La pédagogie pour rassurer
Que faire pour protéger le troisième âge des dangers de la route ? Il faut refaire un peu de pédagogie, pour mettre à jour leur connaissance des règles de conduite. Parfois, ce sont les enfants qui insistent, pour que leurs aînés prennent quelques heures de cours de conduite. « Mais ça reste vraiment anecdotique, relativise Valérie Dry-Ramirez. Le plus souvent, des conférences sont organisées, par les écoles de conduite ou par des sociétés d’assurance, pour que les seniors se rencontrent et discutent de leurs habitudes au volant. »
Depuis 2016, la préfecture du Bas-Rhin a elle aussi mis en place des modules pédagogiques du même acabit, pour inciter les usagers seniors « à adapter leur conduite en fonction de leur vulnérabilité. » En s’appuyant sur un réseau de bénévoles, et avec l’aide d’inspecteurs de la conduite, Antoine Klis organise chaque année trois à quatre modules à Strasbourg et dans tout le département. Au programme de ces réunions : simulations de conduite pour tester les temps de réactions, examens fictifs du code de la route. Tout est fait pour mettre à jour la conduite des plus âgés.
Car les seniors se sentent concernés par leur conduite. « Très souvent ils appréhendent de prendre le volant, explique Valérie Dry-Ramirez, et quand ils se retrouvent dans une situation qu’ils ne maîtrisent pas, ils paniquent. » Alors l’objectif est de les amener à adapter leurs habitudes de conduite à leur rythme de vie : « On essaie par exemple de leur faire comprendre que ça peut être dangereux d’aller chercher son pain ou d’aller chez le boucher à huit heures du matin, parce que c’est l’heure où il y a le plus de monde sur les routes. »
Les personnes âgées ne sont pas vulnérables uniquement lorsqu’ils sont derrière le volant. Les piétons sont aussi largement touchés par la violence routière : un tiers des piétons décédés dans le Bas-Rhin depuis 2016 étaient des seniors.
Matthieu Le Meur
La préfecture tire la sonnette d’alarme : en janvier 2019, cinq seniors ont trouvé la mort en voiture dans le Bas-Rhin. Pour Antoine Klis, coordinateur sécurité routière de la préfecture, « ce chiffre ne révèle pas une augmentation de la mortalité de nos aînés, mais justifie tout de même que l’on continue à communiquer sur le problème. »
Un chiffre « pas surprenant », pour Valérie Dry-Ramirez, coordinatrice pédagogique de l’École de Conduite Française Llerena à Strasbourg. La population française est déjà vieillissante (2,8 de millions de Français avaient plus de 80 ans en 2005. Ils étaient 5,8 millions en 2015). Et les seniors « sont de plus en mobiles », analyse Valérie Dry-Ramirez.
Pour Antoine Klis, « ces usagers sont avant tout des dangers pour eux-mêmes. »
Une population vulnérable
Sur les cinq dernières années, 20% des accidentés corporels sur la route étaient des usagers de plus de 65 ans. « En général ils ne sont pas plus responsables que d’autres, ils sont seulement plus vulnérables », analyse Antoine Klis. Les personnes âgées succombent plus souvent que leurs cadets aux accidents de la route. Elles prennent par exemple plus de médicaments que les autres tranches d’âge, sans toujours prendre en compte les dangers et les effets secondaires qu’ils impliquent.
D’autant qu’avec l’âge, la vue baisse, l’agilité aussi. Et par conséquent le temps de réaction sur la route.
« Et puis, note Valérie Dry-Ramirez, avoir obtenu son permis de conduire il y a cinquante ans n’est pas la même chose que d’obtenir l’examen dans les années 2010. » Pour elle, les seniors sont désorientés : il y a tout simplement beaucoup plus de trafic sur les routes aujourd’hui qu’il y a un demi-siècle. « En général les problèmes surviennent quand les personnes quittent la vie active, car elles commencent alors à moins conduire. »
Un quart des morts sur les routes du Bas-Rhin depuis 2016 a plus de 65 ans. Les seniors sont surreprésentés parmi les accidentés mortels du département. Cette statistique inquiète les autorités et les professionnels de la conduite.
Ce mardi 5 février, tous les dirigeants du G5 Sahel se réunissent à Ouagadougou au Burkina Faso pour y discuter sécurité, terrorisme et financement. Cinq ans après sa création, les défis restent nombreux pour cette organisation aussi fragile qu'indispensable.
Le 16 février 2014 est un jour historique pour le Sahel. Mis à mal par les différents groupes armés qui sévissent dans la région, les présidents de Mauritanie, du Mali, du Tchad, du Niger et du Burkina Faso décident d’unir leur force au sein d'une toute nouvelle coopération régionale, le G5 Sahel. Leur but : lutter contre la menace terroriste, les exactions des groupes armés et le crime organisé. En 2014, l'organisation a été accueillie avec enthousiasme aussi bien de la part des populations que par la scène internationale.
Cinq ans plus tard, lors du Ve Sommet de l'organisation le 5 février 2019, les défis pour le G5 Sahel restent nombreux. Les attaques terroristes persistent et les conflits intercommunautaires s'étendent, comme le rappelle Emmanuel Dupuy, président de l'Institut Prospective et Sécurité en Europe : « Depuis le lancement du G5 Sahel, de nouveaux groupes terroristes se sont implantés. C'est notamment le cas de l’État islamique dans le Grand Sahara (EIGS), fondé dès mai 2015, et du Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans (GSIM), formé en mars 2017. A cela s'ajoute des groupes armées touaregs, peuls ou toubous qui n'hésitent pas à prêter main forte aux djihadistes. »
Face à la progression de la menace terroriste, les dirigeants du G5 Sahel ont décidé en juillet 2017 de renforcer leur coopération, en montant une force militaire conjointe pour lutter contre les groupes armés. Mais sur le terrain, les soldats ont du mal à s’imposer.
« La situation s'est dégradée »
Alors que 14 civils ont péri dans une attaque terroriste, à seulement deux jours du Sommet du G5 Sahel, la crédibilité de l'organisation est mise à mal. D'après Nicolas Normand, ancien ambassadeur au Mali, au Congo et au Sénégal, la situation au Sahel ne s’est pas améliorée depuis sa création. « Au contraire, jamais les cas de violences n'ont été aussi nombreux. Néanmoins, on ne peut pas rejeter la faute sur le G5 Sahel . » Au vu de ses maigres financements, il est difficile pour les cinq pays signataires de remplir correctement leurs missions. Sur les 414 millions d'euros d'aide promis par la communauté internationale, près de 160 millions n'ont pas été versés.
L’absence de ces versements se font durement sentir sur le terrain, puisque les soldats manquent aussi bien d’équipements de protection que de véhicules blindés. Lors de son dernier rapport remis au Conseil de sécurité le 12 novembre 2018, le secrétaire général des Nations unis, Antonio Guterres a dénoncé « de fortes lacunes en matière de formation et de capacités, l’absence de bases opérationnelles sûres et fortifiées et le manques de fonds »
Selon le dernier rapport de l'ONU, on compte depuis 2014 au Burkina Faso près de 285 morts dus aux terroristes. Au Mali, depuis janvier 2018, 200 attaques terroristes ont été recensées, touchant aussi bien des militaires que des civils.
L'Etat doit s'imposer ou les djihadistes le feront
Si les difficultés de G5 Sahel sont nombreuses, l'organisation reste indispensable pour Nicolas Normand, car des opérations militaires, comme la mission française Barkhane, ou des ONG étrangères ne peuvent résoudre les problèmes de fond qui minent les pays. « Il faut que les États gagnent en crédibilité auprès des populations, qu'ils recréent du lien social. Engager des instituteurs, des médecins, des juges, des policiers. Car si ce n'est pas l’État qui remplit ce rôle, ce seront les groupes djihadistes qui le feront. Avec leur propre philosophie ».
Tout cela a bien sûr un coup conséquent. Selon Nicolas Normand, si la communauté internationale délaisse le Sahel et ne fournit pas les financements nécessaires aux acteurs adéquats, la situation dans la région risque de devenir rapidement hors de contrôle. Avec pour pire scénario : la chute des Etats de droit et l’établissement d’un nouvel Etat islamique au Sahel.
Lucie Duboua-lorsch