Rendu public ce mardi, l’avis du Comité consultatif national d’éthique sur la fin de vie a été suivi par le lancement par Emmanuel Macron de démarches en vue d’un éventuel changement de loi.
En octobre, une convention citoyenne se prononcera sur une possible dépénalisation de "l'aide active à mourir". Cuej.Info / Stephen Andrews.
Vers une légalisation de « l’aide active à mourir » ? Le débat sur la fin de vie est relancé à la suite d’un rapport du Comité consultatif national d’éthique (CCNE), rendu public ce mardi 13 septembre. Dans son avis majoritaire, le Comité s’est prononcé pour une légalisation de l’euthanasie « strictement encadrée ». Huit de ses membres ont émis des doutes.
Emmanuel Macron, qui attendait la publication de l’avis avant de lancer l’une des réformes sociétales de son second quinquennat, a annoncé dans la foulée une convention citoyenne sur le sujet. D’une durée de six mois, elle commencera en octobre, et permettra d’aboutir à un texte de loi en 2023.
Le CCNE, qui se refusait jusqu’ici à modifier la loi Claeys-Leonetti de 2016 sur « le droit à une sédation profonde et continue jusqu’à la mort » pour les patients en soins palliatifs, ouvre désormais d’autres possibilités concernant la fin de vie. Mis en place en juin 2021, le groupe de travail a ainsi abouti à deux recommandations importantes sur « le renforcement des mesures de santé publique dans le domaine des soins palliatifs » ainsi que sur « les exigences éthiques incontournables en cas de dépénalisation de l’aide active à mourir ».
L’importance du rôle de confiance, peu utilisé par les Français
La première recommandation découle du constat d’une « mise en œuvre insuffisante, voire défaillante, des dispositions législatives et réglementaires en vigueur ». En cause, un manque de formation et d’informations sur les soins palliatifs. Ainsi, le CCNE encourage à « valoriser les soins relationnels, l’accompagnement des personnes malades et de leurs proches » tout en mettant en place des « processus délibératifs nécessaires pour aboutir à des décisions justes ».
Le rôle de la personne de confiance, pour les patients qui ne sont plus en capacité d’exprimer leur volonté, est également mis en avant. Un dispositif peu, voire pas assez utilisé, selon l’institution. Il faudrait donc « renforcer le rôle de la personne de confiance, en particulier lors de décisions de limitation ou d’arrêt de traitements » et « inclure la rédaction des directives anticipées dans le processus d’accompagnement des patients qui s’apprêtent à vivre leur fin de vie ».
Selon les membres du Comité, la médecine doit également renouer avec le rapport à la mort, pensé non pas comme un échec, mais bien « une donnée absolue et incontournable de l’existence humaine ».
Des repères éthiques en cas de dépénalisation de l’aide active à mourir
L’un des rapporteurs du CCNE, Alain Claeys, a détaillé le cadre dans lequel cela pourrait intervenir : « Il existe une voie pour une application éthique d’une aide active à mourir, à certaines conditions strictes avec lesquelles il apparaît inacceptable de transiger ». Pour la première fois, le Comité d’éthique envisage une évolution, sans se prononcer sur la loi elle-même. « Si le législateur décide de légiférer », indique le rapport, cela nécessitera des prérequis.
L’accès légal à une assistance au suicide pourrait alors concerner les patients majeurs « atteints de maladies graves et incurables (…) dont le pronostic vital est engagé à moyen terme », et dont les souffrances sont intolérables. Les conditions soulevées sont « la demande, de façon libre, éclairée et réitérée, analysée dans le cadre d’une procédure collégiale », où les médecins pourront bénéficier d’une clause de conscience en cas de refus de leur part.
Pour les autres situations, le CCNE « laisse au législateur (…) la responsabilité de déterminer alors la démarche la plus appropriée ». Le revirement de la part des membres du Comité ne s’est pas fait à l’unanimité. Joint en complément, le texte de réserve soulève des questions liées aux difficultés actuelles du système de santé, et encourage en priorité à ce que l’accès aux soins palliatifs soit uniformisé sur l’ensemble du territoire.
Tara Abeelack
Édité par Matei Danes