17 février 2023
À partir de 2035, la vente de voitures et de camionnettes thermiques neuves sera interdite sur le sol européen. Ce mardi, les eurodéputés ont approuvé cette réglementation inédite. Elle répond aux ambitions de l’Union européenne de ne plus émettre de CO2 d’ici à 2050. Mais les inquiétudes demeurent quant à la possibilité de s’adapter pour l’industrie automobile européenne d’ici à douze ans.
Des acclamations résonnent dans l’hémicycle du Parlement européen. Sur les bancs de la gauche et du centre, les pouces se lèvent et les sourires soulagés se multiplient. Ce mardi 14 février 2023, les députés européens ont approuvé, à une courte majorité, l’interdiction d’ici à 2035 de la vente de voitures et de camionnettes neuves à moteur thermique sur le sol européen. "C’est un vote historique, s’est réjouie Karima Delli, eurodéputée des Verts et présidente de la commission Transports du Parlement européen. C’est la première fois que l’Europe se dote d’un calendrier dans le secteur automobile."
Cette nouvelle réglementation s’inscrit dans un projet plus large, visant à atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050 en Europe. Aujourd’hui, l’automobile y est responsable de 15 % des émissions de CO2. L’objectif de ce texte est de fixer un cadre législatif aux industries automobiles européennes pour leur permettre d’investir dans des véhicules plus propres, comme les voitures électriques.
Pousser les constructeurs vers l’électrique
"Elles émettent cinq fois moins qu’une voiture thermique", explique Marie Chéron, de l’ONG Transports et Environnement. "Les États-Unis et la Chine produisent déjà beaucoup de véhicules électriques, avance Jan Huitema, eurodéputé néerlandais Renew (libéraux) et chargé du texte. La nouvelle loi permettra de stimuler l’investissement des entreprises dans ce secteur, ici en Europe."
Dans douze ans, les voitures thermiques et hybrides neuves seront interdites à la vente en Europe. © Zoé Dert
Un optimisme que ne partagent pas les eurodéputés de la droite et de l’extrême-droite, qui ont voté à majorité contre le texte. Pour eux, si la voiture électrique est bien un secteur d’avenir, l’échéance de 2035 est considérée comme trop ambitieuse. "Nous ne pouvons pas nous permettre de jouer aux apprentis sorciers avec cette filière", déplore Nathalie Colin-Oesterlé, eurodéputée française du Parti populaire européen.
Jan Huitema, eurodéputé néerlandais Renew (libéraux), en charge du texte. © Frédéric Marvaux, European Union 2023 - Source : EP
Tous dénoncent une nouvelle réglementation manquant de réalisme compte tenu du prix élevé à l’achat d’un véhicule entièrement électrique. Aujourd’hui, une citadine électrique neuve coûte en moyenne 10 000 euros de plus qu’un véhicule similaire à moteur thermique. Un coût qui empêche de facto une majorité de citoyens d’accéder à une mobilité plus propre, à l’heure où la voiture représente plus de la moitié des déplacements en France. "Pour être cohérent, il faut que les pouvoirs publics poussent les constructeurs à fabriquer des modèles plus petits et légers, donc moins chers à l’achat", explique Pierre Leflaive, du collectif d’ONG Réseau Action Climat.
"L’Europe a pris beaucoup de retard"
Reste maintenant la question cruciale des batteries qui alimentent les voitures électriques. Aujourd’hui, plus de la moitié d’entre elles sont fabriquées en dehors de l’Union européenne. "L’Europe a pris beaucoup de retard, même si les usines de batteries électriques commencent à voir le jour, notamment dans le nord de la France", reconnaît Karima Delli. Des projets de giga-factories sont actuellement en cours dans douze pays européens.
"Relocaliser la production de batteries en Europe permettrait de réduire leur empreinte carbone de 40 %", approuve de son côté Pierre Leflaive. Mais pour les développer, Karima Delli souligne que la main-d’œuvre experte n’est pas encore au rendez-vous. "Notre objectif est de valoriser les emplois dans la filière et de promouvoir de nouvelles formations pour les rendre attractifs."
Zoé Dert et Erwan Drouillac