Photo : Neyran Elden
Invitée hier à Strasbourg, Ingrid Betancourt en a profité pour présenter son premier roman « La ligne bleue ». Entre considérations éthiques et réflexions spirituelles, l'ancienne captive des FARC est revenue sur sa détention.
Le dialogue bat son plein lorsqu'on l'interroge : «Qu'est-ce que la liberté ?» Ingrid Betancourt répond ainsi : «Finalement, nous avons toujours le choix. Le choix fondamental de réagir pour devenir ce que l'on veut ». Elle marque un temps et ajoute : « Je crois que c'est la vraie liberté ».
Détenue aux mains des FARC (Forces armées révolutionnaires de Colombie) pendant six ans dans la jungle colombienne, l'ancienne femme politique et nouvelle romancière était invitée hier à Strasbourg, en prologue des Bibliothèques idéales, événement littéraire qui inaugurait lundi sa 7e édition. Devant une salle quasi comble, la franco-colombienne, 54 ans, a tout d'abord parlé de « la vie et des réflexions qui nous aident à vivre ». Puis est revenue sur sa lutte pour sa libération, ses « armes » pour reprendre en main sa liberté : sa plume et sa quête spirituelle.
Son premier roman « La ligne bleue » fait ainsi évoluer des personnages dans un monde réel. Il nous transporte dans la dictature argentine des années 70-80. Et raconte le parcours de Théo et Julia, sympathisants du mouvement des Montoneros, et opposés à la junte militaire. Deux jeunes capturés, torturés par les Escadrons de la mort mais qui réussiront à s’évader.
Celle qui fut prisonnière de 2002 à 2008 revendique un récit fictif mais une histoire qui a nourri un « réalisme magique ». Bien sûr, il y a un peu d'elle-même, une part d'autobiographie dans ce roman. « C'était une réflexion de ce qui était passé dans la jungle », admet-elle, avant de relativiser : « Mais la jungle pour moi maintenant c'est du passé. » Non, ce que souhaitait Ingrid Betancourt « c'était de réfléchir, d'abord à la liberté , à notre choix et à ce que nous faisons de notre passé. ».
Mais comment réussir à se libérer de son passé, à s'affranchir de ses fantômes ? « Il faut faire un travail de fond, dans lequel nous réussissons à nous pardonner de nous même », dit-elle. Elle se veut désormais en paix avec son passé, et invite ses lecteurs à partager les « secrets » de sa résilience. Elle résume cela ainsi : « Quand on regarde sa vie en rétrospective, on se rend comte que les petites choses qu'on a fait dans la vie, comme les petites décisions, ont des effets sur la personne que nous deviendrons dans le futur. »
La romancière aime beaucoup parler de (bons) sentiments. Elle décrit ainsi l'amour comme un « synonyme de vie ». Et, ajoute, dans un élan quasi mystique : « Il faut avoir le courage de son bonheur. » Parce que, conclut-elle, « l'espoir et l'amour sont les conséquences d'une relation constructive avec nous-mêmes. »
Neyran Elden