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Une liaison entre Entzheim et le Grand contournement ouest devrait sortir de terre en 2021, à hauteur de Duppigheim. Méconnu des villageois, ce projet suscite des craintes.

“Personne n’est au courant !” Laurent Ulrich, maire de Hangenbieten, fraîchement élu, ne comprend pas comment la création d’une route de trois kilomètres, entre Duppigheim, 1500 habitants, et Entzheim, 2000 âmes, peut être aussi méconnue. Peu, ou pas de communication officielle. Pas de débat. Selon les deux nouveaux maires de Hangenbieten et Duppigheim, une majorité d’habitants n’a pas connaissance de la future liaison entre le Grand contournement ouest (GCO) de Strasbourg et Entzheim. Pourtant, elle va bientôt devenir réalité devant le pas de leurs portes. En octobre 2021, devraient débarquer pelleteuses et bulldozers sur les terres agricoles des communes de Duppigheim, Entzheim et Hangenbieten. “Je me demande même s’ils n’ont pas voulu taire ce projet sachant que le GCO avait déjà beaucoup été débattu”, suspecte Laurent Ulrich.

Un petit frère du GCO

En construction depuis 2018 à quelques encablures d’Entzheim, le GCO et ses 24 kilomètres d’autoroute payante occupent tous les esprits. Mais, derrière ce gros chantier de 500 millions d’euros, se profilent d’autres projets annexes comme le tronçon routier entre Duppigheim et l’aéroport d’Entzheim, bien plus discret que son grand frère. “Tout était bloqué tant que le GCO ne se faisait pas, mais maintenant qu’il est là, tous les vieux projets ressortent des cartons”, affirme Julien Haegy, nouveau premier magistrat de Duppigheim. Déjà évoqué en 2006 dans les schémas du GCO, ce tronçon permettrait de relier la nouvelle autoroute à Entzheim, en longeant la voie de chemin de fer. Cet itinéraire permettrait aux véhicules venant du nord de l’Eurométropole, et passant par l’A35 pour rejoindre Strasbourg, de sortir de l’autoroute au niveau de l’échangeur de Duppigheim pour rejoindre Entzheim, puis Strasbourg.

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© Juliette Fumey

Sous maitrise d’ouvrage du Département du Bas-Rhin, ce projet devrait coûter 5 millions d’euros, dont 1,25 million assuré par la Région Grand Est. “Le reste du financement est encore en négociation”, déclare Cathy Gebhart-Levy, chargée de mission mobilités à l’Eurométropole. Des financements de la part de l’État, du Département et de l’Eurométropole doivent encore être négociés et votés, ce qui explique que ces derniers, n’aient encore pas communiqué sur le projet.

Entzheim soutient la liaison

Seule la mairie de Hangenbieten a présenté la nouvelle route dans son bulletin communal de juillet 2019. À Entzheim, le sujet a été débattu en conseil municipal, en juin 2019. Selon le maire Jean Humann, la liaison routière aura un “effet bénéfique pour la circulation de transit dans Entzheim”. D’ailleurs, “les habitants sont de l’autre côté, la route ne les touchera pas”, justifie Sébastien Laeng, directeur général des services d’Entzheim. Effectivement, elle ne traversera pas le centre du village.

 

Le ton est bien différent dans les deux autres communes. “On ne veut pas nous entendre”, soupire Julien Haegy. Son homologue de Hangenbieten, Laurent Ulrich, renchérit : “On a l’impression qu’on n’était pas en position de force pour négocier alors que nous aussi on va être touchés par le trafic.” Julien Haegy est opposé à la création de cette route. Il en avait d’ailleurs fait un argument de campagne lors des élections municipales à Duppigheim. D’après lui, elle menace le “dernier poumon vert de la commune”. À Hangenbieten, Laurent Ulrich ne s’est pas positionné sur le sujet lors de la campagne électorale, mais aujourd’hui, à la tête de la commune, il considère que cette future “route risque d’être une véritable nuisance”.

Le Skyparc sans réticences

Dans la zone d’activité Skyparc d’Entzheim, qui abrite 70 entreprises, on n’a pas ces réticences. Le nouvel itinéraire permettrait un accès plus rapide depuis l’autoroute. Dans sa brochure, Skyparc se positionne comme une “zone en plein développement qui bénéficie d’une desserte multimodale performante et complète”, notamment grâce à la “connexion au contournement Ouest de Strasbourg, mis en service en 2021”.

Pour la chargée de mission mobilités de l’agglomération strasbourgeoise, Cathy Gebhart-Levy, cette voie a un “seul et unique but : éviter que les gens passent par l’A35 et décharger le trafic des voitures”. La Région, dans un communiqué de presse de juin 2019, met en avant l’accessibilité de l’aéroport et de ses 1,3 million de passagers l’an passé.

À huit minutes de Strasbourg en TER

Autre argument avancé par l’Eurométropole et le Département : la liaison permettrait aussi d’améliorer l’accessibilité ferroviaire avec le TER qui relie Entzheim à Strasbourg en huit minutes tous les quarts d’heure. Grâce à la desserte, des personnes se rendant au travail à Strasbourg pourraient alors déposer leur voiture à la gare d’Entzheim et rejoindre la capitale européenne en train. La gare pourrait alors devenir, comme le souhaite l’Eurométropole, un pôle d’échange multimodal, l’objectif étant de réduire le flot quotidien des voitures vers Strasbourg. Mais cette idée soulève un autre problème : le parking actuel de la gare d’Entzheim compte à peine une centaine de places et est “déjà saturé”, explique le directeur général des services de la mairie. Il faudrait donc construire un parking relais à Entzheim. Encore un autre chantier.

Juliette Fumey

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