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Importée des États-Unis, cette forme d'humour séduit par sa spontanéité. Ses acteurs s’y adonnent dans des bars.

Mecredi 11 mars, 20h30 au Bercail, un bar de la Petite France. La  serveuse fait le tour des tables pour dire que le service s’arrête, par respect pour les artistes. “Vous pouvez toujours venir au comptoir si vous voulez un truc à boire ou à manger”, glisse-t-elle aux spectateurs. Bancs en bois et chaises rouges sont alignés devant une petite estrade. Le show peut commencer.

Sans artifice ni décor

Frédéric North, fondateur du collectif, est en charge de la présentation ce soir. Formé en juin dernier, le St’Up rassemble sept artistes, une bande de copains humoristes, tous passionnés de stand-up. Le concept est simple : microphone en main, chacun a une dizaine de minutes pour faire rire le public, sans artifice vestimentaire ou décor. “Le stand-up est très différent du sketch, on s’adresse directement au public sans faire intervenir de personnage fictif. Au début, on a tendance à se baser sur des sketches, mais au fur et à mesure on commence à lâcher un peu prise et chacun de nous trouve son propre univers”, explique Fred North.

Stefan Bobner est l'un des sept membres du collectif St'Up. © Marylou Czaplicki

Blase a la lourde tâche d’ouvrir la soirée. Des premiers rires timides résonnent dans le bar. Il fait monter l’ambiance crescendo avec son humour macabre. Tangé fait le pitre, il débarque sur scène, soutiens-gorge sur le visage, son masque pour “se protéger du coronavirus”. Au programme de la soirée, six artistes dont un invité. Dans le public, des jeunes et des moins jeunes, des couples et des groupes d’amis, des habitués du lieu et des nouveaux, savourent ce moment, verres en main. 

S'inspirer du quotidien

“Je prends beaucoup de notes sur mon téléphone au fil de la journée, je m’inspire de mon quotidien, de l’actualité. Puis je me pose une après-midi dans la semaine pour écrire mon texte”, raconte Ouutch, Alexis Schneider de son vrai nom. Guest de la soirée, il a commencé le stand-up il y a tout juste un an, fortement inspiré par Jamel Debbouze. Sur scène, il crée très vite une symbiose avec son public, taquine, se confie, tacle. Il parle de sa vie avec sa petite amie comme de viol ou de pédophilie. Son humour décomplexé séduit le public.

Au sein du St’Up règne une diversité de styles. Certains aspirent à une écriture plus théâtrale, s’inspirent de la littérature, du mime, du chant. “On pense souvent que le stand-up est un exercice facile, parce qu’on parle comme si on était à la maison avec sa famille. Mais la construction du texte est la même qu’au théâtre”, affirme Shongo Tangé, artiste du St’Up. “La différence c’est que dans le théâtre, on ne va pas communiquer avec le public, on se contente de jouer un personnage. J’aime être en rapport direct avec le public, improviser des choses dans la rue, faire un peu le con, le stand-up reste l’idéal de cet esprit là.”

Mais difficile d’en faire un métier. Ces stand-uppers ont souvent un travail à côté, sinon des jobs pour arrondir les fins de mois. Stefan Bobner, membre du St’Up, s’est lancé parce qu’il s’ennuyait quand il était au chômage à Paris, là où la scène stand-up en anglais est beaucoup plus développée. D’origine tchèque, à son arrivée à Strasbourg, il a créé le Strafunkel Comedy Club, un comedy club exclusivement en anglais. “Le Strafunkel attire surtout les étudiants internationaux. les thématiques abordées sont plus universelles. Dans le stand-up en français, les gens rient beaucoup plus de leurs habitudes régionales. D’ailleurs, 40% des blagues sont moins drôles quand elles sont traduites de l’anglais au français. Il faut vraiment adapter l’écriture selon la langue et le public”, observe Stefan Bobner.

“Il y a encore un an, il y avait très peu de scènes ici, aujourd’hui ça se développe un peu plus”, remarque Ouutch. Les artistes d’Alsace rêvent de la capitale. Souvent difficile d’accès, avec un public très exigeant. Depuis octobre, Zohar et Maurizio, qui ont longtemps fait vibrer le Bercail, font tout le contraire : ils invitent des artistes parisiens connus à se produire à Strasbourg. Ils ont créé le Plato Comedy Club. Un rendez-vous mensuel avec un artiste différent à chaque fois au Fat, un bar place d’Austerlitz à Strasbourg.

 

Manal Fkihi

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