Les influenceurs bientôt interdits de faire la promotion de l'alcool sur les réseaux sociaux ? C’est ce que souhaitent les signataires d’une proposition de loi transpartisane, pour ne plus faire des jeunes des cibles publicitaires pour les alcooliers.
D’après Addictions France, 79% des 15-21 ans déclarent une exposition à la publicité pour de l’alcool via internet de façon hebdomadaire ou quotidienne. Photo Pixabay
Interdire “toute publicité et toute propagande” autour de l’alcool sur les réseaux sociaux, “espace d’exposition extra massif des jeunes”, selon Stéphanie Pierre, chargée de plaidoyer pour France Assos Santé. Tel est l’objectif d’une proposition de loi présentée le 5 février à l’Assemblée par les députés Loïc Prud'homme (LFI) et Karine Lebon (GDR) et cosignée par 125 députés de neuf groupes différents dont le ministre de la santé Yannick Neuder.
Deuxième cause de mortalité en France
L’alcool est la deuxième cause de mortalité en France et est particulièrement toxique chez les jeunes. Le cerveau ne se développe complètement qu’à l'âge de 25 ans, “les consommations mêmes ponctuelles peuvent causer de gros troubles, particulièrement chez les jeunes. Le paradoxe, c’est que les derniers chiffres montrent que les jeunes boivent moins souvent, mais ils boivent plus et plus mal”, explique Stéphanie Pierre.
L’une des problématiques étant l’exposition fréquente des jeunes à des publicités ou mises en avant de l'alcool et de sa consommation, notamment via les influenceurs. Selon le site officiel du gouvernement, 30,7 % des jeunes de 17 ans déclarent une exposition à la publicité pour de l’alcool via internet de façon hebdomadaire ou quotidienne. D’après une étude de l’association Addictions France, ce chiffre monte jusqu'à 79 % des 15-21 ans.
Une législation dépassée
"Alors oui, on a la loi Evin (du 10 janvier 1991, qui encadre la vente et la promotion de l'alcool et du tabac, ndlr) mais elle a été rédigée dans les années 1990 où la TV était toute puissante, et elle n'est plus adaptée à notre époque où les jeunes sont accrochés à leurs smartphones (...) et les influenceurs trouvent sans cesse des parades pour contourner l'interdiction de la publicité", justifie la députée Karine Lebon à l’AFP.
La loi de juin 2023 encadrant l'activité des influenceurs n'allait pas assez loin selon les porteurs du texte, puisqu'elle rappelait seulement aux influenceurs qu'ils devaient respecter la loi Evin et faire explicitement mention de leurs collaborations commerciales. Or, ces pratiques promotionnelles auprès des jeunes sont encouragées par les alcooliers d’après Stéphanie Pierre : "Les jeunes sont pour eux un vivier de futurs consommateurs. Ils investissent massivement pour les toucher. Ce n’est pas anodin."
Interdire les pubs près des écoles
Le texte propose également d’interdire ces publicités dans un périmètre de 250 m autour des établissements scolaires et recevant des mineurs (gymnases, terrains de sport...). Cette mesure est proposée après le dépôt d’une plainte "symbolique" contre la RATP de France Assos Santé "contre le matraquage publicitaire sur l’alcool dans le métro, notamment dans des stations desservant des écoles", précise Stéphanie Pierre.
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Par ailleurs, les porteurs de la proposition de loi ne jugent pas assez dissuasive l'amende maximale encourue pour les infractions à la loi Evin — 75 000 euros — et proposent de la relever à 300 000 euros. Le texte pourrait être inscrit à l'ordre du jour et débattu à l’Assemblée nationale lors de la semaine transpartisane du 10 mars.
Tristan Vanuxem
Edité par Lilou Bourgeois