasbourg pour avoir agressé 4 personnes dont deux dans le tramway, et trois policiers durant sa garde à vue.
Deux victimes ont été agressée dans le tramway, dimanche 1er septembre./ Photo Alexandre Prévost
Dans le box des prévenus, Nadia M., calme, a le regard fuyant, la voix tremblante, à peine audible. Il faut presque lire sur ses lèvres pour capter les mots qu’elle a du mal à trouver. « Madame a deux visages », c’est ce que retient le ministère public aux vues de l’enchaînement de violences qu’elle a commis le 1er et le 4 septembre, agressant cinq personnes dans le centre ville de Strasbourg, et trois policiers lors de sa garde à vue.
« C’était une façon de tirer l’alarme, de décharger ma colère », tente d’expliquer timidement la femme de 25 ans, sans trouver d’autres justifications à ses emportements. L’alarme, elle l’actionne à plusieurs reprises dimanche matin, lorsqu’elle emprunte le tramway en direction du centre-ville de Strasbourg. Il est huit heures et le conducteur, après lui avoir demandé plusieurs fois d’arrêter de perturber le trajet, réintègre sa cabine. Vingt minutes plus tard, Brendona S., la passagère qui lui fait face, écoute de la musique sur son portable lorsqu’un premier coup part rapidement en direction du téléphone. Nadia M. le fracasse au sol avant de frapper la jeune femme, qui chute. La prévenue quitte la rame, emprunte une autre ligne et réitère l’expérience. La seconde victime est tirée par les cheveux, ses lunettes de soleil, arrachées, sont détruites.
« Ce sont des scènes extrêmement violentes commises sans raison et sans sommation, les deux victimes n’ont pas compris ce qui leur arrivait, l’interpelle le juge. À en lire votre dossier, on a l’impression que vous vouliez être incarcérée... C’est un appel à l’aide ? » À la suite d’une dépression, la prévenue, caissière dans un supermarché, enchaîne les congés maladie puis se voit licenciée fin janvier. Elle vit depuis de son allocation chômage. Une première « crise de panique », survenue en juillet, où Nadia M. agresse physiquement sa mère, la contraint à consulter régulièrement un psychiatre qui lui administre un traitement contre l’anxiété. « Je n’ai plus de famille, plus d’amis. Je reste seule, chez moi, à dormir », évacue la prévenue, lapidaire, pressée par les interrogations du juge.
Mercredi 4 septembre, Nadia M. menace une troisième femme et lui extirpe un paquet de cigarettes puis reprend sa route, quai des Bateliers, où elle porte un coup de poing au visage de sa quatrième victime. Elle pénètre dans un supermarché, brise plusieurs bouteilles et articles alimentaires contre le sol et gifle, mord et griffe le directeur du magasin au visage avant l’arrivée de la police. L’interpellation musclée et accompagnée d’un flot d’insultes, dégénère dans la geôle du commissariat lorsque la jeune femme tente de s’en échapper. Vite rattrapée, elle assène un premier policier de coups de pieds dans les parties génitales, qui lui vaudront sept jours d’interruption du temps de travail (ITT). Elle se débat ensuite avec un second représentant de l’autorité qui ressortira de cette intervention avec une entorse au pouce et deux jours d’ITT.
Les experts ne semblent pas distinguer d’abolition du discernement ni de pathologie mentale chez Nadia M., seulement un « mal-être ». Ils dressent le portrait d’une jeune femme « impulsive et coléreuse », « provocatrice » et qui n’aime pas les limites, ni les contraintes. « J’ai tendance à tout garder en moi, puis un jour j’explose », veut corriger l’intéressée. « Une attitude anti-sociale mais pas dangereuse », identifient les médecins qui voient « une réinsertion possible mais difficile ».
« Je n’avais jamais été en détention auparavant et je peux dire que ça m’a calmée », reconnaît la prévenue, qui assume ses actes mais n’exprime pas un mot d’excuse, ni de regrets envers ses huit victimes. La jeune femme passera encore trois mois derrière les barreaux, les délibérés imposant huit mois d’emprisonnement dont cinq avec mise à l’épreuve, impliquant obligations de soins et de travail pendant deux ans.
Loana Berbedj