Une récente étude publiée fin janvier dans la revue scientifique Science Advances établit un lien clair entre le réchauffement climatique et la prolifération des rats en ville. La raison ? Des températures plus clémentes qui leur permettent de se reproduire toute l'année et les préservent de la mortalité hivernale.
Amsterdam est la cinqième ville où la population de rats augmente le plus rapidement. Infographie Science Advances
Ils vivent dans les égouts, se nourrissent dans les poubelles, et suscitent la peur chez les personnes atteintes de musophobie. Non seulement les rats prolifèrent dans les villes, mais la situation ne devrait pas s'arranger à mesure que le climat se réchauffe, selon une étude publiée fin janvier dans la revue scientifique Science Advances. Les chercheurs ont analysé les signalements et les rapports d'inspection de 16 grandes villes et les ont corrélés aux tendances climatiques. Ces cinquante dernières années, onze d'entre elles ont connu une augmentation du nombre de rats, avec une hausse significative dans les zones urbaines les plus touchées par le réchauffement climatique.
Une plus faible mortalité hivernale et une fécondité accrue
La hausse des températures aurait-elle un impact sur la saison des amours des rats ? C'est ce que suggère l'étude menée par Jonathan Richardson et son équipe. D'après les chercheurs, les périodes estivales plus longues permettent aux femelles d'atteindre leur maturité sexuelle plus tôt et d'avoir davantage de portées, chacune durant un mois et comptant environ huit petits. Par ailleurs, alors que les rats avaient tendance à se reproduire principalement en été et donc à être plus nombreux à cette période, les scientifiques observent désormais, dans certaines grandes villes comme New-York, "un nombre plus élevé de rats lors des inspections extérieures de février et de mars au cours des cinq dernières années par rapport aux années précédentes".
Ce phénomène s'explique par la diminution de la mortalité hivernale chez ces rongeurs, qui limite chaque année leur prolifération. Entre décembre et mars, les rats vivant dans des villes au climat continental sont exposés à des conditions rudes, entraînant des problèmes de santé comme "des réactions de stress", "une hypertrophie des glandes surrénales" ou "une diminution de leur consommation alimentaire", explique l'étude. Des températures supérieures normales de saison réduisent considérablement ces effets.
Le climat mais pas seulement
Si le climat est de plus en plus propice à la prolifération de ces animaux considérés comme nuisibles, d'autres facteurs doivent aussi être pris en considération. "La disponibilité alimentaire est la première explication de la présence accrue des rats dans les villes", tempère Thierry Buronfosse, enseignant-chercheur à VetAgro Sup. Pour ce dernier, l'augmentation de la population urbaine, du volume de déchets et leur mauvaise gestion créent un terrain favorable à la multiplication des rats. "Ils se comportent comme des opportunistes et profitent des déchets de l'homme", poursuit le chercheur.
Autre élément clé pour Thierry Buronfosse : les systèmes d'égout colonisés depuis longtemps par cette espèce. Moderniser ces infrastructures dans le but de les rendre moins accessibles aux rongeurs permettrait de réduire les populations de rats, qui s'y réfugient, s'y protègent du froid et s'y reproduisent. "Dans les milieux urbains, les rats ont le gîte et le couvert !"
Les municipalités ont donc le pouvoir d'agir. Elles peuvent mettre en place une politique pour lutter contre le réchauffement climatique mais aussi aménager leur territoire. Et il s'agit d'un enjeu sanitaire de taille : salmonellose, leptospirose ou encore peste sont autant de maladies transmissibles à l'humain par ces rongeurs.
Athénaïs Cornette
Édité par Nathalie Schneider