Jeudi 16 février, les eurodéputés ont adopté deux résolutions sur la question de la transparence et l’intégrité dans le processus décisionnel de l’Union européenne. Un vote qui fait suite aux révélations de corruption du « Qatargate » en décembre 2022.
Membre des Verts, Gwendoline Delbos-Corfield est à la tête des résolutions votées ce jeudi au Parlement européen. © Parlement européeen // Philippe Stirnweiss
« VICTOIRE pour l’éthique ! », s’est empressée de tweeter Leïla Chaibi, présidente de la délégation France Insoumise au Parlement européen. Lors de la dernière journée de la session plénière au sein de l’institution strasbourgeoise, les eurodéputés ont voté en masse deux résolutions pour la mise en œuvre de mesures pour renforcer l’intégrité des institutions européennes, dont l’établissement rapide d’un organisme indépendant. « Le Parlement exige que la Commission crée d’ici un mois un organisme d’éthique indépendant », a poursuivi l’eurodéputée de gauche. Un tel organisme serait doté du pouvoir de mener « des enquêtes de sa propre initiative ».
Si ces votes ont été adoptés à une large majorité, c’est qu’ils font suite aux mesures demandées par le Parlement au lendemain des révélations du « Qatargate » en fin d’année dernière. En effet, le 9 décembre 2022, la police belge a révélé au sein même du Parlement un scandale de corruption impliquant notamment le Maroc et le Qatar. Des valises de billets ont été découvertes chez plusieurs eurodéputés, dont Eva Kaili, l’ancienne vice-présidente du Parlement européen. Arrêtés, ils ont été accusés d’avoir reçu de l’argent de ces deux pays pour tenter d’influencer certaines décisions européennes en leur faveur.
Un scandale de corruption inédit
Après ces révélations, les réactions ont été immédiates. Dès le 15 décembre, les députés ont voté quasi-unanimement (541 voix pour sur 546 votants) une résolution exprimant leur « consternation » et proposant 15 mesures, comme la création de commissions spéciales et d'enquête, la nomination d'un vice-président chargé de la lutte contre la corruption, l’interdiction que les représentants du Qatar accèdent au Parlement.
Le vote de ce jeudi est « un vote symbolique », exprime à la sortie de la session Gwendoline Delbos-Corfield du groupe des Verts et qui est à l’origine de la proposition de résolution sur le suivi des mesures demandées par le Parlement pour renforcer l’intégrité des institutions européennes. Une joie qu’elle tempère : « Maintenant au tour de la Commission européenne de faire ses preuves, car une résolution n’a aucune contrainte juridique. » Les députés lui somment d’enclencher la procédure « avant fin mars 2023 », afin de conclure avant la pause estivale.
Pendant toute la semaine de débat parlementaire, les députés ont assuré qu’ils ne feront preuve d’aucune tolérance à l’égard de la corruption sous quelque forme que ce soit. Aussi, le point a été mis sur la nécessité du Parlement à faire preuve d’une unité sans équivoque et d’une véritable détermination à cet égard. « À nous de jouer le jeu, comme en France avec la Haute autorité pour la transparence de la vie publique qui est chargée de promouvoir l’exemplarité de nos responsables publics », ajoute Gwendoline Delbos-Corfield.
Une obligation de transparence pour lutter contre le lobbying
« Les eurodéputés demandent sans cesse de la transparence des chefs d’entreprises, des ONG, des lobbys… nous aussi, on doit montrer patte blanche », s’agace-t-elle contre les quelques élus européens, notamment des Allemands qui refusent de perdre cette liberté.
Au niveau européen, le lobbying est encadré par le registre de transparence. Mais selon la députée des Verts, « il y a une faille », les députés ne sont pas obligés d’inscrire leur activité de lobbying. C’est pour lutter contre l’ingérence étrangère que le Parlement a donc voté pour une « communication d'informations suffisantes au registre de transparence et l’obligation pour les députés, leur personnel et les employés du Parlement de déclarer les réunions de travail avec des diplomates de pays tiers ».
Pour Robertsa Metsola, la présidente du Parlement européen, le renforcement de l’intégrité, l’indépendance et la responsabilité de l’institution strasbourgeoise reste primordiale. À l’ouverture de la session plénière, lundi 13 février, elle déclarait : « Notre Assemblée est l'incarnation de la démocratie parlementaire européenne et j'ai besoin de votre aide pour veiller à ce que les piliers qui la soutiennent soient renforcés. Nous le devons à nos citoyens, à tous ceux qui nous ont précédés et à tous ceux qui nous suivront. » Redorer l’image du Parlement européen auprès des citoyens semblent être une priorité, surtout à l’approche des élections européennes.
Charlotte Thïede
Édité par Loris Rinaldi