Le tribunal administratif de Strasbourg a décidé de maintenir un jeune Hongrois en centre de rétention. Expulsable à tout moment, il est accusé de faits qu'il assure ne pas avoir commis.
Des membres de sa famille et des sympathisants des Enfants de Don Quichotte étaient venus soutenir Jozsef Krasznai, dont la demande d'annulation de placement en centre de rétention a été rejetée. (Photo : Marion Garreau / CUEJ)
Ça se bouscule dans le hall du tribunal administratif de Strasbourg en ce mercredi après-midi. Aux côtés des membres de la famille, une dizaine de militants et sympathisants des Enfants de Don Quichotte venus soutenir Jozsef Krasznai. Ce jeune Rom hongrois de 35 ans était installé sur le campement du collectif depuis 2010. Citoyen ressortissant de l'Union européenne, il est maintenu au centre de rétention de Geispolsheim depuis son arrestation, le vendredi 3 février. Le juge doit statuer sur le prolongement ou non de ce placement. Mais pour le jeune homme, ce qui compte avant tout, c'est que soit reconnue l'usurpation d'identité dont il se dit victime, et sur laquelle repose toute cette affaire.
Vendredi 3 février 2012, Jozsef Krasznai fait l'objet d'un contrôle d'identité dans la rue. N'ayant pas de papier sur lui, il est emmené au poste. Après consultation du fichier, la police constate qu'une personne nommée Jozsef Krasznai est sous le coup d'une obligation de quitter le territoire français, datée du 13 juillet 2011. Ce jour-là, il a été arrêté au volant d'un véhicule, sans permis ni assurance. Jozsef Krasznai ne comprend pas : il n'a jamais commis ces faits et n'a jamais eu connaissance d'une quelconque obligation de quitter la France. Les policiers lui montrent la copie du fichier : mêmes nom, date de naissance et signature, mais la photo est différente. Il est quand même maintenu 24 heures en garde à vue, puis placé au centre de rétention.
Porter plainte
Certains pensent qu'il s'agit en fait de Jozsef Torok, un autre Hongrois âgé d'une dizaine d'années de moins. Renaud Engel, le porte-parole des Don Quichotte à Strasbourg, en est persuadé : « Cette personne, on la connaît. Elle a vécu près de dix jours sur le même campement, juste à côté des caravanes de la famille Krasznai. »
Pour Christine Mengus, l'avocate contactée par le collectif pour défendre Jozsef Krasznai, il serait simple de le prouver. « On prend toujours une photo en garde à vue. Il suffirait de sortir celle du 13 juillet 2011 et on verrait que ce n'est pas mon client », explique-t-elle au président. Mais la préfecture refuse de communiquer le dossier pénal de cette affaire. Selon elle, c'est à Jozsef Krasznai de prouver qu'il ne s'agit pas de lui.
Même l'interprète sollicité aujourd'hui est prêt à en témoigner : « C'était moi l'interprète de Torok en juillet. Je peux témoigner que ce n'était pas Jozsef Krasznai, que c'était une autre personne ce jour-là. » Mais maître Mengus préfère ne pas le faire témoigner ce mercredi. « Vous avez vu comment le juge se comporte ? Il ne l'aurait pas cru... », confie-t-elle en fin de séance. Ce n'est pas sur la question de l'usurpation d'identité que le juge doit statuer aujourd'hui.
Le verdict est rendu en quelques secondes seulement. Sans explications. La demande d'annulation est rejetée : Jozsef Krasznai retourne au centre de rétention. Son avocate est convaincue qu'il sera expulsé très vite. Elle compte faire appel.
Marion Garreau