L'état de santé d'Hugo Chavez s'est aggravé. C'est ce qu'a déclaré, lundi dans un communiqué, le gouvernement de Caracas. Le président vénézuélien souffre d'une nouvelle et sévère infection pulmonaire, après quasiment trois mois d'absence.
84 jours d'absence. 84 jours de vide pour certains. 84 jours de doute pour d'autres. Depuis deux mois et demi, les Vénézuéliens attendent une apparition publique de leur président réélu en octobre. Dernière image d'Hugo Chavez : une photo sur son lit d'hôpital en compagnie de ses deux filles, le 15 février. Rien d'autre. Il reste hospitalisé à l'hôpital militaire de Caracas.
Hugo Chavez s'inspire-t-il tant de Fidel Castro au point de gérer sa succession de manière aussi secrète ? Entre 2006 et 2007, le Lider Maximo cubain était resté invisible publiquement pendant près d'un an. Les deux régimes se ressemblent. S'apprécient. S'entraident. Pour autant, il est difficile de pousser la comparaison plus en avant. « Il est important d'avoir conscience que Chavez n'est pas Castro, souligne Eduardo Rios, de l'Observatoire politique de l'Amérique latine et des Caraïbes de Sciences Po. Les deux situations se ressemblent mais il n'y a pas du tout le même traitement de l'info. Le Venezuela est une démocratie, au contraire de Cuba. »
Un bulletin de santé hebdomadaire
Près de sept ans après la prise de recul de Fidel Castro, personne ne sait vraiment ce qu'il s'est passé. On évoque un cancer. Peut-être. Lui-même raconte une « grave maladie ». Sans plus de précision. Rien à voir avec la gestion du cas Chavez. Les proches du président bolivarien communiquent bien plus : un cancer de la zone pelvienne et des complications post-opératoires graves et non-résolues. « Tout cela est écrit, indique Jean Ortiz, maître de conférence à l'Université de Pau. Il y a un bulletin de santé hebdomadaire. On sait même qu'on lui a fait une trachéotomie et qu'il est intubé. En France, nous n'avons jamais eu autant d'informations lors des cancers de Pompidou ou Mitterrand, qui pour le coup, étaient de vrais secrets d'Etat ! »
Le cancer de Chavez traité avec transparence, donc. L'ancien ambassadeur de Panama auprès de l'Organisation des Etats américains (OAE), Guillermo Cochez, a pourtant annoncé en février que le leader socialiste était en état de mort cérébrale depuis le 30 décembre, selon des informateurs proches du gouvernement. « Un coup de bluff, selon Eduardo Rios. Je pense que le jour où Chavez meurt, on le saura dans les heures qui suivent. Il reçoit des visites régulièrement, ils ne pourront pas le cacher. »
La question de la succession
Malade, affaibli, mais toujours président. Le vice-président et successeur désigné, Nicolas Maduro, l'assure : Hugo Chavez continue de donner des consignes au gouvernement et de gérer les dossiers. C'est surtout sa succession qui se prépare. Et qui inquiète son clan. « S'il meurt, ou se retire, il y a aura de nouvelles élections un mois après, explique Eduardo Rios. Les chavistes se demandent quel est le bon timing. Il y a une relève mais il faut le temps qu'elle s'installe. Je pense que ça explique pourquoi Chavez est toujours président sans être physiquement apte à l'être. »
Début 2007, les spéculations sur la mort de Fidel Castro vont bon train. Début 2013, l'ancien numéro un cubain apparaît publiquement aux côtés de son frère à l'Assemblée nationale. Son image s'est même particulièrement améliorée depuis sa fausse mort. « Aujourd'hui, c'est un peu le papy tutélaire, plaisante Jean Ortiz. Un gentil vieux qui écrit ses mémoires. » Hugo Chavez pourrait-il connaître le même sort positif ? « C'est possible, répond Eduardo Rios. Son avenir semble tout de même compromis vu l'état de sa maladie. Mais quoi qu'il arrive, la disparition de Chavez du pouvoir semble inévitable. »
Cela fait 84 jours que Hugo Chavez ne s'est ni exprimé, ni montré publiquement. C'est peut-être, finalement, une manière d'habituer son peuple à vivre sans lui.
Thibaud Métais