Huit années d'études pour devenir compagnon
Pour devenir officiellement Compagnon, il faut aligner jusqu’à huit années d’études, enchaîner les alternances dans différentes entreprises de l’Hexagone - le fameux “tour de France”. Il faut aussi réaliser un chef d’œuvre, une réalisation complexe preuve de son savoir-faire. Un parcours qui s’achève par la transmission, indique Florian Guehl : “Un formateur a été apprenti, pareil pour un directeur.” Un moyen pour “compléter son cercle vertueux”. Tout le monde peut tenter de décrocher le graal mais seulement “4 % à 6 % des jeunes qui entrent dans la structure deviennent compagnons”, dévoile t-il.
Beaucoup se contentent de la formation de base, cet entre-soi ne faisant pas l’unanimité : “Pour rentrer sur le tour de France, il faut se faire “adopter”, rien que ce terme me déplaît!” Matéo* est chez les Compagnons depuis trois ans en charpenterie mais ne souhaite pas devenir l’un des leurs :“Pour moi, c’est un peu comme une secte.”
“Soit tu bouges, soit tu crèves”
Et cette insatisfaction est générale. La lenteur des feux de signalisation y est pour beaucoup. Quatre minutes entre chaque passage au vert pour les sept feux piétons. Trois minutes pour celui dédié aux cyclistes, qui brûlent d’impatience. Les coups de klaxons fusent de tout côté ; voitures, bus, tram, tout le monde s’en donne à cœur joie.
Selon les résidents et commerçants, cette hausse de l’insécurité a débuté avec la réquisition de l'Hôtel Pax (aujourd’hui le Clap Clap, ndlr) en mars 2020. Des personnes précaires et des toxicomanes y ont été accueillis par dizaines. Deal, alcoolisme sur la voie publique, agressions à l’arme blanche, braquages ou encore nuisances sonores ont rythmé la vie du Faubourg durant cette période particulière. Confinés chez eux, les riverains ont assisté impuissants à la montée des incivilités et violences.
“Dire qu’il n’y avait rien avant mars 2020, ce n’est pas vrai. Il y a eu un glissement du type de violences”, assure une vendeuse, résidente du quartier. Un homme en état d’ébriété, hébergé au Pax, a agressé d’autres personnes avec un sabre. Cette insécurité a “perduré, même après le confinement”, confie le président de l’association des commerçants de la rue, Geoffroy Lebold. Les citoyens se sont régulièrement plaints de la présence de squatteurs et de trafiquants. Ces derniers se seraient sédentarisés, pérennisant une atmosphère tendue. “On doit s’excuser de vivre dans le quartier”, déplore un riverain agacé.
Selon Brigitte Breuil, présidente de la Confédération nationale du logement du Bas-Rhin, cette augmentation des prix du neuf s’explique par “la hausse des coûts des matières premières et le respect des normes environnementales”. Dans son rapport de 2021, l’Observatoire local des loyers du Bas-Rhin ajoute que “l’évolution (des prix) s’explique également par la rentabilité des petits logements pour les promoteurs et les bailleurs avec une production majoritaire de logements collectifs petits et intermédiaires”. Ces biens, plus chers à la location, sont également plus chers à l’achat.
Un moyen de faire baisser les prix dans ce contexte de bulle économique serait de “proposer une offre plus importante de logement”, souligne Jacques Becker. Il ne voit qu’une solution : “L’offre de logements est trop faible, il faut construire plus et construire plus haut.” Une option envisageable mais qui nécessiterait une modification du plan local d’urbanisme qui régit la hauteur du foncier.
Célestin de Séguier et Loïc Germain
*Contacté, le promoteur n'a pas souhaité répondre à nos questions.