Depuis la création du concept de « déplacés climatiques » en 2008, il apparaît que les catastrophes continuent de provoquer chaque année la majorité des déplacements. En 2017, la majorité d’entre eux ont eu lieu dans des environnements caractérisés par une grande exposition à des dangers naturels. Certains ont également été favorisés par les activités de l'Homme, qui mettent en péril l'équilibre naturel de leur environnement.
Des trajectoires différentes
Déplacés
Ceux qui ont abandonné leur lieu de résidence à cause d'un désastre naturel ou dû à l'Homme, de conflits ou de persécutions. Ils sont déplacés à l'intérieur de leur propre pays et n'ont pas traversé de frontière nationale.Réfugiés
Ceux qui ont fui les violences, les conflits ou les persécutions dans leur pays. Ils sont trop effrayés ou simplement dans l'incapacité de chercher de l'aide dans leur pays, ou d'y retourner, de peur d'être discriminés.Migrants
Ceux qui ont quitté leur pays d'origine pour vivre ou travailler ailleurs. Leurs motivations peuvent varier, et leur migration peut être volontaire ou forcée.Source : UNHCR / Organisation internationale pour les migrations. Icônes de Gerald Wildmoser et Luis Prado (The Noun Project).
18,8 millions de déplacés climatiques en 2017
Les déplacés climatiques sont les seuls à être comptabilisés précisément par les instances internationales, contrairement aux réfugiés et migrants climatiques. On ne peut donc s’intéresser pour l’instant qu’aux premiers, les autres étant perdus dans la masse des flux migratoires.
De plus, seuls les déplacements provoqués par des catastrophes environnementales soudaines (séismes, tsunamis, inondations, typhons, ouragans…) sont étudiées par les ONG et institutions internationales. Ceux liés à des « catastrophes à évolutions lentes » comme la sécheresse, ou à des catastrophes technologiques comme Fukushima, ne sont pas pris en compte.
Les déplacés climatiques, les nouveaux exilés
Personnes déplacées dans le monde (en millions)
Source : Internal displacement monitoring centre (IDMC)
Alors que les déplacements liés aux conflits ont tendance à augmenter au cours de la dernière décennie, les catastrophes naturelles en génèrent davantage.
En tout, 18,8 millions de nouveaux déplacements internes liés à des désastres ont été enregistrés dans 135 pays et territoires en 2017. Les intempéries ont été à l'origine de la grande majorité : 8,6 millions de déplacés dus aux inondations et 7,5 millions dus aux tempêtes. La Chine, les Philippines, Cuba et les États-Unis ont été les plus touchés, mais les petites îles souffrent également de manière disproportionnée une fois la taille de la population prise en compte.
Les régions d'Asie, premières victimes
Déplacés climatiques par régions du monde en 2016 (en %)
Source : Internal displacement monitoring centre (IDMC)
En 2016, 68% des déplacés climatiques sont originaires d’Asie de l’Est et du Pacifique, soit plus des deux tiers des nouveaux déplacements. Cela représente 16,4 millions de personnes, soit le double de 2015. Cela s’explique par l'exposition du continent, plus exposé aux typhons, tsunamis ou encore aux séismes. L’Asie du Sud, elle, comptait 3,6 millions de nouveaux déplacements, un chiffre en baisse par rapport à 2015.
Ce sont les Philippines qui comptabilisent le plus de déplacés d’Asie de l’Est et du Pacifique :5,9 millions. En cause : les typhons Nock-Ten et Haima en 2016. En Asie du Sud, 67% des nouveaux déplacés (soit 2,4 millions de personnes) étaient originaires d’Inde. Les inondations dues à la mousson les ont majoritairement poussés à quitter leur foyer. Au Sri Lanka, le cyclone Roanu a provoqué des inondations et glissements de terrain dans 22 des 25 districts du pays, obligeant 500 000 personnes à évacuer la zone.
Il est difficile de déterminer avec précision le trajet des déplacés. Certains rejoignent des camps d’hébergement mis en place par les États, mais une majorité préfère se loger chez des amis ou de la famille. Selon l’IDMC, dans plusieurs cas, les déplacés logés dans des camps y sont toujours six mois plus tard. En 2016, c’était notamment le cas au Sri Lanka et aux Philippines.
La grande vulnérabilité des petites îles
Personnes déplacées dans le monde entre 2009 et 2017
En tenant compte de la valeur relative, entre 2009 et 2017, les Philippines, le Chili et Cuba ont été les pays les plus impactés. Ainsi, 32,9 millions de personnes ont été déplacées entre 2009 et 2017 aux Philippines, 4 millions au Chili et 3,2 millions à Cuba. Cela représente plus de 25% de la population de ces pays.
Si l’on s’en tient aux valeurs absolues, c’est la Chine qui arrive en tête avec 55,2 millions de déplacés entre 2009 et 2017, suivie de près par les Philippines, et l’Inde (30,2 millions de déplacés).
Les îles et péninsules paient souvent un plus lourd tribut que les grands pays, puisqu’une majorité de leur population est touchée. En 2017 par exemple, la saison des ouragans a lourdement pesé sur l’économie des Caraïbes : les Etats y ont vu leur développement économique reculer de plusieurs décennies, à l’instar de la République dominicaine.
Les déplacements dus aux catastrophes écologiques, qu’elles soient lentes ou soudaines, tendent à accroître le taux de pauvreté et accentuent la pression migratoire. Les régions les plus touchées, comme les Caraïbes, l’Afrique ou l’Asie du Sud-Est, sont des régions aux flux migratoires déjà denses. Cela explique que dans son rapport 2018 sur les risques mondiaux, le Forum économique mondial considère les phénomènes météorologiques extrêmes comme le risque le plus important pour l’humanité.
De nouvelles recherches suggèrent que les déplacements associés aux catastrophes se poursuivront dans des proportions similaires, voire pires: les impacts du changement climatique sur la fréquence et l'intensité des phénomènes météorologiques extrêmes, et la dégradation de l'environnement pourraient encore accroître le risque de déplacement.