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Depuis 1990, plus de 130 numéros du News d'Ill, le journal des étudiants de deuxième année du Cuej, sont parus dans les kiosques de Strasbourg et de Navarre. Nous replongeons dans ses archives pour répondre à la question qui nous taraude : dix, vingt, trente après... que sont devenus celles et ceux qui y ont participé ?

Dans le n°5 de décembre 1990, Damien Spatara faisait l'objet d'un portrait. Cet artisan poêlier, installé à Kaltenhouse, venait de lancer son atelier. Trente ans plus tard, il a eu l'occasion de travailler sur de merveilleux chantiers, comme ceux du Château de Versailles et de Chambord.

Cet article s'inscrivait dans un dossier de quatre pages sur l'intégration italienne en Alsace réalisé par Daniel de Barros, Christophe Busché, Angélique Gridel et Frédéric Paruta.

Sarah Dupont, Rafael Andraud et Camille Lowagie

Les membres de la « Génération Z » revendiquent au grand jour leur engagement auprès du polémiste d’extrême-droite.

[Podcast] Damien, de poêle en poêle

08 septembre 2021

[Podcast] Damien, de poêle en poêle

Sarah Dupont et Camille Lowagie ont retrouvé Damien Spatara, un artisan poêlier qui a depuis travaillé sur un chantier au Château de Versailles.

Des militants de «  Génération Zemmour  » en pleine séance de collage d'affiches.

L'illetrisme, à différencier de l'analphabétisme, désigne aussi des difficultés pour compter © CONGERDESIGN / PIXNIO 

« On n’hésite plus à s’afficher sur les réseaux sociaux. Dans la rue, les gens nous félicitent au lieu de nous insulter. On n'a plus peur d’afficher nos opinions politiques grâce au Z. » Jürgens en est assuré, Éric Zemmour sera le prochain président de la Ve République. Pour l’étudiant en informatique de 22 ans, l’ancien journaliste politique, surnommé « le Z » par ses partisans, est le Messie que la droite réactionnaire attendait. Comme lui, plusieurs centaines de jeunes ont répondu à l’appel des comités de soutien à la candidature d’Éric Zemmour.

La tentation hors partis

Rassemblés sous la bannière de « Génération Z », ils ont déjà entamé la collecte des 500 parrainages pour permettre à leur héros de pouvoir se présenter devant les électeurs. La démarche consistant à s’engager pour un homme qui n’a jamais brigué une seule fonction élective n’est pas nouvelle. Mais dans le cas Zemmour, la dimension éminemment clivante du personnage pose question. Les multiples condamnations judiciaires du polémiste, notamment pour provocation à la discrimination raciale, n’échaudent pas la détermination de ses partisans.

« Zemmour représente un nouveau souffle pour la droite, explique Nikita. La dynamique autour de lui, et de ce qu’il incarne, peuvent faire triompher les idées que l’on ne retrouve plus dans les partis politiques actuels. »  Le discours politique de cette étudiante de 19 ans en année préparatoire intégrée, est bien rodée. Présidente du « collectif Némésis » à Strasbourg, un syndicat « féministe et anti-immigration », Nikita n’a jamais milité dans un parti politique, mais a tout de même rejoint l’UNI (le principal syndicat étudiant de droite), après son entrée à l’université.

Influences idéologiques

« J’ai découvert Zemmour dans l’émission « On n’est pas couché » et j’ai acheté tous ses livres depuis », déclare la jeune femme qui a rejoint Génération Z depuis quelques mois. « Ce qui me séduit avant tout chez lui ? Ses idées bien sûr, mais surtout la verve et le panache avec laquelle il les défend. On ne retrouve ça chez aucun homme politique aujourd’hui. » D’une famille qu’elle qualifie elle-même de « droite conservatrice », Nikita se reconnait dans le gaullisme, le souverainisme et les écrits de Germaine de Staël, une femme de lettres française de la période révolutionnaire.

Reprenant en partie les arguments qu’un certain Eric Zemmour développait déjà dans son ouvrage le Premier Sexe, elle affirme : « J’ai toujours eu un mépris pour cette vision du féminisme que l’on retrouve partout à l’université et qui sépare le monde entre le méchant homme blanc cisgenre et la pauvre femme victime du patriarcat. Cette vision est délétère. »

Jürgens s’est quant à lui engagé à 20 ans à l’UNI, et dans le même temps au Rassemblement National.  Selon lui, la solution se trouve aujourd’hui en dehors des partis qui ont « délaissé les intérêts du peuple. »

« Pour moi la campagne des municipales a été un tournant. J’exécrais les personnes pour lesquelles je militais. Les vices de la politique locale m’ont dégoûté. Je suis bonapartiste et, pour moi, le mérite doit primer partout. » Après avoir quitté le RN au bout d’un an et demi avec une désillusion de plus, un ami de la très droitière association la Cocarde Étudiante, a dévoilé à Jürgens la possible candidature d’Éric Zemmour. « Je le suivais depuis longtemps et comme je ne crois plus aux politiciens, il est devenu la seule hypothèse viable à mes yeux », affirme l’étudiant.

Un discours qui fait mouche

Zemmour a toujours joui d’une cote de popularité très importante au sein des associations étudiantes de droite. Pour eux, la radicalité de son discours est la preuve de sa sincérité.

« Les jeunes autour de moi sont prêts à s’engager pour quelqu’un comme Zemmour. On sait qu’une personne qui a pour nom Le Pen ne pourra jamais gagner l’élection présidentielle. Avec Zemmour, on n'a plus peur de s’afficher, se réjouit Jürgens. Lorsqu’on fait des collages la nuit, les policiers s’arrêtent, nous félicitent et nous demandent des affiches. Les gens nous encouragent, je ne ressentais pas ça quand j’étais au RN. »

Le discours du polémiste a trouvé un écho chez la jeune Nikita. « Lorsqu’à onze ans on vous menace de viol dans la rue et qu’on vous traite de sale française, c’est quelque chose qui vous marque. Aujourd’hui, peu m’importe si je passe pour la facho dans ma classe, j’assume mes idées. » Au moins, le message est clair.

Emilien Hertement

7% des Français ont du mal à lire, écrire ou compter. Des associations se mobilisent sur le sujet du 6  au 12  septembre.

Envoyer des sms, faire ses courses, répondre à des mails : des gestes parfois compliqués à effectuer pour près de deux millions et demi de Français. Ces derniers ont des difficultés à lire, à écrire et à compter. Loin des clichés, cette situation concerne des profils très variés. Selon une étude de l'ANLCI (Agence Nationale de Lutte contre l'Illetrisme), plus de la moitié des personnes touchées ont plus de 45 ans ou exercent une activité professionnelle. Cela « peut concerner n'importe quelle personne », note Julia Didelot. « Ce n'est pas écrit sur le front ».

Chargée de mission au sein de l'association « Savoirs pour réussir », la jeune femme dispense des cours depuis plus de dix ans. Elle peut voir au quotidien les conséquences sur les personnes qu'elle suit. Un impact envahissant sur les moindres actions quotidiennes : « Arriver à l'heure, utiliser un GPS, retirer de l'argent... »

Souvent confondu avec l'analphabétisme, l'illettrisme est une difficulté à maitriser les savoirs de base : écriture, calcul et lecture. Un problème répandu : certains cachent leurs difficultés pendant des années.

 

Des profils très divers

 

Pour offrir des formations aux personnes qui en ont besoin, l'association travaille en collaboration avec les organismes locaux, Pôle Emploi ou les missions locales. Les sujets repérés sont ensuite orientés vers l'association qui les prend en charge. Julia Didelot évoque également un « effet de bouche à oreille » : « Les gens demandent à venir avec leur ami ou leur mère qui a les mêmes difficultés ». En parler est important : par peur du jugement, certains cachent leur situation pendant des années et passent maîtres dans l'art de la dissimulation , explique Julia Didelot

Prétexter des problèmes de vue lors de la signature de contrats, emporter des papiers chez soi, les faire remplir par des membres de la famille, " il y a plein de stratégies de contournement", constate Julia Didelot. Elle explique recevoir des sms de personnes ne savant pas écrire. " Je suis étonnée, je me dis que le sms est bien écrit... et elles ont en fait utilisé la saisie vocale de leur téléphone ".

Eviter les situations gênantes permet de ne pas se faire repérer. Se former permet pourtant un nouveau départ.

 

Gagner en autonomie

 

Julia évoque les effets bénéfiques de la prise en charge comme une amélioration de l'autonomie et de la confiance en soi. « Ils osent aller vers quelque chose ». Elle évoque cette adhérente qui a passé un certificat de formation générale, équivalent au brevet des collèges, après avoir pris des cours pendant deux ans. « Elle n'arrivait pas à écrire. Son entourage lui faisait sentir son absence de diplôme. Elle continue sur une autre formation. Elle construit des projets pour l'avenir. » 

Un escape game à destination de personnes en situation d'illettrisme s'est déroulé mercredi 8 septembre. Organisé en partenariat avec la Banque de France, « Sur la piste de Matthieu » invite les participants à s'initier aux démarches bancaires et à repérer des arnaques financières. Autre action, en ligne cette fois, une campagne de sensibilisation. L'association " Savoirs pour réussir " a choisi de diffuser chaque jour un portrait d'apprenant sur les réseaux sociaux, afin de promouvoir leur parcours. Une façon de mettre en valeur des personnes longtemps restées dans l'ombre.

 

Leïna Magne

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