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Chine, Turquie, Cambodge : le Parlement européen dénonce des atteintes aux droits humains

« C’est la loi de l’offre et de la demande, tout s’achète et tout se vend au pays du parti communiste chinois », s’est insurgé l’eurodéputé Raphaël Glucksmann (S&D, sociaux-démocrates) au sujet des accusations de prélèvement forcé d’organes en Chine. Dans une résolution, les parlementaires ont estimé que cette pratique consistant à prélever des organes sur des prisonniers, notamment sur des adeptes du Falun Gong et la communauté ouïghoure, peut constituer un crime contre l’humanité. À ce titre, ils ont exhorté le gouvernement de Xi Jinping à se saisir du sujet et à autoriser des enquêtes indépendantes. 

Dans deux autres résolutions distinctes adoptées le même jour, le Parlement européen a condamné des atteintes aux droits humains en Turquie et au Cambodge. Ils ont exhorté les autorités turques à libérer Osman Kavala, opposant au régime politique du président Recep Tayyip Erdoğan, condamné à la perpétuité pour « tentative de coup d’État » le 25 avril dernier. S’agissant du Cambodge, les eurodéputés ont adressé leur soutien aux membres de l’opposition victimes d'intimidation et de harcèlement et appelé le gouvernement et les forces de l’ordre à mettre un terme à cette répression.

Cyberattaques : l’UE prend conscience de sa vulnérabilité

Microsoft a répertorié 200 attaques informatiques contre l’Ukraine depuis l’invasion russe le 24 février. Cette guerre hybride interroge les capacités de cyberdéfense de l’Union européenne. Comme l’explique Margarítis Schinás, le vice-président de la Commission, le conflit ne se limite plus au « champ de bataille », il a aussi lieu « sur notre espace numérique, par les cyberattaques et la désinformation ».

Pour limiter la vulnérabilité de l’UE, les parlementaires appellent à renforcer la coopération entre les États membres. L’eurodéputé autrichien Othmar Karas (PPE, droite) réclame que la cyberdéfense devienne une compétence communautaire. Côté socialistes, Javi López (S&D, sociaux-démocrates) dessine trois pistes d’action. Résister, en répondant aux attaques avec des outils efficaces, protéger les infrastructures critiques, et retracer l’origine des piratages pour condamner les auteurs.

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Un débat au Parlement européen a eu lieu à l'occasion de la Journée mondiale de la presse, le 3 mai. © Juliette Vienot

La route est encore longue avant que ces projets législatifs n’entrent en vigueur. « Encore embryonnaires, il est très important que ces initiatives de bonne volonté de la Commission soient soutenues par les États-membres », souligne Tom Gibson. Le représentant du Comité pour la protection des journalistes auprès de l’UE ajoute que « le plus important, c’est que les journalistes voient des différences dans leur vie professionnelle suite aux réformes de l’UE ».

Delphine Schiltz et Juliette Vienot

Un Media Freedom Act très attendu

Par ailleurs, la Commission prépare une loi européenne sur la liberté des médias. Ce Media Freedom Act devrait être présenté à l'automne 2022. Beaucoup de mesures devraient concerner le secteur économique : la transparence sur la propriété des médias, la question des aides publiques et de la publicité d’État. Le texte devrait aussi traiter de l’indépendance éditoriale des rédactions et de la lutte contre la désinformation. Les ONG de défense de la presse espèrent que le texte s’inspirera du principe de conditionnalité des subventions européennes au respect de l’État de droit. « On aimerait vraiment que les violations en matière de liberté de la presse puissent amener à la suspension des aides européennes », précise Julie Majerczak.

La menace russe plane sur l’Afrique occidentale et sahélienne

« Il faut dire qui est responsable de cette situation, c’est la Russie ! C’est elle qui envoie les mercenaires Wagner dans ces pays », s’exclamait Michael Gahler (PPE, droite). Mercredi 4 mai, les députés européens se sont réunis pour débattre sur les menaces pour la stabilité, la sécurité et la démocratie au Sahel et en Afrique occidentale. S’ils ont passé en revue les différents facteurs de déstabilisation dans la région, c’est bien la Russie et le groupe Wagner qui sont ressortis des débats comme étant les principaux responsables des maux de la région. En proie aux attaques terroristes, la situation sécuritaire se dégrade dangereusement au Sahel.

Au Mali, la junte au pouvoir vient de dénoncer les accords de défense signés avec Paris et ses alliés européens. Alors que le retrait des troupes françaises du pays se poursuit, des mercenaires russes du groupe Wagner ont été filmés en train d’enterrer des corps dans le sud du pays, il y a deux semaines. Pour l’armée française, ce serait une manière d’accuser les soldats français de laisser des charniers derrière eux, et d’attiser ce sentiment anti-européens croissant qui règne au Sahel. L’eurodéputé Nathalie Loiseau (Renew, Libéraux) s’en est indignée : « Des civils assassinés, des cadavres manipulés, c’est cela Wagner au Mali. »

Reporters sans frontières (RSF) s’est félicitée de voir l’UE s’attaquer aux poursuites judiciaires infondées. « Le contenu est bon, avec des garanties procédurales », affirme Julie Majerczak. La directrice du bureau RSF à Bruxelles souligne toutefois que « la notion d’impact transfrontalier limite significativement les cas concernés ». Selon les données de la Coalition européenne contre les procédures-bâillons (CASE), seul un procès infondé sur dix serait concerné par cette législation.

Le 27 avril, la Commission a proposé une loi pour lutter contre les procédures-bâillons, aussi appelées SLAPPs. Il s’agit de procès abusifs intentés à des journalistes par des personnalités puissantes ou des entreprises. « Le but de ces actions abusives est de faire traîner le procès et de rendre la procédure la plus chère possible », souligne la vice-présidente de la Commission, Věra Jourová. La future législation prévoit des mesures pour rejeter rapidement une plainte abusive, sanctionner les auteurs et indemniser les victimes. Elle couvre uniquement les poursuites-bâillons transfrontalières, c’est-à-dire impliquant plusieurs pays. Pour les affaires strictement nationales, les États sont encouragés à appliquer les mêmes dispositions, sans y être contraints. Le texte doit encore être débattu et voté par le Parlement et le Conseil de l’Union européenne.

Une législation européenne encore insuffisante

Jusqu’ici, les institutions européennes n’ont pas été proactives en matière de défense de la liberté de la presse. C’est l’assassinat de la journaliste maltaise Daphne Caruana Galizia en 2017 qui a créé un électrochoc. Ce drame a révélé les carences des lois européennes en matière de protection de la liberté des médias. Depuis 2019, la Commission européenne agit plus activement en faveur de ce principe essentiel à la démocratie.

Un constat alarmant au sein même de l’Union

Pas besoin d’avoir des balles pour avoir les journalistes en ligne de mire » a cependant rappelé le député Tiemo Wölken (S&D, sociaux-démocrates), soulignant l’état dégradé de la liberté des médias au sein même de l’Union européenne. Selon le récent rapport RSF, « certains gouvernements dans l’Union européenne ont durci les mesures liberticides à l’égard des journalistes, en particulier en Slovénie, en Pologne, en Hongrie, et en Grèce ». L’ONG pointe également un grand nombre d'agressions physiques et d’intimidations dans le contexte des manifestations antivax. L’année 2021 a aussi marqué le retour des assassinats de journalistes. Le Grec Giorgos Karaivaz et le Néerlandais Peter R. De Vries ont été abattus au cœur de deux métropoles européennes.

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