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Ententes et désaccords sur les indices de référence


12 mars 2015

Alors que les scandales du Libor et de l'Euribor ont mis au jour la vulnérabilité des indices financiers, l'Europe entend  légiférer pour assurer leur fiabilité et leur transparence. Mais l'adoption de cette la législation prend du retard: les groupes politiques du Parlement peinent surtout à trouver un accord sur l'ampleur des indices qu'il est indispensable d'encadrer.

Pendant des années, les banques ont manipulé et influencé les indices de référence tels que le London Interbank Offered Rate (Libor) et l'Euro Interbank Offered Rate (Euribor), qui fixent quotidiennement les taux moyens auxquels elles se prêtent mutuellement à différentes échéances. La distorsion de ces indices à des effets considérables, puisqu'ils déterminent ensuite les taux d'intérêt de certains produits financiers comme les prêts immobiliers, les comptes à terme ou encore les livrets d'épargne. Pour éviter ce type de dérives, la Commission a proposé une réglementation qui rendra plus transparent le processus de leur formation.

Les indices de référence sont des prix, des estimations, des cours ou des valeurs qui servent de repères à des instruments ou des contrats financiers. L'Euribor, le Libor ou encore le Tibor déterminent des taux d'intérêt. Mais il existe des milliers d'autres indices permettant d'établir le prix auquel un instrument financier est acheté, vendu ou négocié. Sur le marché des matières premières on peut citer par exemple l'Argus Sour Crude Index. Pour les dérivés  l'ISDAfix sert de base pour mesurer la performance d'un produit.

Tout l'objet de la réglementation européenne est de surveiller et encadrer ces indices graduellement, selon le risque qu'ils représentent pour la stabilité du marché financier en cas de manipulation. Pour cela, la Commission européenne a inventé le terme d'indice « d'importance critique ». Mais les groupes politiques peinent à se mettre d'accord sur le seuil à partir duquel on considère un indice comme critique et donc sur le champ d'application du réglement.

La néerlandaise Cora van Nieuwenhuizen (ALDE), rapporteuse attitrée sur cette réglementation, pensait faire adopter son texte lundi 9 mars par la Commision ECON. Elle a du y renoncer faute de position commune sur ce sujet. Ce mercredi, lors d'une réunion à huis-clos avec les rapporteurs parallèles nommés par chacun des groupes politiques, elle n'a toujours pas trouvé de compromis susceptible de réunir une majorité.

« Un tout nouveau cadre pour les indices de référence »

Cora van Nieuwenhuizen prévoit qu'un indice soit considéré comme d'importance critique dès lors qu'il est utilisé comme référence pour des instruments ou contrats financiers d'une valeur de 500 milliards d'euros. Mais certains groupes, à l'image des Verts, jugent ce seuil trop élevé. Michael Schmitt, conseiller économique des Verts estime qu'il faut l'abaisser à 100 milliards d'euros, faute de quoi trop d'indices ne seront pas surveillés.

Chaque jour, des opérateurs financiers échangent des informations sur leurs activités et établissent des taux qui serviront d'indice de référence. Le risque c'est qu'ils s'entendent entre eux et manipulent les marchés lors de cette élaboration. Des enquêtes sont d'ailleurs en cours sur les méthodes appliquées par plusieurs banques internationales pour déterminer le prix de l'or, de l'argent et du pétrole ou le taux d'intérêt appliqué aux swaps et au change. Des soupçons d'opérations d'initiés et d'entente pèsent sur ces établissements.

A ce jour aucune législation européenne n'existe pour éviter ce genre de pratiques controversées. C'est ce vide juridique que la réglement proposé par la Commission européenne entend combler. C'est donc la première fois que le Parlement se penche sur ce sujet. Pour Michael Schmitt, par le biais de ce premier règlement européen « c'est un tout nouveau cadre qui est créé pour les créateurs d'indices de référence ».

Les rapporteurs des six groupes politiques ont prévu de se réunir à nouveau dans la semaine du 16 mars pour régler les points de friction. Ils espèrent avoir finalisé leur texte pour la fin du mois de mars, afin d'entamer avec le Conseil les négociations préliminaires à une adoption conjointe .

Chloé Gandolfo

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