07 février 2013
En adoptant jeudi sa position sur l'examen annuel de la croissance fait par la Commission, le Parlement européen a infligé une défaite amère à sa rapporteure socialiste Elisa Ferreira. Sa proposition de résolution faisait la part belle à la critique de l'austérité.
Adopté jeudi au Parlement européen par 329 voix contre 271 et 13 abstentions, la résolution sur l'examen annuel de la croissance 2013 est un échec cuisant pour sa rapporteure Elisa Ferreira, députée démocrate socialiste portugaise, qui a uni contre elle conservateurs et libéraux.
L'eurodéputée avait proposé à deux reprises à sa commission un texte qui s'en prenait vivement à la politique d'assainissement accélérée des finances publiques, fustigeait l'austérité et prônait l'investissement. Un calque précis des positions socialistes sur ces questions. L'ensemble de la droite a donc rejeté en bloc la totalité du rapport, arguant de la nécessité du désendettement public, et proposé un compromis qui n'a pas été entendu. Dans ce climat électrique, ALDE, PPE et CRE se sont coalisés pour adopter un texte diamétralement opposé.
Refus de compromis
« La majorité de droite n'a pas accepté mon avis, s'est opposée à mon groupe politique et a adopté un texte amputé d'un certain nombre d'éléments » s'est emportée la socialiste. En effet, le nouveau texte est un soutien à l'analyse de la Commission qui insiste sur la priorité de la consolidation budgétaire, préalable au retour à la croissance. Il rappelle aussi l'urgence de lancer des réformes structurelles équilibrées et souhaite un assouplissement de la réglementation du marché du travail dans certains États membres. Selon lui, l'ensemble de la zone euro traverse une récession à double creux causée par un endettement excessif et par la crise financière. Elisa Ferreira qui voulait tordre le coup aux politiques d'austérité, voyait désormais dénaturé le texte présenté sous sa signature.
Le revers a été tel que la parlementaire a demandé au président de séance que son nom soit retiré du rapport, ne souhaitant pas qu'elle et son parti soient associés à un panégyrique des politiques d'austérité. Que le rapporteur soit désavoué au point que le rapport ne porte plus son nom est une procédure qui se produit rarement. Pour ses adversaires, cela démontre que la stratégie politique d'Elisa Ferreira n'a pas été payante et que son acharnement l'a desservie. Ils ajoutent que cette situation assez inhabituelle prouve qu'il vaut parfois mieux faire des concessions politiques: la stratégie frontale adoptée pour faire voter le rapport initial a cristallisé les oppositions.
Tensions avant les législatives
Au delà de la péripétie, ce durcissement des positions témoigne de l’approche des élections européennes et du raidissement des deux grands partis, qui vont bientôt devoir faire face à leurs électeurs. Le moment du front uni de l'institution face aux chefs de gouvernements semble donc sur le point de s'achever.
À la fin de la séance de votes, Jean-Paul Gauzès (PPE) s'est déclaré très satisfait de la résolution adoptée, qu'il juge équilibrée: «Heureusement, nous ne sommes pas allés à la catastrophe ! ». Pour sa part, Elisa Ferreira a conclu en déclarant « Nous n'avons pas rendu service aux citoyens européens aujourd'hui ». Plus de 25 millions d’Européens sont actuellement sans emploi dans l'Union.
Julia Ganansia